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Intervention de Hubert Falco

Réunion du 29 septembre 2009 à 16h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Hubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants :

Les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », placée sous ma responsabilité, sont conformes aux plafonds de la programmation budgétaire triennale 2009-2011, votée en février 2009.

La mission s'articule autour de deux programmes principaux, le programme 167 « Lien entre la Nation et son armée » et le programme 169 « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant ». Le programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale » relève quant à lui directement du Premier ministre.

Le projet de loi de finances pour 2010 prévoit une dotation de 3,33 milliards d'euros en crédits de paiement pour ces deux programmes : 3,18 milliards d'euros pour le programme 169 et 153 millions d'euros pour le programme 167.

La revalorisation de la retraite du combattant, que le Président de la République s'est engagé à porter à 48 points d'ici à 2012, est notre première priorité budgétaire. Elle va se traduire par une progression de deux points en 2010, faisant passer cette retraite de 41 à 43 points. Pour la première fois, cette mesure est inscrite dans le projet de loi de finances initiale, contrairement aux années précédentes. Cet engagement devance les amendements que vous n'auriez pas manqué de déposer et manifeste ainsi le plus clairement possible tout l'intérêt que le Gouvernement porte à cette mesure légitime, dans la droite ligne des engagements du Président de la République.

Décidée dans un contexte budgétaire contraint, elle sera mise en oeuvre à compter du 1er juillet 2010 ; j'avais répondu par erreur à votre rapporteur Patrick Beaudouin qu'il s'agirait du 1er janvier. Son coût sera de 9,5 millions d'euros pour 2010 et l'extension en année pleine de la précédente revalorisation de 2009 bénéficiera d'un financement de 28 millions d'euros.

Nous travaillons dès à présent aux prochaines étapes, en vue d'atteindre l'objectif de 48 points avec une hausse de deux points en 2011 et de trois points en 2012. Le coût cumulé de ces deux revalorisations est estimé à 50 millions d'euros.

Le maintien des droits découlant des pensions militaires d'invalidité constitue notre seconde priorité. Nous devons en effet témoigner constamment à nos invalides du respect et de la solidarité de la Nation, en veillant à ce que leur prise en charge soit la plus satisfaisante possible.

En visitant l'institution nationale des invalides (INI) la semaine dernière, j'ai pu constater à quel point cet établissement est un pôle de modernité et d'excellence au service de ceux qui ont sacrifié à la patrie leur intégrité physique. Le projet d'établissement de l'INI, récemment adopté par son conseil d'administration, tend à poursuivre la modernisation de l'institution dans le respect de sa vocation statutaire et de sa contribution au service public hospitalier. Avec l'aide de ma collègue ministre de la santé, j'entends faire en sorte qu'un véritable contrat d'objectifs et de moyens entre l'État et l'INI soit élaboré d'ici à la fin de l'année ; c'est une mesure indispensable pour inscrire le projet d'établissement dans les faits.

La consolidation des crédits dédiés aux soins médicaux gratuits et à l'appareillage permettra de maintenir en 2010 le niveau de prise en charge de prestations de qualité et de garantir de meilleurs remboursements, notamment pour les appareillages les plus importants. La dotation à cet effet s'élèvera à 80 millions d'euros.

Nous attachons également un grand intérêt aux actions de solidarité en faveur du monde combattant et je sais cet intérêt partagé par l'ensemble des parlementaires. C'est ainsi que la dotation prévue en 2010 pour financer les majorations des rentes mutualistes augmente de 3,3 %, c'est-à-dire 7,91 millions d'euros, pour atteindre 247 millions d'euros. Ce montant témoigne de l'importance de l'effort financier consenti.

Un crédit de cinq millions d'euros est aussi inscrit dans le budget pour assurer le financement de l'allocation différentielle versée aux conjoints survivants de ressortissants de l'office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC). En 2009, ce dispositif a permis d'assurer à ses bénéficiaires un revenu mensuel de 750 euros. Nous espérons toutefois aller au-delà de ce seuil.

Le succès de l'allocation différentielle démontre son bien-fondé. Je souhaite qu'elle soit sanctuarisée au sein du budget de l'ONAC consacré à l'action sociale. Tel n'est pas le cas aujourd'hui.

L'amélioration de la qualité du service rendu aux anciens combattants et aux victimes de guerre est une préoccupation centrale dans le cadre de la réforme du ministère de la défense. À cet effet, je poursuivrai avec volonté et sérénité la réforme de l'administration des anciens combattants, en concertation avec les associations ainsi qu'avec les personnels de la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale (DSPRS), de l'ONAC et de l'INI.

L'année 2010 va correspondre à la première phase de mise en oeuvre concrète du transfert des missions de la DSPRS à de nouveaux opérateurs, au premier rang desquels l'ONAC et ses services départementaux, auxquels, je le sais, vous êtes tous attachés, et qui n'auront jamais autant mérité leur surnom de « maisons du combattant ».

