Monsieur le président, monsieur le ministre, nous voici de nouveau réunis pour débattre du devenir des PME, de leurs modes de financement et des moyens susceptibles de faciliter leur accès au crédit.
Comme vient de le rappeler Jean-Pierre Balligand, une attitude constructive s'était dégagée de nos débats en première lecture, étant donné la responsabilité qui est la nôtre vis-à-vis des PME. Ces dernières constituent en effet le socle de notre économie : deux tiers des emplois salariés et plus de la moitié de la valeur ajoutée. Elles sont des acteurs fragiles de notre économie, a fortiori en période de crise, du fait de leur sous-capitalisation et de leur difficulté à trouver un établissement prêteur.
En ce sens, le texte issu de nos débats en première lecture n'était certes pas parfait mais représentait à nos yeux une avancée significative. C'est pour cela que nous l'avons soutenu, en attendant les résultats de la navette parlementaire. Eh bien, nous devons dire que nous ne sommes pas déçus !
L'accès des PME au crédit est toujours présent, mais il est désormais également question d'améliorer le fonctionnement des marchés financiers par le biais de la finance islamique. Vaste programme, comme dirait l'autre… J'attire tout de suite votre attention sur le lien pour le moins ténu qui existe entre ces deux sujets. C'est donc un tout autre texte qui nous est arrivé. Le toilettage a été de grande envergure et des cavaliers sont apparus, apportant des modifications non négligeables.
Je ne me pencherai que sur deux aspects de la proposition de loi : tout d'abord, l'exemption pour les experts-comptables de leur obligation de déclaration de soupçon ; par la suite, je reviendrai sur l'adaptation du régime de la fiducie.
La nouvelle mouture du texte, par son article 6 sexies AA, vise trois objectifs : exempter les experts-comptables de la déclaration de soupçon qui doit être effectuée auprès de TRACFIN lorsqu'ils donnent des consultations juridiques ; permettre aux agents de services de l'État chargés de la mise en oeuvre de mesures de gel des avoirs de recevoir de l'administration des impôts tous les renseignements nécessaires à l'accomplissement de ces missions ; enfin, rectifier diverses erreurs matérielles introduites dans le code monétaire et financier.
Mais c'est bien le premier objectif cité qui retient notre attention. Ce cavalier – je ne vois pas comment le définir autrement – semble répondre directement à une demande de la profession. Sinon, pourquoi une disposition étrangère à l'objectif premier du texte aurait-elle été introduite dans l'urgence par nos collègues sénateurs, avalisée sans sourciller par la majorité UMP, puis validée par le secrétaire d'État ?
Les raisons invoquées par la majorité sont troubles : cette mesure constituerait un rétablissement de la situation juridique qui existait sous l'Empire, ainsi qu'un alignement du régime déclaratif des experts-comptables sur celui qui prévaut pour les professions juridiques telles que les notaires, les huissiers de justice, les administrateurs judiciaires et les mandataires judiciaires. Pourquoi, tant qu'on y est, ne pas parler de distorsion de concurrence entre avocats et experts-comptables ? D'après la version actuelle du texte, l'exemption constituerait la règle, exception faite des consultations données à des fins de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme – c'est la moindre des choses ! Sincèrement, je reconnais le courage de la majorité et du Gouvernement, qui, même pendant la crise que nous connaissons, et qui est due à des dysfonctionnements et à des malversations financières, n'hésitent pas à introduire une disposition favorisant ces mécanismes.