Avant de vous interroger, monsieur le ministre, je m'adresserai à MM. les présidents pour regretter de devoir étudier les crédits de la mission « Sécurité » dans le cadre d'un débat « simplifié ». Elle est suffisamment importante pour relever d'une procédure classique. S'agissant du centre de Roissy dont le président Warsmann vient de parler, je ne pense pas que les retards soient dus à des problèmes de bâtiments, ou de normes, c'est tout simplement que les professions judiciaires ne veulent pas se rendre à Roissy. Elles auraient l'impression de déchoir. Mais cela oblige à consommer énormément de moyens en transports divers et variés, et en maintien de l'ordre. Et c'est bien regrettable.
La création de la police d'agglomération à Paris est une bonne chose, mais la préfecture de police étant en elle-même, au sein de votre ministère, une institution, il faudra en la matière veiller à éviter certains écueils. Le premier réside dans l'éloignement entre la police nationale et les élus locaux, notamment les maires. En cas de difficulté, ceux-ci avaient pour interlocuteurs les directeurs de la sécurité publique ou les préfets, à la rigueur les sous-préfets. Certes, la mutualisation des moyens ira de pair avec une plus grande mobilité des forces. Encore faudrait-il conserver la réactivité et l'emploi judicieux des moyens que permettaient les échanges qui existaient. Je suis d'autant moins assuré que cette souplesse sera préservée que la culture de la préfecture de police est beaucoup plus centralisée que celle des commissariats des départements. Si la préfecture pilote une opération, on risque de perdre en réactivité ce qu'on aura gagné en effectifs ponctuels. Vous avez d'ailleurs pu, monsieur le ministre, vous en rendre compte récemment à Saint-Denis.
En revanche, la police d'agglomération – Paris n'ayant pas vocation à être la seule concernée – apportera beaucoup, à la fois au ministre et aux parlementaires, en facilitant les comparaisons entre les effectifs qui seront affectés à telle ou telle mission, ou à tel ou tel secteur. Le débat qui existe entre Paris et les départements de la Petite couronne ou même entre les départements de la Petite couronne sera clarifié. D'ailleurs, le préfet de police a rencontré les élus à propos de ces écarts que nous jugeons inexplicables, surtout quand on représente comme moi le département le plus criminogène de France.
La réduction progressive des effectifs programmée dans le cadre de la RGPP fait naître des inquiétudes. Mais j'attends beaucoup de la LOPPSI 2. Vous avez eu raison, monsieur le ministre, de retarder les débats pour réexaminer les choses à votre entrée en fonction. Je ne suis pas sûr que tout ce qui était dans les tuyaux était opportun. Mais tous les efforts que vous ferez risquent de se heurter à la multiplication des missions et à la diminution concomitante des effectifs. Votre budget mérite d'être défendu. Les tâches administratives ne doivent plus, en effet, être assumées par des fonctionnaires de police qui ont été formés à la sécurité. Mais vos efforts de rationalisation trouveront leurs limites.
Enfin, la police d'agglomération me semble une formidable opportunité d'utiliser au service de nos départements et de nos commissariats les moyens d'encadrement qui existent aujourd'hui à la préfecture de police de Paris. Ce serait d'une grande utilité. Il est en effet préférable de mobiliser des gens d'expérience dont on manque cruellement sur le terrain.
Vous me pardonnerez d'en revenir à des sujets que j'aborde année après année.
Tout d'abord, je ne comprends pas comment nous ne parvenons pas à gérer les flux de personnels, en entrée et en sortie. Vous êtes, monsieur le ministre, à la tête de la seule administration qui arrive à muter un fonctionnaire au mois de janvier pour ne le remplacer qu'au mois de juillet. Même l'éducation nationale ne le fait pas. Les mutations devraient être organisées en fonction des sorties de l'école. Faute de faire ainsi, l'effectif théorique annuel n'est pas atteint la moitié de l'année.
Ensuite, les forces mobiles, et plus particulièrement les compagnies républicaines de sécurité. Un ancien ministre de la sécurité, Robert Pandraud, indiquait que nous avions aujourd'hui autant de compagnies que dans les années soixante et soixante-dix, pendant lesquelles les conflits sociaux et les mouvements de masse étaient beaucoup plus importants. Je ne suis pas sûr qu'il faille maintenir un effectif aussi important alors que, dans la police, dans les commissariats, des besoins se font sentir. Vos prédécesseurs ont bien décidé d'utiliser les CRS à d'autres missions, mais ils n'y ont pas été formés, leur organisation n'y est pas forcément adaptée, pas plus que leur mode de commandement qui reste totalement extérieur à celui de la police locale. On voit, lorsqu'ils interviennent, la différence avec les forces de gendarmerie. Il y a une réflexion à mener sur les méthodes d'emploi, la souplesse de commandement et le dimensionnement des forces mobiles.
S'agissant des UTeQ, Mme Batho doute de leur efficacité, mais, pour ma part, j'ai trouvé celles que j'ai vues fonctionner utiles et efficaces. Elles parviennent à recréer un lien essentiel avec la population. Sous la dernière législature, on a opposé, de façon à mon avis surréaliste, police de proximité et police d'intervention. En réalité, nous avons besoin d'une police à la fois fidélisée – je salue ici le choix que vous avez fait de mieux valoriser le travail de ceux qui ont décidé de travailler dans les zones difficiles – et adaptée. On ne fait pas la police de la même façon à Clichy-sous-Bois, à Villeneuve-la-Garenne, à Villemomble ou à Drancy. L'UTeQ permet d'adapter les forces d'intervention au terrain grâce au lien qu'elle a su nouer avec la population. Sans ce lien, la police n'a pas de renseignement et, sans renseignement, elle n'a pas les moyens de travailler.
Une question encore sur le Fonds interministériel de prévention de la délinquance.