Je serai particulièrement attentif à la conduite de cette réforme, trois objectifs étant fixés pour 2010.

Il importe d'abord de tenir le calendrier des transferts de missions qui commenceront dès le 1er janvier et des fermetures des services déconcentrés de la DSPRS qui débuteront en mars.

Ensuite, nous devons faire en sorte que les transferts s'opèrent dans les meilleures conditions humaines, financières et techniques possibles.

Enfin, il nous faut poursuivre le reclassement du personnel de la DSPRS, étant précisé que la moitié des effectifs de cette direction ont d'ores et déjà bénéficié d'une mesure individuelle conforme à leurs souhaits.

L'ONAC et l'INI connaîtront en 2010 des transferts de crédits correspondant aux nouvelles missions qui vont leur être confiées. À cette fin, la dotation de l'ONAC augmentera de près de 13 millions d'euros, soit 32 %, et celle de l'INI de 3,4 millions d'euros, soit 31 %.

Dans le domaine de la mémoire combattante, une longue période de commémorations nationales s'ouvre pour la France puisque, de 2009 à 2018, nous célébrerons le 70e anniversaire de la Seconde Guerre mondiale, le 50e anniversaire des indépendances africaines et le 100e anniversaire de la Grande Guerre. Nos partenaires européens et africains seront étroitement associés à ces manifestations tout au long de la période.

Les commémorations de la Seconde Guerre mondiale ont d'ailleurs déjà commencé. Je me suis par exemple rendu avec le Premier ministre en Pologne et j'ai récemment participé, avec mon homologue allemand et des parlementaires, à une cérémonie à Notre-Dame de Lorette, dans le Pas-de-Calais.

Les commémorations de l'année 2010 s'articuleront principalement autour de la figure du général de Gaulle et de l'appel du 18 juin.

Ce cycle est l'occasion de réinventer la façon de commémorer ces grands événements pour mieux transmettre les valeurs républicaines. Il ne s'agit pas de cesser de commémorer selon les règles traditionnelles les grandes dates qui ont jalonné l'histoire de notre République, mais bien de les inscrire dans une nouvelle dynamique. Sur le terrain, on ressent très nettement que nous sommes à une étape charnière. Les acteurs vivants de la Première Guerre mondiale, qui nous en apportaient un témoignage direct, ne sont plus là. Ceux de la Seconde Guerre mondiale disparaissent petit à petit. Nous entrons dans une période où la mémoire et l'histoire vont se conjuguer.

Il est temps d'innover dans nos manières de commémorer avec une nouvelle politique de la mémoire combattante qui doit s'appuyer sur tous les acteurs. Pour ce faire, il faut moderniser les fondations, ceux qui les portent étant les premiers à nous le demander. Selon eux, il faut créer des ponts entre fondations et les faire travailler ensemble de façon thématique. Les associations d'anciens combattants restent également un maillon essentiel. Nous devons aussi nous appuyer sur des outils pédagogiques nouveaux au service de la communauté éducative, des kits par exemple, pour contribuer à la transmission des valeurs républicaines. J'ai fait des propositions en ce sens à mon collègue ministre de l'éducation nationale.

Chaque fois que la commémoration d'un grand événement a été réalisée de façon innovante, elle a intéressé le grand public. La commémoration exceptionnelle de Sainte-Maxime avec la grande parade navale a été suivie par des millions de téléspectateurs sans pour autant que nous renoncions aux commémorations traditionnelles du 15 août. La commémoration du débarquement de Normandie, en présence du Président des États-Unis et du Président de la République, a été un grand succès. La série historique Apocalypse programmée par France 2 sur la Seconde Guerre mondiale a réuni huit millions de téléspectateurs. On le voit, en adaptant la mémoire et l'histoire à la vie et à la société actuelle, on intéresse le grand public et notre jeunesse.

En revanche, les commémorations devant nos monuments réunissent de moins en moins de monde. Pour commémorer la libération de Toulon, dont je suis le maire, j'ai organisé la projection d'un film sur les bombardements de la ville, construit à partir de documents d'époque. Cette initiative a remporté un franc succès, le public ayant été beaucoup plus nombreux que celui qui s'est réuni devant le monument.

Nous allons également travailler à instaurer un partenariat avec de grands médias généralistes et spécialisés de la télévision, de la radio et de l'écrit ; ils accompagneront les temps forts de mémoire. Nous allons aussi oeuvrer à la promotion des initiatives des collectivités territoriales. Elles sont en effet porteuses de la mémoire spécifique de chaque territoire. Un appel à projets va être lancé en direction de l'ensemble des collectivités ; avec les préfets, nous allons mobiliser les correspondants de défense des communes. Il s'agit de susciter, d'appuyer et de valoriser par un label spécifique, garant de qualité, de multiples initiatives, et de développer des partenariats autour du tourisme de mémoire.

