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Intervention de Marie-Luce Penchard

Réunion du 28 octobre 2009 à 9h30
Commission des affaires économiques

Marie-Luce Penchard, secrétaire d'état à l'outre-mer :

Je suis heureuse d'être avec vous aujourd'hui pour présenter pour la première fois ce projet de budget de la mission « outre-mer » au titre du projet de loi de finances pour 2010. J'ai eu l'occasion de rencontrer un grand nombre d'entre vous au cours des dernières semaines, en particulier les différents rapporteurs : M. Jérôme Cahuzac pour la commission des Finances, M. Alfred Almont pour la commission des Affaires économiques, M. Didier Quentin pour la commission des Lois. Avec les membres de mon cabinet ainsi que les fonctionnaires de la délégation générale à l'outre-mer, j'ai essayé de vous apporter le maximum d'informations concernant ce budget. Je crois d'ailleurs que cette année les rapporteurs ont pu avoir, dans les délais, et hormis quelques rares exceptions, la totalité des réponses à leurs questionnaires. Des efforts ont également été faits pour que le document de politique transversale soit plus exhaustif et plus lisible.

L'année 2009 fut pour l'outre-mer d'une exceptionnelle densité. Évidemment, chacun se souvient de la crise sociale qui a frappé les départements d'outre-mer en février et mars derniers, en particulier la Guadeloupe et la Martinique. Face à cette crise, le Président de la République avait, dans la foulée, lancé les États Généraux de l'outre-mer qui se sont récemment achevés par une journée de restitution nationale le 1er octobre dernier. Le 6 novembre prochain, se tiendra le premier conseil interministériel pour l'outre-mer. Par ailleurs, la loi pour le développement économique des outre-mer, adoptée dans un climat politique consensuel, comporte de nombreuses dispositions conjoncturelles et structurelles, qui ont d'ailleurs un impact sur ce budget pour 2010.

Le budget de la mission « outre-mer » est en augmentation de 6,3 %, soit 118 millions d'euros, pour s'établir à 1,9 milliard d'euros en crédits de paiement. Je rappelle que, depuis 2008, le budget de la mission « outre-mer » a augmenté de 17 %. La mission « outre mer » comprend deux programmes, le programme 138 relatif à l'emploi et le programme 123 relatif aux conditions de vie.

L'augmentation de 118 millions d'euros en crédits de paiement bénéficie principalement au programme 138 consacré à l'emploi outre-mer. Ce dernier augmente ainsi de 111 millions d'euros. Cette augmentation significative vise, d'une part, à accompagner la réforme des dispositifs d'exonérations de cotisations sociales patronales, et, d'autre part, à commencer à mettre en oeuvre le doublement en 3 ans de la capacité de formation du service militaire adapté annoncé par le Président de la République en février 2009.

Concernant le dispositif des exonérations de charges, il représente presque les deux tiers des crédits de la mission « outre-mer ». Ce dispositif contribue, via la réduction du coût du travail, à soutenir l'emploi dans nos départements d'outre-mer. Ce dispositif a connu d'importantes évolutions à la fin 2008 lors du vote de la loi de finances pour 2009 et surtout dans le cadre de l'examen de la loi pour le développement économique des outre-mer. À cette occasion, le Gouvernement avait souhaité, afin de soutenir l'emploi en outre-mer dans un contexte de crise sociale et économique grave, assouplir les dispositions adoptées fin 2008. Désormais, nous avons un dispositif toujours très incitatif, mais recentré, par le biais d'un mécanisme de dégressivité des exonérations, sur les salaires pour lesquels l'impact du dispositif est le plus fort. La loi pour le développement économique des outre-mer est venue renforcer l'effort budgétaire de l'État vers les secteurs prioritaires et les entreprises de moins de 11 salariés. Ce projet de budget traduit donc cet effort en faveur de la compétitivité des entreprises ultra-marines et par conséquent de l'emploi. C'est un effort indispensable pour ceux qui connaissent les niveaux de chômage de ces territoires.

La dette de l'État envers les organismes de sécurité sociale, en particulier l'ACOSS, atteindra à la fin de l'année 2009 environ 600 millions d'euros, soit environ 6 mois d'une année budgétaire. Mais cette année était une année exceptionnelle : dans le contexte de février-mars, qui aurait pu prendre le risque de ne pas tout faire pour soutenir ces économies ? En 2010, cette dette ne s'aggravera pas et l'État commencera à diminuer son endettement à compter de 2011.

