rapporteur spécial pour les crédits du patrimoine. Le projet de loi de finances dote le programme « Patrimoines » de 1,19 milliard d'euros en autorisations d'engagement et de 1,25 milliard d'euros en crédits de paiement, soit une croissance respective de 13,6 % et 11,1 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2009. Les crédits du patrimoine monumental et archéologique devraient connaître une croissance substantielle : 27,6 % en autorisations d'engagement et 28,3 % en crédits de paiement, atteignant ainsi respectivement 365 et 420 millions d'euros. Cette revalorisation est conforme à l'objectif fixé par le Président de la République de consacrer 400 millions à l'entretien et la restauration des monuments historiques. En 2010, les crédits dévolus à ces actions devraient s'élever en effet à 387,7 millions en CP, plus 14 millions en cours de gestion.
Les crédits du plan de relance de l'économie réservés aux monuments historiques se sont traduits par une ouverture de 100 millions d'euros en autorisations d'engagement en 2009, dont 80 consommés en 2009 et 20 en 2010.
Je m'en tiens là pour la présentation et j'en viens à mes questions.
La première concerne le futur musée de l'histoire de France. Le rapport de Jean-Pierre Rioux a retenu cinq sites susceptibles d'accueillir le nouveau musée : Chaillot, le Grand Palais, les Invalides, Vincennes et Fontainebleau. Le nouveau président de Fontainebleau, récemment nommé, ayant également été chargé du projet scientifique et culturel d'une future maison de l'histoire de France, cela signifie-t-il que le choix de l'implantation a été arrêté ? N'a-t-on pas de fait verrouillé le processus ? Par ailleurs, d'après les informations dont je dispose, les coûts du nouveau musée s'échelonneraient entre 15 et 60 millions d'euros, soit du simple au quadruple selon le site retenu. Pourquoi un tel écart ? Et où Fontainebleau se situe-t-il dans la fourchette ?
Autre projet, le Musée des civilisations d'Europe et de la Méditerranée, le MuCEM, que vous avez jugé, monsieur le ministre, prioritaire. Ce musée a été lancé il y a cinq ans et les travaux n'ont toujours pas débuté. Pourtant, le temps presse puisque ce monument doit être le porte-drapeau de Marseille, capitale européenne de la culture en 2013. Plusieurs associations de riverains ont intenté des recours contre le projet. Où en sont-ils aujourd'hui ? Risquent-ils de retarder encore les travaux ? Et si oui, quelles seraient les conséquences financières ? Par ailleurs, une mission de préfiguration a été créée en mai dernier, préalablement au choix définitif de la structure de gestion. La mission a-t-elle déjà rendu ses premières conclusions ? Si oui, lesquelles ?
Ma troisième question porte sur l'aménagement d'un espace dédié à la création actuelle dans l'aile occidentale du Palais de Tokyo. Il est envisagé de créer un nouvel organisme autonome pour gérer cet espace. Un rattachement au Centre Pompidou, assorti d'une large autonomie pour le nouvel établissement, n'aurait-il pas permis de mutualiser les fonctions d'administration et de support, et de faire des économies ? Et, eu égard à la proximité des collections, d'envisager des coopérations renforcées dans le respect de l'indépendance artistique de chaque établissement ? Pourquoi avoir rejeté une telle solution ? Pour la future structure, une société par actions simplifiée est envisagée ? Quels avantages cette option présenterait-elle par rapport à celle du rattachement ?
Une question aussi sur le patrimoine écrit et documentaire, et surtout sur le grand chantier d'avenir que représente la numérisation et la mise à disposition de ce patrimoine. Il s'agit d'un enjeu de société. Vous avez déclaré, monsieur le ministre, que la numérisation du patrimoine français ne pourrait se faire que « dans une garantie d'indépendance nationale absolue ». Qu'en est-il des projets de bibliothèque numérique Europeana pour l'Union européenne et Gallica pour la BnF ? Et de l'éventuel partenariat avec Google, dont le projet Google Books suscite beaucoup d'inquiétudes et d'interrogations sur le risque monopolistique et sur le respect des droits d'auteur ? Google a numérisé des oeuvres épuisées mais protégées, sans l'autorisation des ayants droit. Qu'en est-il de la rémunération des auteurs, des éditeurs et des ayants droit, les contenus numérisés générant des revenus publicitaires ? Enfin, s'il y a une commercialisation des oeuvres par Google via un service d'impression à la demande, n'est-ce pas une menace pour l'équilibre économique global de la filière du livre ?
Je partage les interrogations de mes collègues sur l'article 52 du projet de loi. Comme Mme Tabarot, j'aimerais connaître votre avis sur cet article et sur les suites que vous souhaitez y donner.
Je terminerai par un cri d'alarme, monsieur le ministre, pour sauver un grand monument français, qui abrite aujourd'hui Mirabeau, Voltaire, Victor Hugo, Rousseau, Zola, Jean Jaurès, Jean Moulin, l'abbé Grégoire, Alexandre Dumas, André Malraux, Pierre et Marie Curie. Il s'agit bien sûr du Panthéon. Il y a quatre ans, j'avais alerté votre prédécesseur à propos du quadrilatère Richelieu qui dépendait de la BnF à l'époque. Je suis heureux de constater que, cette année, des crédits importants permettront d'engager des travaux devenus indispensables. Inutile, monsieur le ministre, de souligner combien le Panthéon est essentiel pour les Français. Il faut aujourd'hui 100 millions, étalés sur six ans, pour financer les travaux nécessaires et cesser d'exposer les visiteurs à des risques considérables. Il y a urgence. Le plan de relance peut-il servir à rendre toute sa place à un monument essentiel de notre patrimoine, connu dans le monde entier ? À son fronton, il est écrit « Aux grands hommes, la patrie reconnaissante ». Je souhaiterais pouvoir donner à mon rapport l'épigraphe : « Aux grands ministres, l'Assemblée reconnaissante » (Sourires).