Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous devons aujourd'hui nous prononcer sur le budget pour 2010 de ce que l'on appelle en raccourci la mission « Médias » et qui recouvre la gestion et la valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien et les avances à l'audiovisuel.
Les sujets qui pourraient être abordés à la faveur de cette discussion sont légions, il nous faut bien faire des choix. C'est pourquoi je concentrerai mon intervention sur les crédits du programme 115, destinés à l'« Action audiovisuelle extérieure ».
L'an passé, nous avons voté un budget qui portait sur la réforme mise en place par le Gouvernement concernant l'architecture et le financement du dispositif français d'audiovisuel extérieur.
Depuis l'exercice 2009, ce financement a été regroupé dans un seul programme de la mission « Médias », la plus grande part de la dotation étant versée à la société holding Audiovisuel extérieur de la France, créée le 4 avril 2008, dont l'État est le seul actionnaire et dont le budget est en augmentation de 2,4 % par rapport à 2009.
Bien que ce budget puisse, à première lecture, sembler prometteur, des questions, voire des inquiétudes, demeurent sur les grandes lignes de cette réforme.
La première préoccupation concerne France 24.
Rappelons que les ambitions qui ont présidé à la création de cette chaîne visaient à doter la France d'une grande chaîne d'information continue internationale. En offrant une vision française de l'actualité du monde qui enrichit les points de vue et renforce les positions françaises, France 24 doit être en effet la voix de la France.
Alors que l'AEF s'est fixé pour principal objectif de contribuer au rayonnement de la France dans le monde, notamment par la diffusion d'émissions de télévision et de radio relatives à l'actualité, aussi bien auprès des Français de l'étranger que du public étranger, comment se fait-il, monsieur le ministre, que France 24 ne soit pas présent en Amérique Latine ?
Par ailleurs, je me permets de rappeler que France 24 a été créée avec un apport en capital de TF1 et France Télévisions, pour un montant de 17 500 euros chacun. Alors que TF1 affichait initialement pour le rachat de ses parts des prétentions démesurées – on a parlé de 90 millions d'euros –, chaque partie s'est finalement vu attribuer un million d'euros, ce qui n'est mal quand même, vous en conviendrez, monsieur le ministre. Pourriez-vous nous indiquer quelle est l'audience réelle de France 24 et quelles sont les intentions futures de développement tant au niveau des langues que des pays ?
J'évoquerai maintenant la situation de RFI.
La conduite de l'audiovisuel extérieur et la gestion de la crise majeure qui ébranle RFI continue de susciter des interrogations. Entre autres mesures, le Gouvernement avait, l'an passé, annoncé dans le cadre du projet global de modernisation de Radio France internationale la suppression de 206 postes. Sans pour autant remettre en question cette réforme, qui était sans doute nécessaire, les représentants du personnel en conviennent, il nous faut déplorer la manière dont la crise générée par cette politique a été gérée, ainsi que j'ai eu l'occasion de le rappeler dans cet hémicycle au printemps dernier.
Outre une réforme dont les objectifs sont restés assez flous, on ne peut que regretter la gestion de la crise sociale qu'elle a engendrée, crise exacerbée au demeurant par l'annonce d'embauches à France 24 alors même que RFI devait licencier. On peut d'ailleurs légitimement s'interroger sur les raisons pour lesquelles certaines personnes de RFI n'ont pas alors été transférées à France 24.
Je souhaite par ailleurs évoquer les 6,5 millions d'euros que le budget 2010 alloue aux crédits de développement de RFI alors que nous ignorons pour l'instant le coût du plan social. Nous arrivons en fin d'année 2009 sans connaître le contrat d'objectifs et de moyens 2009-2013. Monsieur le ministre, pourriez-vous nous donner davantage d'indications sur ces aspects du dossier RFI ? D'avance, je vous en remercie.
Pour achever ce tour d'horizon de notre audiovisuel extérieur, il me faut évoquer la réussite remarquable de TV5 Monde, dont la présence très forte dans le monde entier constitue indéniablement un atout.
Si TV5 Monde dispose aujourd'hui de l'un des trois meilleurs réseaux de diffusion en analogique, le passage au numérique risque fort de la déstabiliser. Il convient donc de veiller à désamorcer la concurrence entre France 24 et TV5 dans la conquête des réseaux numériques. Aussi, je tiens à féliciter sa directrice, Mme Marie-Christine Saragosse qui, à la suite de Serge Adda, dirige avec succès TV5 en s'attachant à la défense de son autonomie.
En conclusion et pour toutes les raisons que je viens d'évoquer précédemment, nous pensons qu'il est nécessaire de conduire une réflexion approfondie et nous souhaitons que plusieurs aspects de cette réforme fassent l'objet d'éclaircissements.
À plus long terme, nous souhaitons que les députés soient associés aux réflexions à venir, notamment sur le dossier de RFI, auquel, vous l'aurez compris, nous sommes particulièrement attachés, comme l'a rappelé le rapporteur Didier Mathus.
Permettez-moi ici de rappeler l'importante contribution parlementaire apportée au débat il y a trois ans déjà dans le cadre de la mission d'information, que j'avais l'honneur de présider, de la commission des affaires étrangères, alors présidée par l'ancien Premier ministre Édouard Balladur.
Je veux rappeler nos préconisations pour favoriser les synergies et mutualiser les moyens, les compétences et les savoir-faire. Je veux rappeler le choix que nous avions fait d'un modèle intégré tri-média associant radio, web et télévision. Je veux rappeler notre volonté d'ancrer l'audiovisuel extérieur français dans une perspective résolument européenne. Trois ans plus tard, ces préconisations demeurent pleinement d'actualité.
Plus globalement, nous considérons que ce budget pour 2010 est un budget de transition dans la mesure où les réformes entreprises doivent se poursuivre. Aujourd'hui plus que jamais, dans un contexte caractérisé par de profondes mutations techniques, économiques et sociales, l'audiovisuel extérieur est l'un des vecteurs essentiels de diffusion de la culture française.
Dans ce contexte, nous espérons que, malgré les difficultés, notre pays affichera son ambition en assurant une présence dans le monde. Le groupe Nouveau Centre considère que le budget va dans cette direction. C'est pourquoi je vous annonce que notre groupe le votera, même si, à titre personnel, je reste quelque peu réservé.