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Intervention de Jean-Michel Clément

Réunion du 23 septembre 2009 à 10h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Michel Clément :

Vous avez pris la mesure, monsieur le rapporteur, des difficultés que va engendrer une réforme que la directive « Services » ne justifie pas. On doit chercher le véritable fil conducteur de la réforme dans les incantations du rapport Attali, plus encore que dans le rapport Darrois, qui ne faisait que préconiser une organisation rationnelle de l'ensemble du système judiciaire.

La profession d'avoué est d'autant plus nécessaire qu'elle comble certains déficits de l'organisation judiciaire. Je pense notamment au rôle joué par les professionnels les plus actifs dans la dématérialisation des procédures. Il est regrettable qu'on ait préféré ne retenir que l'exemple des avoués qui ont sombré dans la routine pour supprimer toute la profession. Leur reconversion va s'avérer beaucoup plus difficile que certains ne le pensent.

Cette réforme aura de lourdes conséquences sur le plan financier, sur le plan social et pour le fonctionnement de l'institution judiciaire.

Sur le plan financier, l'indemnisation des avoués prévue par le texte risque fortement d'être censurée par le Conseil constitutionnel, au titre de l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et de l'obligation d'indemniser le droit de présentation. Le montant des indemnités devrait être finalement de 906 millions d'euros tous préjudices confondus, selon le calcul des avouées eux-mêmes. À cela s'ajoutera l'indemnisation des salariés.

Sur le plan social, la réforme entraînera le licenciement d'un personnel à 90 % féminin, dont la moyenne d'âge est de quarante-deux ans, et généralement peu diplômé. Il est essentiel d'aménager pour eux des passerelles professionnelles qui leur permettraient d'exploiter leur grande expérience professionnelle – du fait de leur collaboration avec les greffes, il n'est pas rare qu'ils maîtrisent toute la procédure. Quand l'État prend une décision qui entraîne l'exclusion du monde du travail de professionnels de cette qualité, le devoir d'exemplarité lui impose d'assurer leur reconversion.

Cette réforme provoquera enfin un accroissement des appels et un allongement des délais de procédure du fait de l'encombrement des greffes.

Tout le monde – salariés, avoués, justiciables – a à perdre dans cette réforme mal préparée. Ce texte nous conduit à nous interroger sur l'avenir de notre organisation judiciaire : sera-t-il à l'image de cette réforme, c'est-à-dire, sous prétexte de dématérialisation et de simplification de la procédure judiciaire, contraire au principe d'égalité des citoyens devant la justice, pénalisant pour le justiciable et pour les droits de la défense ?

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