Préparation de l'avenir. J'informe en préambule la commission que les vingt dernières réponses au questionnaire budgétaire, parmi les plus importantes, ne me sont parvenues que samedi 10 octobre vers 20 heures, soit hors des délais fixés par la LOLF et seulement 72 heures avant la présentation de ce soir. J'insiste pour que nos conditions de travail s'améliorent.
En 2010, année particulière pour notre défense, le budget de la mission Défense s'établira à 39,3 milliards en autorisations d'engagement et à 37,1 milliards en crédits de paiement. En pleine conformité avec la trajectoire définie par la loi de programmation militaire, qui prévoyait un pic de dotations en 2009 correspondant au pic des besoins en équipements et à l'impact du plan de relance, ce budget est en baisse par rapport à 2009, mais supérieur de près de 2 milliards d'euros, soit de 6 %, à celui de 2008.
La priorité demeure aux équipements, dont les crédits de paiement s'élèveront à 17 milliards d'euros, soit 900 millions de moins qu'en 2009 mais 1,7 milliard de plus qu'en 2008.
À ce jour, la mission a été relativement épargnée par les annulations de crédits. Le niveau des reports de charges, même s'il reste particulièrement élevé, devrait diminuer de plus de 100 millions en 2010.
Parmi les éléments positifs, il faut noter les efforts importants consentis en faveur du renseignement, ce qui témoigne du volontarisme du chef de l'État en ce domaine. Ainsi, les moyens de l'action Recherche et exploitation du renseignement intéressant la sécurité de la France augmenteront de 8,3 % en crédits de paiement, et le renseignement sera d'ailleurs le seul domaine de la mission Défense qui, loin de perdre des emplois, en gagnera.
La maîtrise des technologies clés est essentielle au développement d'une industrie de défense et de sécurité autonome et compétitive, capable de répondre durablement aux besoins des forces. En 2010, le ministère de la défense, premier acheteur et investisseur public, consacrera 3,6 milliards d'euros à la recherche-développement : 652 millions iront aux études amont, 813 millions subventionneront des projets de recherche et technologie et 1,6 milliard ira à des études de défense, dont une partie, duale, relève du programme 191. La modernisation de notre armée dépend de sa capacité d'innovation. Celle-ci alimentant souvent la recherche civile, la défense contribue à la croissance. La défense, c'est en effet la sécurité, un très gros marché sur lequel nos entreprises sont excellentes ; en soutenant la recherche-développement militaire, nous soutenons donc indirectement l'ensemble de notre économie.
Pour répondre à la demande que certains d'entre vous m'ont faite lors de l'examen du budget précédent, je publierai cette année, en annexe à mon rapport spécial, la liste des études prospectives et stratégiques réalisées en 2008 et 2009, classées par organisme.
Le renseignement est essentiel, car rien ne servirait d'avoir la meilleure armée du monde si l'état-major est incapable de savoir ce qui se passe de l'autre côté de la montagne. Nous avons constaté dans le passé que l'absence de renseignement pouvait être lourde de conséquences, notamment en opérations extérieures – les OPEX. Le déploiement de drones en Afghanistan et les bons renseignements qu'ils semblent fournir aux forces ne doivent pas occulter le retard pris par l'industrie française et européenne dans ce secteur. Notre pays doit se montrer volontariste et inciter les industriels concernés à investir dans ce domaine essentiel. Chacun des vecteurs technologiques du renseignement – satellites, drones et avions – est nécessaire ; j'insiste donc sur la complémentarité des programmes, qui doivent tous être menés rapidement à terme. C'est d'autant plus nécessaire que le renseignement n'est pas seulement une composante essentielle de la stratégie militaire : c'est également la meilleure arme contre le terrorisme.
Je rappelle enfin l'importance de l'intelligence économique. La guerre économique mondiale nous impose d'assurer la sécurité et la protection de nos entreprises. Ne soyons pas dupes : les contrats internationaux ne s'obtiennent jamais sans l'aide des services de l'intelligence économique. Autant, donc, être à la hauteur de nos concurrents tout en respectant les règles éthiques. Qui sait livrer l'information stratégique au bon moment et à la bonne personne obtient un avantage compétitif décisif. Or les moyens de la France en ce domaine sont peu développés par rapport à ceux de ses grands rivaux économiques. Ainsi, alors qu'aux États-Unis, plus de 100 000 personnes au sein de dix-sept agences travaillent pour le renseignement militaire et économique, il n'y en a qu'une dizaine de milliers en France. Il revient aussi à nos entreprises d'augmenter impérativement leurs services dans ce domaine pour affronter dans de bonnes conditions le marché économique mondial « post-guerre froide ».