Concernant le service militaire adapté, le Président de la République a annoncé le doublement de la capacité de formation en 3 ans. Nous allons élargir les critères d'éligibilité du SMA afin d'accueillir, outre les jeunes sans diplôme, les jeunes diplômés titulaires d'un CAP ou d'un BEP mais qui restent éloignés de l'emploi. Nous allons adapter la durée de formation à la situation économique locale et au niveau des volontaires. Le Gouvernement entend maintenir le niveau d'excellence des formations dispensées par le SMA, unanimement reconnu. D'ailleurs, le taux d'insertion des volontaires passés par les formations du SMA, tel que retranscrit dans les documents budgétaires, indique le chiffre de près de 80 % en 2009 et l'objectif est bien entendu de le maintenir aussi haut avec le doublement du nombre de volontaires. C'est une augmentation du budget de près de 31 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 20 millions d'euros en crédits de paiement.

Dans ce programme 138, figurent les crédits de l'Agence nationale pour l'insertion et la promotion des travailleurs d'outre-mer, l'ANT, seul opérateur d'État rattaché au Secrétariat d'État à l'outre-mer : le budget de fonctionnement de l'Agence est d'environ 8 millions d'euros. La loi pour le développement économique des outre-mer a créé le passeport-mobilité formation professionnelle, dispositif central qui permet aux personnes souhaitant se former professionnellement de bénéficier d'une mesure de formation qualifiante pouvant aller jusqu'à 24 mois hors de leur département ou de leur collectivité d'origine, dès lors que la même formation n'est pas dispensée sur place. Ce nouveau dispositif remplace les anciens « projets initiative jeune » et la « formation individualisée en mobilité ». Pour ce nouveau dispositif, 23,8 millions d'euros en AE et CP sont prévus en 2010 pour plus de 4 500 mesures nouvelles.

Mais le Gouvernement a aussi l'intention d'élargir les missions de l'Agence pour, au-delà de ce métier historique, en faire un opérateur de la mobilité outre-mer. C'est pourquoi l'Agence a vocation à être le porteur budgétaire du fonds de continuité territoriale, créé par la loi pour le développement économique des outre-mer et qui figure sur le programme 123.

Le programme 123, intitulé « conditions de vie outre-mer », réunit les dispositifs qui permettent d'améliorer les conditions de vie des habitants des départements et collectivités d'outre-mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie. J'insisterai plus particulièrement sur 5 volumes budgétaires qui totalisent 90 % des autorisations d'engagement de ce programme.

S'agissant tout d'abord de la ligne budgétaire unique en faveur du logement, l'effort de l'État est maintenu à 255 millions d'euros en autorisations d'engagement et plus de 210 millions d'euros en crédits de paiement. Le logement est une de mes priorités d'action. J'ai eu l'occasion de m'exprimer sur la manière dont je souhaitais, en lien avec les acteurs locaux et les opérateurs, mener cette politique lors du dernier congrès de l'Union Sociale de l'Habitat à Toulouse. La ligne budgétaire unique, mais aussi la défiscalisation du logement social introduite par la loi pour le développement économique des outre-mer, apportent des réponses budgétaire et fiscale, même s'il faut accorder un effort budgétaire plus important en faveur de la réhabilitation de l'habitat insalubre, sur la base des recommandations formulées par M. Serge Letchimy. Il importe maintenant de travailler ensemble à la programmation budgétaire et physique des opérations à financer. Je ne veux pas programmer des opérations qui ne se débuteront pas dans l'année même. Je ne peux pas me satisfaire d'opérations qui, pour les deux tiers, sont programmées dans le dernier trimestre. Ce n'est pas le signe d'une saine programmation budgétaire. Évidemment, je n'ignore pas qu'il reste encore quelques freins à lever, et en particulier la disponibilité foncière et la prise en charge, notamment par les communes, de la surcharge foncière. Ces freins sont identifiés et nous travaillons en ce moment même à les lever.

Ensuite, concernant la politique contractuelle, le ministère de l'outre-mer apporte sa quote-part aux contrats de projets entre l'État et les régions d'outre-mer aux côtés des autres départements ministériels au travers de cette ligne de 167 millions d'euros en autorisations d'engagement. Cette ligne est pour les collectivités d'outre-mer et la Nouvelle-Calédonie une sorte de ligne budgétaire unique pour tous les contrats de développement et conventions liant l'État à ces collectivités. En effet, depuis le 1er janvier 2009, les crédits ont été transférés depuis les autres ministères vers le ministère chargé de l'outre-mer. C'est donc un outil essentiel du partenariat local entre l'État et les collectivités territoriales et auquel, je le sais, vous êtes très attachés.

