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Intervention de Jean-Jacques Gaultier

Réunion du 6 octobre 2009 à 14h15
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Jacques Gaultier, rapporteur pour avis :

Notre Assemblée est donc saisie, en première lecture, de la proposition de loi de M. le sénateur Xavier Pintat, que la Haute assemblée a adoptée le 20 juillet dernier. Plus précisément, notre commission est saisie pour avis, dans le titre IER, des articles 1er A, 1er B, 1er CA, 1er C et 1er D, concernant les modalités de passage de la télévision vers le tout numérique, ainsi que de l'article 1er GA, relatif aux consultations publiques organisées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) dans le cadre des appels à candidature qu'il lance avant d'attribuer des fréquences en radio ou télévision.

La loi du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur a fixé le cadre de l'extinction de la télévision analogique terrestre et du passage au tout numérique. Nous nous situons là dans un processus européen et international puisque tous les pays de l'UE se sont engagés à cesser leur diffusion analogique en 2012 au plus tard – ce sera, pour la France, le 30 novembre 2011 –, et que, par exemple, la Suisse, le Luxembourg, l'Allemagne et les États-Unis ont déjà accompli cette mutation.

Chacun a bien compris les enjeux de la révolution numérique.

La télévision numérique offre de nombreux avantages : elle permet plus de chaînes, de services, de programmes ainsi qu'une meilleure qualité de diffusion. L'arrêt de la diffusion analogique et le passage à la diffusion numérique hertzienne permettra également d'utiliser les fréquences libérées – c'est ce que l'on appelle « le dividende numérique » –, sachant qu'à contenu et couverture équivalents, la première consomme environ six fois plus de fréquences que la seconde. Ces fréquences permettront d'enrichir l'offre en télévision numérique terrestre (TNT), de lancer la radio numérique terrestre, d'utiliser de nouveaux services tels les réseaux mobiles de quatrième génération et de favoriser l'accès à l'Internet mobile à très haut débit, notamment sur les territoires les moins densément peuplés.

Afin de préparer ce basculement, deux opérations pilotes ont eu lieu à Coulommiers et à Kaysersberg, et une expérimentation plus importante est prévue pour le 18 novembre prochain : elle concernera une population d'environ 200 000 habitants dans la région de Cherbourg et du Nord-Cotentin.

La loi du 5 mars 2007 a fixé l'objectif d'étendre la couverture de la télévision numérique à 100 % de la population, le taux étant fixé à 95 % pour la seule couverture par voie hertzienne terrestre. Je précise, à ce propos, qu'il ne faut pas confondre la première – qui doit en effet être totale – avec la seconde qui, elle, ne peut l'être pour des raisons économiques, géographiques et technologiques. À la différence de l'Internet haut ou très haut débit, on ne peut pas considérer qu'il existera des zones blanches puisque les moyens permettant de recevoir la télévision numérique sont divers. La question qui se pose aujourd'hui est donc bien plutôt de savoir où placer le curseur entre la diffusion hertzienne et les modes de réception alternatifs, qu'ils soient filaires ou satellitaires.

Afin de garantir une plus grande homogénéité territoriale de la couverture par la télévision numérique hertzienne, le CSA a, de sa propre initiative, assorti le taux minimal de couverture nationale – de 95 % – de « correctifs » de couverture départementale, fixés à 91 % de la population pour les chaînes historiques nationales gratuites, et à 85 % pour les autres chaînes nationales nouvellement entrantes ou payantes. Deux listes ont ainsi été arrêtées : l'une, de 1 626 sites émetteurs, pour les chaînes historiques ; l'autre, de 1 423, pour les nouvelles chaînes de la TNT et les chaînes payantes. Cependant, ces décisions ont déjà fait l'objet de recours devant le Conseil d'État – de la part de Canal Plus –, et d'autres chaînes ont fait part de leurs réserves, car le « correctif départemental » les oblige à mettre en place plus d'émetteurs qu'il n'en faut pour respecter l'objectif de couverture de 95 % de la population nationale. Il est donc nécessaire de valider et de sécuriser les décisions prises par le CSA ; c'est l'objet de la proposition de loi du Sénat.

