Cet amendement est relatif aux opérations de rachat par effet de levier appelées LBO – j'espère que Jean-Pierre Brard voudra bien me pardonner pour cet anglicisme
Notre pays, madame la ministre, est en retard dans l'encadrement de ces procédures. Récemment, dans le cadre d'une proposition de loi présentée par notre collègue Chantal Brunel, nous avions proposé que davantage de transparence entoure le franchissement de seuils dans la possession capitalistique d'une entreprise. Nous savons que lorsqu'une société procède au rachat d'une entreprise de la sorte, elle n'a pas de projet industriel mais poursuit seulement un projet financier puisqu'il s'agit, passez-moi l'expression, de désosser l'entreprise visée afin de rémunérer les investisseurs au plus fort taux et si possible le plus vite possible.
Nous ne pensons pas qu'il s'agisse d'une bonne chose. Les opérations de rachat par LBO – pas toutes mais un nombre trop élevé – ont puissamment contribué à la destruction du tissu industriel de notre pays.
Notre législation est en retard par rapport à celle d'autres pays comme la Grande-Bretagne ou l'Allemagne. C'est la raison pour laquelle, nous avions proposé que tout franchissement d'1 % dans la possession capitalistique soit signalé. Au nom du Gouvernement, vous vous y êtes refusée. J'aimerais que vous m'indiquiez si telle est toujours votre position. Si oui, ce serait un cas particulier en Europe car même la Grande-Bretagne a accepté de telles dispositions alors que ce n'est pas un pays connu pour redouter de tels mécanismes financiers – beaucoup y sont même nés et beaucoup de mal en a résulté.
Le présent amendement est avant tout un amendement d'appel. Nous aimerions que vous nous donniez l'avis du Gouvernement sur ces opérations de rachat par LBO, que nous considérons comme très périlleuses. La conjoncture s'étant fortement dégradée, de très nombreuses sociétés ont été rachetées de cette façon et connaissent désormais des situations de surendettement très difficiles. Or l'on sait qu'en de tels cas, la variable d'ajustement – car c'est bien en ces termes que raisonnent les propriétaires de ces entreprises – est l'emploi.
Nous pensons qu'il est temps de réagir vigoureusement à ces évolutions. Selon la compagnie d'assurance-crédit COFACE, sur 1 600 sociétés ayant fait l'objet de procédures de LBO, 900 se trouvent en zones de surveillance, ce qui prouve la gravité de la situation. Les banques ont octroyé des crédits allant jusqu'à 70 % ou 80 % de la valeur de la société, car dans ces opérations, si les premiers bénéficiaires sont ceux qui en sont à l'origine, les banques ne s'oublient pas au passage, omettant en l'espèce la mission d'intérêt général qu'elles ont au service de l'économie réelle et de l'emploi.
Cet amendement propose de désinciter les opérations de LBO qui passeraient par des prêts représentant plus de 66 % de la valeur d'une société. C'est un verrou qui désormais s'impose pour éviter que des entreprises en situation délicate ne tombent dans des mains inamicales, prêtes à les dépecer au lieu de les redresser par un projet industriel. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)