L'ambition que nous manifestons pour les commémorations de 2010 suppose bien évidemment un effort budgétaire non négligeable qui devra se traduire par des mesures en cours de gestion.

J'en viens à la réserve qui constitue également un enjeu essentiel du lien entre la Nation et son armée.

La montée en puissance de la réserve opérationnelle est indispensable compte tenu de la réduction du format des armées. Le contrat 2015 est posé : 40 000 personnels, hors gendarmerie, et 25 jours d'activité.

La majorité des réservistes opérationnels est dévolue à la fonction protection. Les compagnies de réservistes opérationnels des régiments de l'armée de terre en constituent la part la plus importante, des compléments individuels servant dans les états-majors de tous types, aussi bien au niveau des armées qu'aux niveaux interarmées. Certains participent déjà aux opérations extérieures.

Les réservistes sont nécessaires à la réalisation du contrat opérationnel des armées. Nous avons donc le souci de les recruter, de les former et de les fidéliser. Le 6 octobre prochain, je signerai avec deux entreprises, Thales et Dassault Aviation, une convention relative aux modalités d'intervention des réservistes opérationnels admis à servir auprès d'elles lorsqu'elles interviennent en soutien de nos forces projetées. Cet exemple montre combien la ressource de nos réservistes est riche d'opportunités pour toujours mieux répondre aux besoins avec souplesse. La démarche permet aussi à nos entreprises d'être plus compétitives et à ces personnels de bénéficier de la protection du statut militaire.

La dotation financière consacrée à la réserve sera portée en 2010 à 88,5 millions d'euros, soit une progression de 2,16 millions d'euros par rapport à 2009. Cette dotation permettra de porter les effectifs à 36 100 volontaires. En 2010, la durée moyenne d'activité devrait atteindre 22 jours, contre 21 en 2009.

Les réservistes citoyens sont, vous l'avez vous-mêmes vérifié, des ambassadeurs de nos armées dans la société, et donc un élément majeur du lien armée–Nation. Le Livre blanc sur la sécurité et la défense ainsi que la loi de programmation militaire confirment d'ailleurs leur rôle dans la réserve militaire. Je crois venu le moment de clarifier les modalités de la coopération entre ces volontaires qui apportent des compétences et le ministère de la défense. À cet effet, une directive ministérielle sera élaborée d'ici le printemps prochain.

La journée d'appel de préparation à la défense (JAPD) constitue chaque année pour 780 000 jeunes un temps fort du parcours citoyen. Il apparaît indispensable de la rénover car elle manque de lisibilité pour le grand public et les jeunes qui y participent. Pour ce faire, le ministre de la défense, Hervé Morin, vient de me confier le mandat de piloter un groupe de travail interministériel.

Pour réussir, cette réforme doit associer tous les acteurs de terrain à même de faire des propositions efficaces pour redonner du sens à cette journée.

Conformément aux conclusions du Livre blanc, la JAPD sera centrée sur sa mission fondamentale de sensibilisation des jeunes aux nouveaux enjeux de défense et de sécurité et sur l'illustration de l'attractivité du métier des armes. Après onze années d'existence, la refonte de son contenu et de sa forme constituera un événement majeur du renforcement du lien armée–Nation, la généralisation de la JAPD rénovée étant prévue à la fin de l'année 2010.

Je voudrais enfin évoquer la situation de nos soldats engagés dans des opérations extérieures, hélas de plus en plus violentes.

L'actualité récente de notre engagement en Afghanistan, les pertes d'hommes que nous avons eu à déplorer, les blessés souvent durement touchés qui sont rapatriés de ce théâtre d'opérations, rappellent de façon douloureuse, brutale, mais malheureusement incontournable, l'esprit de sacrifice de nos militaires, exemplaires soldats de la paix, dont l'engagement force le respect. L'adaptation des critères d'octroi de la carte du combattant en faveur de nos soldats engagés en opérations extérieures est donc pour moi un dossier prioritaire que je souhaite faire déboucher à bref délai. Vous l'avez compris, bien plus qu'une priorité politique, il s'agit d'une marque indispensable de la reconnaissance de la Nation envers nos militaires engagés en opérations extérieures.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, depuis ma nomination comme secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants, j'essaie de faire de cette fonction le « ministère du lien » : lien entre les Français et leur mémoire nationale, lien de solidarité du pays envers toutes les générations d'anciens combattants, lien entre l'armée et la Nation. Le projet de budget que je viens de vous présenter s'efforce de traduire de la façon la plus volontariste possible, compte tenu des contraintes des finances publiques, les principales mesures qui illustrent cette politique fondée sur le lien.

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