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Intervention de Jean-Pierre Balligand

Réunion du 9 novembre 2009 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2010 — Engagements financiers de l'État

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Balligand :

Mes chers collègues, s'il s'agissait de budgets ridicules, la question ne serait pas grave, mais nous touchons là le fond du tonneau des Danaïdes ! La situation est plus qu'inquiétante !

Surtout, la désinvolture du Gouvernement transparaît dans le choix des objectifs et des indicateurs retenus pour l'évaluation de la performance. La mission « Remboursements et dégrèvements » en est un exemple parfait, comme le relève le rapporteur spécial.

Quels sont les indicateurs retenus pour cette mission ?

Le programme 200, qui porte sur les impôts d'État et regroupe tout de même plus de 78 milliards de crédits dans le PLF 2010, ne dispose en tout et pour tout que d'un seul objectif ! Celui-ci, intitulé « Permettre aux usagers de bénéficier de leurs droits le plus rapidement possible », est décliné en trois indicateurs dont l'examen révèle que les niveaux qui leur sont assignés pour cibles sont très peu ambitieux. Pour le premier indicateur par exemple, qui est le « Taux de demandes de remboursement de crédit TVA non imputable et de restitutions d'impôts sur les sociétés remboursées dans un délai inférieur ou égal à 30 jours », les prévisions et les cibles ont été et continuent d'être à 80 % alors même que toutes les réalisations avoisinent les 90 % ! On pourrait en déduire que la direction générale des finances publiques a trouvé un moyen commode de satisfaire ses objectifs sans faire trop d'efforts. Il n'en est rien, comme l'explique M. Cousin dans son rapport. Si « les cibles des indicateurs actuels sont déterminées de telle manière qu'aucun progrès en termes de rapidité ne puisse être fixé », c'est parce que ce programme « marche sur une seule jambe », écrit-il : « L'administration est en effet consciente du biais qu'introduit un indicateur unique de rapidité et vise ainsi à l'équilibrer par des objectifs peu ambitieux, pour ne pas sacrifier la régularité à la rapidité. » Autrement dit, le fait que Bercy n'ait encore – huit ans après le vote de la LOLF ! – défini qu'un seul objectif pour ce programme lui permet de justifier la fixation de cibles inférieures à ses propres performances pour les indicateurs liés à ce même objectif… Cette mission marche peut-être sur une seule jambe, monsieur Cousin, mais nous, nous marchons sur la tête pour accepter une telle situation !

Le même constat s'applique au programme 201, relatif aux impôts locaux, si ce n'est qu'il ne dispose pas de trois mais d'un seul indicateur... Certes, on pourrait objecter que les lacunes de ce dispositif d'appréciation de la performance tiennent en partie à l'architecture très particulière de cette mission. L'absence de crédits de personnel interdit ainsi d'espérer apprécier le coût de gestion de ces dégrèvements et remboursement. De surcroît, cette mission comprend, outre des remboursements liés à la « mécanique » de l'impôt, comme les remboursements d'acomptes, des dépenses liées à des politiques publiques comme le crédit d'impôt recherche ou la prime pour l'emploi. Or la Cour des comptes et les commissions des finances des deux assemblées ont souhaité, depuis plusieurs années, que cette architecture soit modifiée ou au moins aménagée. Des difficultés techniques ont certes pu être mises en avant par le Gouvernement, mais elles ne suffisent pas à expliquer pourquoi, alors que la Cour des comptes avait souligné dès 2007 un « pilotage très allégé » des crédits de cette mission, la seule évolution mise en oeuvre depuis lors consiste en une modification, certes intéressante mais somme toute limitée, de la nomenclature de la présentation par actions du programme 200.

Enfin, le dernier exemple de la désinvolture du Gouvernement à l'égard de la capacité de contrôle du Parlement réside dans le caractère virtuel du budget qu'il présente.

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