En prévoyant que « le Conseil Constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation », le constituant a voulu éviter certains risques : le risque d'engorgement par l'afflux de questions déjà tranchées, fantaisistes ou soulevées à des fins dilatoires ; le risque, plus profond, de déstabilisation de notre organisation juridictionnelle, lequel est peut-être moins perceptible par le non-spécialiste. Le texte que j'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui a pour but de permettre la mise en oeuvre concrète au bénéfice de nos concitoyens de l'exception d'inconstitutionnalité, mais d'éviter ces deux risques qui pourraient remettre en cause l'avancée démocratique ainsi réalisée.
La question de constitutionnalité s'inscrit en cohérence avec les principes de notre droit. Elle réaffirme la hiérarchie des normes juridiques, dans le respect de notre architecture constitutionnelle.
La primauté de la Constitution sur les règles de droit interne se trouve réaffirmée. Aujourd'hui, il est impossible au justiciable de soulever le moyen tiré de l'inconstitutionnalité d'une loi. C'est une anomalie. Désormais, le moyen pourra être soulevé au cours de toute instance devant toute juridiction, qu'elle relève du Conseil d'État ou de la Cour de cassation, et, pour la première fois, il pourra être soulevé en cour d'appel.
En matière pénale, il pourra intervenir au cours de l'instruction et sera alors porté devant la chambre de l'instruction.
En assises, la question pourra être soulevée en amont, dans la phase d'instruction du procès criminel.
La question de constitutionnalité ne remet pas en cause notre organisation juridictionnelle. Le principe de spécialité des juridictions est respecté. Chacun reste dans sa sphère de compétence.
Les juridictions judiciaires et administratives vérifient la compatibilité entre les lois nationales et les normes internationales – comme elles le font aujourd'hui –, le Conseil constitutionnel vérifie la conformité de la loi à la Constitution.