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Intervention de Éric Woerth

Réunion du 6 novembre 2009 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2010 — Gestion des finances publiques et des ressources humaines ; provisions ; régimes sociaux et de retraite

Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état :

Certes, vous pouvez la contester, mais en faisant cela vous reconnaissez qu'elle existe. Sinon, vous diriez qu'il ne se passe rien et que le Gouvernement est immobile. Mais j'estime que le tacle n'est pas très réglementaire. (Sourires sur les bancs du groupe UMP.) Il serait sifflé par l'arbitre parce qu'il est sans nuance.

Il y a bien une politique sur les salaires, avec l'instauration d'une prime de fonction et de résultats, la création d'un intéressement collectif à la suite de l'excellent rapport de Michel Diefenbacher, la mise en place de la garantie individuelle du pouvoir d'achat, la déconnexion entre le point d'indice et l'inflation qui a fait l'objet d'une discussion avec les organisations syndicales, ou encore le retour catégoriel de la réduction d'effectifs. On peut contester toutes ces mesures, mais ce n'est pas rien.

Il y a aussi une politique de mobilité. Jacques-Alain Bénisti a été l'excellent rapporteur d'un projet de loi, dont vous ne contestez en réalité qu'un ou deux articles sur vingt, comme toujours, et qui vise à assurer une meilleure mobilité dans la fonction publique.

Ce sont des outils, ce n'est pas une doctrine ou une idéologie politique. Nous avons évidemment besoin de souplesse. Personne, j'imagine, à droite comme à gauche, ne souhaite être dans un carcan. Le statut, ce n'est pas la « statutification », c'est bien une souplesse pour améliorer la carrière des fonctionnaires, Jacques-Alain Bénisti l'a très bien dit, à la fois dans son intervention, pour laquelle je le remercie, et lors de la discussion de ce projet de loi.

Nous allons poursuivre une politique résolument dynamique de la fonction publique, et continuer d'aller vers une fonction publique de métiers. Cela n'a pas été possible cette année, parce qu'il y a la crise. Je l'ai dit aux organisations syndicales, remettre totalement en cause l'organisation de la fonction publique à un moment où l'économie est elle-même remise en cause partout dans le monde, c'est accroître l'inquiétude. Toute réforme, aussi bonne soit-elle, amène de l'inquiétude. Ce n'était pas le moment d'en rajouter. La fonction publique de métiers, c'est, je crois, une bonne manière de gérer les carrières des fonctionnaires et, en même temps, d'avoir des administrations efficaces.

En attendant, nous diminuons le nombre de corps, par des fusions. Ce n'est pas parce que, s'il y en a moins, c'est plus pratique. Il y a ainsi moins de corporatisme et cela permet au fonctionnaire d'être reconnu en fonction de son métier et pas uniquement de l'appartenance à un corps. Mes prédécesseurs l'ont fait, je continue, avec un objectif politique précis, que j'assume.

En même temps, je réforme les grilles. La grille de la catégorie C a été réformée, celle de la catégorie B également. Ce n'est jamais assez, on veut toujours que la grille se termine beaucoup plus haut, que l'on passe beaucoup plus vite d'un échelon à l'autre. Je le comprends, mais on ne peut pas tout faire. On ne peut pas terminer à des niveaux trop élevés. Une carrière doit se faire dans le temps, les grilles doivent donc s'allonger. Un fonctionnaire qui arrive en haut de la grille alors qu'il a quarante-cinq ans, cela pose un problème de motivation. Tout le monde serait démotivé, moi le premier, je comprends donc parfaitement bien. Il faut donc aller plus loin, c'est ce que nous avons fait pour la catégorie B et c'est ce que nous sommes en train de faire pour la catégorie A.

Nous ne sommes pas totalement d'accord avec les organisations syndicales, qui, évidemment, demandent plus. Elles ont d'ailleurs de vrais spécialistes du sujet, que je salue. Nous ouvrons pour la catégorie A un troisième grade. Il est sûr que c'est plus sélectif, c'est-à-dire que tout le monde n'y aura pas accès, mais cela permettra d'aller beaucoup plus loin dans sa carrière, de commencer relativement bas et de terminer hors échelle. C'est une conception différente de la carrière d'un fonctionnaire au sein de son administration mais aussi de sa capacité à obtenir une reconnaissance de la nation. Les négociations ne sont pas terminées, nous verrons. De la même manière, et Michel Diefenbacher le sait mieux que moi, l'intéressement collectif est un élément puissant pour améliorer les conditions de rémunération des fonctionnaires.

Nous avons fait aussi des efforts très particuliers dans le domaine de l'accès à la fonction publique. Je ne reviens pas sur les concours, mais il y a aussi l'ouverture à la diversité.

