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Intervention de Jacques Pélissard

Réunion du 28 septembre 2009 à 15h00
Parité de financement entre écoles publiques et privées pour l'accueil des élèves hors de leur commune de résidence — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Pélissard :

Non un Auvergnat isolé, mais plusieurs maires, dont le village n'a pas d'école et qui, soucieux des fonds publics, dirent à leurs administrés : « Ne mets pas tes enfants dans une école publique voisine, car on va le facturer à notre commune, mets-les plutôt dans une école privée. ». D'autres maires, dont les communes possèdent des écoles publiques, s'aperçurent du déséquilibre de la situation que créait ce flux d'élèves vers les écoles privées. Intervint alors un dernier acteur, un sénateur auvergnat lui aussi, que je connais bien, et qu'on ne peut pas suspecter de cléricalisme aigu, mais qui est un vrai porteur, au sens noble, de la valeur de laïcité, valeur de la République. Il rédigea un amendement qui devint l'article 89 de la loi du 13 août 2004. Sa réaction aboutit à un texte un peu maximaliste et à toute une série de difficultés.

Très rapidement, dans tous les départements de France, les associations de gestion des établissements privés se mirent à adresser aux maires des demandes de prise en charge, voire directement des factures, pour des élèves qui fréquentaient leurs établissements, contournant ainsi le nécessaire filtrage par le préfet. Très vite également, l'Association des maires de France alerta les ministres de l'éducation nationale et de l'intérieur. Sous l'égide de ce dernier et du directeur de cabinet, M. Guéant à l'époque, nous avons entamé une négociation et, le 16 mai 2006, nous sommes parvenus à un accord équilibré. Celui-ci a ensuite été repris dans une instruction du ministre de l'intérieur aux préfets.

Je résume cet accord. Une commune qui n'a pas d'école publique verse une participation pour la scolarisation d'un enfant dans une école publique voisine, en application de la loi Chevènement du 21 janvier 1985 ; en application de l'amendement Charasse, si elle a des enfants scolarisés en vertu du libre choix des parents, elle doit verser une participation également à l'école privée. Dans le cas d'une commune sans école publique sur son territoire, il y a donc parité ou égalité, peu m'importe le terme, en tout cas approche équilibrée entre le public et le privé. Prenons maintenant le cas d'une commune qui a une école publique sur son territoire. Vous le savez, monsieur le ministre, les maires se passionnent pour leurs écoles, investissent, les équipent désormais en informatique, construisent même des logements sociaux pour y faire venir des enfants. Dans la proposition de M. Carle, traduisant le protocole d'accord du 16 mai 2006, ces communes n'ont pas à payer pour les enfants scolarisés dans une école publique d'une autre commune, sauf dans les trois cas prévus par l'article L. 212.8 du code de l'éducation nationale, et – c'est là une grande avancée que je souligne à l'intention de nos collègues de gauche – elles ne payent pas non plus pour la scolarisation d'enfants dans une école privée d'une autre commune, sauf dans les mêmes cas d'exception. C'est une approche équilibrée qui permet de soutenir cette proposition.

L'AMF a indiqué à plusieurs reprises que ce texte était nécessaire et correspondait à son attente. Son bureau comporte 36 membres : 18 de droite et 18 de gauche. Nous nous efforçons de dégager des consensus et des convergences en son sein. Ce texte a été passé au crible et le bureau de l'AMF, dans sa diversité, a donné son accord sur l'équilibre qu'il instaure.

Ce texte, dis-je, était nécessaire. Il y a bien eu des instructions ministérielles aux préfets, différentes circulaires. Mais on ne peut modifier une loi par circulaire. L'accord du 16 mai 2006 restait en quelque sorte dans l'apesanteur juridique. Pour modifier l'article 89 de la loi du 13 août 2004, il fallait une disposition législative. Nous l'avons dit à votre prédécesseur à plusieurs reprises. Finalement, nous avons bénéficié du « concours » du tribunal administratif de Dijon qui, le 28 février 2008, a décidé qu'une circulaire ne pouvait entraver l'application de la loi et a donc imposé à la commune de Semur-en-Brionnais de participer aux frais de scolarisation d'un enfant dans une école privée de la commune de Marcigny. Ce jugement a inspiré à M. Carle sa proposition de loi, que le Sénat a votée le 10 décembre 2008 à l'unanimité avec l'abstention du seul groupe communiste.

Ce texte apporte une solution équilibrée qui met fin à une phase de contentieux. Sachez que cet été, j'ai reçu cinq recours contre la ville de Bron émanant d'associations de gestion d'établissements privés. Par ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Lyon du 19 juillet 2009, ces recours ont été rejetés pour défaut d'urgence. Mais tous les maires sont exposés à ce risque de contentieux et il fallait absolument sortir de cette situation.

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