Troisièmement, le soutien à l'économie polynésienne passe évidemment par la dotation globale de développement économique et le paiement de l'ex-fonds de reconversion de l'économie polynésienne. Les négociations avec le Gouvernement polynésien ont commencé depuis plusieurs mois, à la fois au niveau central et au niveau local, sur la réforme de cette dotation. Certains points d'accord ont déjà été actés comme la mise en place d'une dotation globale d'autonomie ou le transfert d'une partie de la fiscalité de la Polynésie française vers les communes. Il reste encore deux points difficiles à négocier : la partie de la dotation qui restera consacrée à l'investissement et la forme que cette partie prendra, c'est-à-dire soit un contrat, soit une dotation d'investissement, d'une part, et l'éventuelle participation de l'État au régime de solidarité de la Polynésie française, d'autre part.

En quatrième lieu, le fonds de continuité territoriale représente près de 50 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement. Ce fonds a été créé par la loi pour le développement économique des outre-mer pour concentrer des ressources jusqu'alors dispersées entre des opérateurs d'État et les collectivités territoriales. Il servira à financer des aides destinées aux étudiants – ce que l'on appelle le « passeport mobilité étudiants » – mais aussi des aides destinées à financer la continuité territoriale au sens large afin de permettre à nos compatriotes ultra-marins de se déplacer depuis leur territoire d'origine vers la métropole ou alors, nouvelle possibilité offerte par la loi pour le développement économique des outre-mer, au sein même de leur territoire lorsque les distances le justifient. L'ANT a vocation à devenir une agence de la mobilité au service de nos outre-mer et, en lien avec le ministère de l'outre-mer, à suivre l'utilisation de ce fonds. Ensuite, la volonté du Gouvernement est de mettre en place, au plan local, des groupements d'intérêt public afin de gérer ces crédits en partenariat d'abord avec les collectivités territoriales mais aussi avec d'autres partenaires comme les organismes consulaires, les universités, les partenaires sociaux. De nombreux contacts ont été établis ces derniers mois pour étudier les conditions de mise en place de ces groupements, qui devront avoir été finalisés en 2010. En outre, dernier élément important, je suis attachée à la mise en oeuvre d'une politique sociale au travers de ce fonds de continuité territoriale. Il est important que ce fonds bénéficie d'abord et avant tout à nos compatriotes d'outre-mer dont les ressources sont les plus faibles.

Enfin, le fonds exceptionnel d'investissement est aussi un instrument créé par la loi pour le développement économique des outre-mer. Son objectif est d'apporter une aide aux collectivités territoriales qui, dans les départements d'outre-mer et les collectivités d'outre-mer, réalisent des investissements portant sur des équipements publics collectifs. L'année 2009 fut, pour ce fonds, exceptionnelle puisque les crédits du Plan de Relance ont porté la totalité de nos engagements de 40 millions d'euros prévus dans la loi de finances initiale à 165 millions d'euros. L'année 2010 revient sur une tendance plus normale avec un total de 40 millions d'euros d'autorisations d'engagements. 88 opérations d'aménagement ont pu être réalisées grâce à ce fonds.

Aujourd'hui, je suis venue vous présenter le budget de la mission « outre-mer ». Cependant, je sais que vous vous intéressez, et c'est normal, à la totalité des crédits que l'État consacre aux outre-mer. Un effort particulier a été fait pour vous donner à lire un document de politique transversale plus synthétique, mieux présenté.

L'effort de l'État outre-mer en 2010 représentera 17,2 milliards d'euros en autorisations d'engagement, dont 3,6 milliards d'euros de dépenses fiscales. C'est une dépense en augmentation de plus de 4 %, avec un effort significatif fait sur la dépense fiscale qui augmente de plus de 200 millions d'euros.

Je sais par avance que certains souligneront que la mission « outre-mer » ne représente que 12 % de l'effort global. C'est l'évidence même. Cependant, le ministère de l'outre-mer n'a pas vocation à devenir le gestionnaire de tous les crédits budgétaires et fiscaux qui intéressent les territoires ultra-marins. Ensuite, avec près de 2 milliards d'euros, la mission « outre-mer » est la deuxième mission budgétaire de l'État en faveur de l'outre-mer avec 15,4 % des crédits budgétaires. Si l'on exclut les dépenses de personnel prévues au titre 2, elle représente même 29 % des dépenses budgétaires et est alors la première mission budgétaire hors titre 2 devant les dotations de l'État (28 %), la santé (14 %) ou l'éducation (10 %). Ce fait est d'autant plus significatif que la mission regroupe essentiellement des crédits d'intervention.

Nous sommes aujourd'hui à un tournant. Chacun doit prendre ses responsabilités. Je prends les miennes avec ma sensibilité, avec ma connaissance de l'outre-mer. Ces territoires recèlent de fortes potentialités. Ce budget est aussi le reflet du soutien du Gouvernement à ces territoires.

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