Ainsi, une quinzaine de jeunes talentueux issus de milieux sociaux défavorisés, onze filles et quatre garçons, choisis parce qu'ils sont boursiers, entrent dans une classe préparatoire intégrée à l'ENA. Ils ne viennent pas d'un milieu social qui les poussait à tenter de passer le concours, mais ils ont le talent pour le faire. On ne va pas réduire le niveau du concours, on va augmenter leur propre niveau. Ils seront suivis, coachés, et j'espère du fond du coeur qu'ils réussiront.

Nous faisons la même chose pour les instituts régionaux d'administration, pour les écoles liées à mon ministère, que ce soit pour les douanes, les impôts ou le Trésor, mais nous le ferons pour l'ensemble de la fonction publique, qui doit être le reflet de la société française dans toute sa diversité. Il faut donner des chances aux gens. Il n'est pas normal que les concours soient passés par des enfants de fonctionnaires, de profs ou de cadres et qu'un grand nombre de jeunes n'y aient pas accès tout simplement parce qu'ils n'ont pas eu la chance de bénéficier d'un milieu suffisamment porteur.

Bref, nous modifions les concours, pour les rendre moins académiques, et nous donnons des chances supplémentaires grâce à des écoles préparatoires intégrées.

Le budget de l'ENA a un peu augmenté, c'est vrai, mais en raison du taux de cotisation du CAS pensions, et c'est vrai pour l'ensemble des administrations. La classe préparatoire intégrée est financée dans le cadre de ce budget, il n'y a pas eu d'augmentation budgétaire. Nous allons signer la convention d'objectifs et de performance. Elle est prête et je vais en donner immédiatement un exemplaire à Georges Tron qui, avec sa sagacité et sa qualité d'analyse, pourra nous faire part de ce qu'il en pense.

L'ENA évolue, mais c'est compliqué, même pour abandonner le système de choix en fonction du rang de sortie et dire qu'il doit y avoir une politique de recrutement dans la fonction publique. Ce n'est pas à un jeune de choisir son administration en fonction de son rang de sortie, c'est à l'administration si possible de choisir les jeunes. Il en est ainsi dans les entreprises depuis qu'elles existent, ce n'est donc pas totalement absurde comme système et cela ne remet pas en cause le sacro-saint principe d'égalité. Sinon, il y aurait des inégalités dans le monde entier. Les réticences sont très fortes, notamment dans un certain nombre de grands corps. Nous devons donc toujours prouver que c'est un plus, pour les écoles, bien sûr, mais, surtout, pour les jeunes et pour les administrations dans leur ensemble.

Ne dites pas que nous avons supprimé les aides ménagères à domicile. Nous avons amélioré le système et nous avons même un peu augmenté les crédits. Beaucoup de gens y avaient accès, quelle que soit leur rémunération. Nous nous sommes concentrés sur des dispositifs existants comme les tickets restaurant ou les CESU, nous avons donner le bénéfice de certains d'entre eux aux fonctionnaires, et nous avons tenu compte des revenus. C'est donc une réforme mais ce n'est pas du tout la fin de l'aide ménagère à domicile.

Sur les politiques d'affranchissement, je peux répondre plus précisément mais ce serait peut-être trop long en séance.

Le programme Copernic a pris du temps et représente au moins un milliard d'euros. Les choses ont été recadrées ; ce programme est maintenant bien parti et se termine, je crois.

Les crédits des régimes sociaux de retraite connaissent une progression de 10 % entre 2009 et 2010, en raison du relèvement des subventions de l'État en faveur des régimes spéciaux, en contrepartie de la disparition progressive du mécanisme de compensation entre ces différents régimes.

La création du service des retraites de l'État est un élément très important. J'ai mis en place il y a quelques jours un conseil de gestion des retraites de l'État. Ce n'est pas la réforme des retraites, qui viendra en 2010, mais nous allons profondément modifier dans les quelques années qui viennent la manière de gérer les retraites dans l'État. Aujourd'hui, ce n'est pas si facile pour un agent de connaître ses droits en cours de carrière. Nous allons donc regrouper l'ensemble des retraites, et un opérateur va s'en occuper. Un service des retraites de l'État est en cours de constitution au sein de la direction générale des finances publiques, il versera les retraites de tous les agents de la fonction publique et donnera des informations sur le suivi des carrières. Les ministères opérationnels, qui gèrent les carrières de leurs agents, transmettront les bonnes informations. C'est assez lourd, assez long, ce sont trois ou quatre millions de personnes qui sont concernées. Nous serons prêts vers la fin de l'année 2012 à faire fonctionner ce service des pensions de l'État, avec des centres régionaux. Il y en aura moins, ils seront plus structurés, et pourront répondre à l'ensemble des agents.

Des dizaines de sujets ont été abordés mais je voulais répondre sur ceux qui me semblaient les plus importants. Je vous remercie pour la qualité de vos interventions, parfois très critiques, mais c'est le jeu de l'opposition. J'en retiens l'idée, toute simple, que les choses bougent. Cela ne plaît pas à certains, d'autres trouvent que cela va dans le bon sens. En tout cas, cela va vite, et dans le dialogue social, contrairement à ce que j'ai pu entendre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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