C'est une population surexposée au VIH et aux hépatites. Quelque 50 % des entrants nécessitent des soins bucco-dentaires, dont 4 % dans l'extrême urgence. Un tiers des détenus sont des usagers de substances illicites ; 78 % présentent une addiction au tabac ; plus d'un tiers souffrent d'une consommation excessive d'alcool.
Le recours aux soins de santé mentale est dix fois supérieur à celui observé dans la population générale – rappelons que l'incarcération génère ou augmente les risques de fragilité psychique ou psychologique. Plus de 40 % des détenus présentent un état dépressif majeur et un tiers d'entre eux souffrent d'anxiété généralisée. Un quart sont atteints de troubles psychotiques et 7 % souffrent de schizophrénie, soit huit fois plus que dans la population générale.
Oui, la prison est peut-être devenue un hôpital ou un hospice recevant celles et ceux qui errent dans la rue en situation de marginalisation, qui ne trouvent plus de place dans notre société et commettent des infractions diverses. Malheureusement, la prison n'a pas les moyens des hôpitaux. Cela explique peut-être les 147 mouvements collectifs de contestation constatés dans nos établissements pénitentiaires en 2008 – dont 26 ont nécessité l'intervention de forces spéciales –, les 595 agressions graves commises par des détenus sur des personnels, les 465 actes de violences entre détenus.
Nous voudrions que, grâce au projet de loi pénitentiaire que vous nous soumettez, madame la garde des sceaux, les 66 000 personnes placées sous main de justice dans nos établissements pénitentiaires bénéficient d'un service public qui ne soit pas seulement destiné à les écarter de la vie civile, mais qui puisse garantir leurs droits, assurer leur sécurité, favoriser leur réinsertion tout en leur infligeant cette peine privative de liberté qu'ils doivent exécuter.
J'observe d'ailleurs que les principes généraux de ce texte – contrairement à ce qui a été soutenu dans les deux motions de procédure – recueillent l'assentiment d'une très large majorité sur tous les bancs de notre assemblée comme ce fut le cas au Sénat. L'esprit d'une loi étant souvent plus important que le texte lui-même ou certains points précis, je voudrais rappeler cette phrase de Robert Badinter qui, à mes yeux, est très significative. Il disait : « Je suis convaincu qu'il s'agira là d'une grande loi. » À l'UMP, nous partageons cette vision des choses.
Il s'agit tout d'abord de mettre en oeuvre les dispositions de l'article 34 de la Constitution : les principes qui fondent nos libertés publiques doivent être garantis en cas d'emprisonnement ; les mesures applicables doivent relever de dispositifs législatifs et non pas de l'article 37 de notre Constitution.
Deuxièmement, notre droit doit mieux intégrer les principes généraux des règles pénitentiaires européennes. Depuis quinze ou vingt ans, ces principes généraux ont déjà été pris en compte dans les règlements qui régissent nos établissements pénitentiaires, mais cette préoccupation est au coeur du texte que vous nous présentez. Je me permets de le dire : lors des congrès de jeunes avocats auxquels j'ai participé, nous n'étions pas très fiers, à l'époque, du retard pris par la France sur cette question essentielle.
Troisièmement, le texte fixe les cinq missions confiées au service pénitentiaire : l'exécution des peines, mais aussi la réinsertion, la prévention de la récidive, la sécurité publique et l'aménagement des peines.
Quatrièmement, le texte pose le principe selon lequel une personne détenue est bien privée de sa liberté de mouvement, mais uniquement de cette liberté. Ses autres droits, compatibles avec le régime de détention, sont maintenus. À ce titre, l'exercice des cultes, le régime des visites au parloir, le contrôle de la correspondance, les fouilles des locaux, des personnes et des vêtements seront désormais régis par la loi.
Cinquièmement, les régimes disciplinaires et d'isolement seront aussi régis par la loi : graduation des fautes, renforcement du principe de la procédure contradictoire et de l'exercice des voies de recours dans la mise en oeuvre des sanctions.
Sixièmement, la proposition de loi pose comme principe que l'emprisonnement est un ultime recours en matière correctionnelle et, tirant les conséquences de ce principe, assouplit les procédures d'aménagement de peines. Comme cela a été rappelé tout à l'heure, notre majorité s'interroge sur le fait de porter de un à deux ans l'aménagement ab initio. C'est pourquoi le groupe UMP soutiendra les amendements du rapporteur visant à limiter cet aménagement ab initio à celles et ceux qui ne sont pas en état de récidive.
Septièmement, ce texte réaffirme le principe de l'encellulement individuel auquel l'UMP est très attachée. Mais il n'est pas de bon principe qui ne soit suivi d'effet. Dans ce domaine, il faut tenir compte des contraintes juridiques, matérielles et – évidemment – budgétaires. En cela, nous soutiendront la proposition qui nous est faite de rappeler le principe de l'encellulement individuel pour l'avenir.