J'en viens au programme Équipement des forces. Les autorisations d'engagement, en baisse sensible, s'établiront à 12,2 milliards en 2010, la plupart des matériels majeurs ayant bénéficié d'une commande globale en 2009, dans le cadre de la loi de finances ou dans celui du plan de relance.
Le système de forces Dissuasion recevra une enveloppe de 3 milliards qui permettra de poursuivre la modernisation des composantes de la dissuasion nucléaire. Le dernier SNLE de nouvelle génération, Le Terrible, qui pourra directement utiliser le missile M51, sera livré à la marine nationale, de même que le premier lot de missiles M51 destiné à être utilisé sur ce bâtiment. En 2010 sera également entreprise l'adaptation d'un SNLE-NG de type Triomphant au missile M51.
Le système de forces Engagement et combat sera doté de 3,6 milliards d'euros de crédits de paiement. Dans le domaine aérien, la montée en puissance des escadrons Rafale se poursuivra avec la livraison de onze appareils supplémentaires, et 274 armements air-sol modulaires seront fournis.
Dans le domaine naval, outre le SNLE déjà évoqué, nos forces recevront quatre missiles mer-mer 40 transformés et 75 torpilles MU90. Je rappelle que, dans le cadre du plan de relance de l'économie, un bâtiment de projection et de commandement de 21 000 tonnes a été commandé par anticipation en avril 2009.
Dans le domaine terrestre, nos forces recevront sept hélicoptères de combat Tigre, 34 canons automoteurs Caesar, 99 véhicules blindés de combat VBCI, 44 véhicules blindés légers VBL et 5 045 équipements du fantassin Félin.
En 2010 seront commandés 168 armements air-sol modulaires, 22 systèmes lance-roquettes LRU ainsi qu'un premier lot de postes de tir et de munitions du missile moyenne portée destiné au théâtre afghan. D'autre part, la première phase de rénovation à mi-vie des Atlantique-2 sera lancée.
Le système de forces Commandement et maîtrise de l'information bénéficiera d'une enveloppe de 774 millions.
La priorité accordée à la fonction stratégique Connaissance et anticipation se traduit par le renforcement des moyens d'observation aérienne avec la réception du premier Transall C-160 « Gabriel » d'écoute entièrement rénové, ainsi que de six nacelles de reconnaissance de nouvelle génération, de deux avions Awacs de surveillance rénovés et d'un satellite d'observation optique Hélios IIB. À ces équipements s'ajouteront 45 stations d'exploitation des données de géographie numérique, 33 systèmes d'information et de commandement pour la marine, 37 systèmes d'information régimentaires de l'armée de terre, deux systèmes d'observation spatiale et 88 stations de communications par satellite pour le système Syracuse III.
Par ailleurs, le ministère commandera un satellite de communication Athéna, six stations navales de communications par satellite Telcomarsat, trois satellites d'observation optique Musis, et encore 18 systèmes d'information et de communication de la marine.
Le système de forces Projection mobilité soutien recevra 1,1 milliard de crédits. Le financement du programme A400M, malheureusement en retard, se poursuivra ; deux avions à usage gouvernemental seront livrés ainsi que quatre hélicoptères NH90 en version navale, 340 petits véhicules protégés et deux systèmes de franchissement.
En 2010 seront par ailleurs commandés 200 porteurs polyvalents terrestres et 187 petits véhicules protégés. Quatre hélicoptères Cougar seront rénovés.
Enfin, le système de forces Protection sauvegarde bénéficiera d'une enveloppe de 687 millions. En 2010, les forces recevront 110 missiles air-air MICA, deux systèmes sol-air moyenne portée terrestres et 80 missiles antiaériens Aster 30. Seront en outre commandés 200 missiles air-air d'interception Mide, un lot de brouilleurs contre les engins explosifs improvisés destinés à être utilisés en Afghanistan et 135 missiles Mistral rénovés. Le développement de la rénovation à mi-vie du Mirage 2000D sera lancé.
La liste des équipements qui devraient être commandés ou livrés en 2010 est donc fort longue. La vigilance s'impose toutefois à propos de la date de livraison de l'Airbus A400M, encore inconnue. Si son premier vol pouvait avoir lieu en décembre de cette année, comme cela est envisagé, ce serait un bon signe pour un programme qui a déjà subi de bien trop nombreux retards.
Ce budget va dans le bon sens. Dans la droite ligne de celui de l'année dernière, il contribuera à améliorer l'équipement de nos forces et à renforcer la compétitivité de nos industries de défense et de sécurité. Le marché mondial annuel de la sécurité représente 250 milliards d'euros et il augmente de 10 % par an. Si nous aidons les entreprises françaises à accroître leurs parts de marché, l'emploi et la richesse nationale y gagneront.
En conclusion, le budget de la mission Défense permettra à notre armée de conserver son rang, ses savoir-faire largement reconnus et ses capacités d'intervention. Je vous propose donc de l'adopter.