Tenant compte des contraintes économiques pesant sur les chaînes comme de la nécessité d'une desserte territoriale homogène, le schéma de couverture élaboré par les prescriptions croisées de la loi et du CSA me semble tout à fait équilibré.

La présente proposition de loi précise également les aides visant à accompagner les téléspectateurs dans le passage au tout numérique, sachant qu'aujourd'hui, environ 17 % des foyers dépendent exclusivement d'une réception hertzienne analogique. C'est là la mission du Groupement d'intérêt public (GIP) France Télé Numérique, qui est financé pour moitié par l'État et pour moitié par les chaînes. L'article 102 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication a par ailleurs institué, au bénéfice des foyers exonérés de « redevance audiovisuelle », un fonds d'aide qui doit être abondé à hauteur de 90 millions ; ses modalités d'intervention feront l'objet d'un décret en Conseil d'État, en cours d'élaboration ; des aides de 25, 120 et 250 euros permettront ainsi de s'équiper d'un adaptateur TNT, de remplacer une antenne râteau ou d'acquérir une parabole.

De surcroît, comme le Premier ministre l'a annoncé le 22 juillet, un fonds d'aide complémentaire permettra d'aider, sous condition de ressources, les personnes résidant dans les « zones d'ombre » de la TNT : 50 % des 400 000 foyers dans ce cas devraient en bénéficier.

Enfin, les personnes âgées de plus de 70 ans ou handicapées pourront bénéficier d'une assistance technique renforcée mise en oeuvre par le GIP.

L'article 1er A vise donc à sécuriser les décisions prises par le CSA en ce qui concerne le déploiement de la TNT pour les chaînes historiques nationales en clair et, notamment, le « correctif départemental » de 91 %. L'article 1er B est son pendant pour les chaînes payantes et les chaînes nouvellement entrantes, avec un « correctif départemental » de 85 %.

L'article 1er CA concerne quant à lui l'information des maires des communes couvertes en télévision analogique qui ne seront pas couvertes en numérique hertzien – je rappelle, à ce propos, que la loi de 2007 relative à la télévision du futur a confié au CSA le soin de fixer neuf mois à l'avance pour chaque zone géographique, émetteur par émetteur, la date d'arrêt de la diffusion analogique, mais sans prévoir cette information des maires.

L'article 1er C introduit une dérogation à la règle du secret fiscal pour permettre au GIP d'identifier les personnes bénéficiant d'un dégrèvement de redevance audiovisuelle et qui seront donc éligibles au « fonds 102 ».

L'article 1er D prévoit la remise d'un rapport sur l'aide à apporter aux personnes situées en zones d'ombre, en complément de ce « fonds 102 » réservé aux seuls foyers exonérés de redevance. Le rapporteur du Sénat avait souhaité à cet effet la constitution d'un « fonds 102 bis », mais l'initiative en revenait au Gouvernement et le Premier ministre a, comme je l'ai dit, satisfait ce voeu en précisant le 22 juillet les contours de ce deuxième fonds, dont le bénéfice sera également accordé sous condition de ressources.

Enfin, l'article 1er GA procède à une simplification administrative en supprimant, sous certaines conditions, l'obligation faite au CSA de procéder à de nouvelles consultations publiques avant l'attribution d'autorisations d'usage des fréquences radioélectriques : la loi du 30 septembre 1986 prescrit en effet au Conseil de procéder à une telle consultation dès lors que cette attribution est « susceptible de modifier de façon importante le marché en cause » ; or, outre que l'insécurité juridique d'une telle rédaction est patente, la durée de validité d'une consultation est incertaine sur un plan jurisprudentiel ; par ailleurs, ces multiples consultations retardent, souvent inutilement, le lancement de nouvelles radios ou télévisions locales numériques, l'absence de consultation pouvant entraîner l'annulation de l'appel à candidatures.

Votre rapporteur, bien entendu, approuve l'ensemble de ces articles sous réserve de l'adoption de certains amendements.

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