Je suis désolé de devoir contredire Etienne Blanc, que j'ai connu mieux inspiré ! Pourquoi faut-il adopter cette motion de rejet préalable ? Tout simplement parce que les arguments que vous avez défendus, cher collègue, à l'instar de Mme la garde des sceaux, sont spécieux !
M. Urvoas a eu raison de le souligner, l'article 34 de la Constitution place à un haut niveau – celui de la loi – les droits et les libertés fondamentales. Or notre collègue Urvoas a décompté une vingtaine de restrictions dans votre texte telles que « sous réserve de » ou « si cela peut se faire ». Des libertés fondamentales sont donc totalement entravées et ne peuvent s'exercer pleinement dans ces conditions.
Ensuite, indépendamment de notre Constitution, il y a les règles pénitentiaires européennes – que nous avons longuement évoquées et que nous continuerons à évoquer, car je ne me fais guère d'illusions sur le rejet de cette motion – qui ont fait l'objet d'un consensus au Conseil de l'Europe, Michel Hunault l'a souligné avec raison, et nous souhaitons tous aller dans ce sens.
Le problème est qu'une de ces règles pénitentiaires européennes, une des plus fondamentales, pose un principe intangible – ce qui fait, monsieur Blanc, que nous sommes en désaccord avec la conclusion de M. Badinter, non sur le texte du Sénat, mais sur celui qu'a produit la commission : je veux parler du principe de l'encellulement individuel. Certes, je n'en méconnais pas les difficultés pratiques et nous devons réfléchir au fait que certains détenus peuvent ne pas vouloir un encellulement individuel. On peut partir du principe selon lequel l'encellulement individuel est la règle et le fait de préférer être deux – pour des raisons psychologiques ou de santé – l'exception, mais de là à renverser les choses…