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Intervention de Dominique Orliac

Réunion du 21 septembre 2009 à 15h00
Organisation et régulation des transports ferroviaires — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Orliac :

La « concurrence pour la concurrence » n'est plus un dogme si immuable. Rien que pour cette raison, ce texte est dépassé et inapproprié non seulement à la réalité européenne d'aujourd'hui, mais aussi à celle de notre pays, si l'on en croit les soudaines déclarations volontaristes et interventionnistes, aux accents keynésiens, de notre Président de la République. Voilà maintenant qu'il s'intéresse à la mesure du bonheur ! On est toutefois loin du bonheur, monsieur le secrétaire d'État, avec le texte que vous nous présentez aujourd'hui, particulièrement pour certaines catégories d'usagers, les grands oubliés de ce texte.

L'Europe s'est désormais engagée dans la bataille de l'environnement, dans la promotion de transports ferroviaires européens de qualité, attractifs pour les usagers et les entreprises, dans la promotion de l'intermodalité, extra et intra-urbaine, dans le rééquilibrage rail-route. Depuis, l'Europe, notamment la France, s'est engagée pour créer des emplois et promouvoir une croissance verte. Or le présent projet de loi ne tient pas compte de ces évolutions, puisqu'il est resté bloqué sur une transposition administrative a minima de l'ouverture à la concurrence, paquet par paquet. Il aurait pu être un texte majeur pour donner un nouvel élan à l'Europe des transports ferroviaires. Hélas, il n'en est rien : ce texte ne connaît que la concurrence !

Par ailleurs, le moins que l'on puisse dire, c'est que nous manquons d'une étude d'impact sérieuse sur les effets attendus de ce projet de loi sur l'ensemble de la politique des transports. Enfin, ce texte est aussi une occasion manquée, sur le plan tant environnemental que social, alors que le Grenelle de l'environnement fait son chemin.

Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je veux insister sur l'une des conséquences les plus graves d'un tel projet de loi, et sur la poursuite – la fuite en avant, devrais-je dire ! – de cette logique de libéralisation en matière de transports ferroviaires.

Nous, élus des territoires ruraux, ne le savons que trop : la perte de marchés peu rentables pour les opérateurs historiques va toujours de pair avec une « rationalisation » des plus petites lignes, voire avec leur fermeture. Elle va aussi de pair avec un moindre entretien de ces réseau, ce qui, en soi, constitue une menace pour la sécurité des usagers et des personnels. Une telle logique entraînera la fermeture de toujours plus de gares, la suppression de toujours plus d'arrêts ; en première ligne, toujours plus nombreux seront les territoires ruraux qui se trouveront coupés du monde. Leurs habitants n'auront plus qu'à regarder passer les trains, des trains qui ne s'arrêteront plus, et qu'il faudra aller rejoindre en faisant des heures de route en voiture.

À terme, tous ces facteurs induiront – et induisent déjà – une préférence pour la route, de même qu'ils produisent déjà des zones entièrement enclavées, que ne desservent plus les transports ferroviaires. C'est déjà le cas dans de très nombreuses régions françaises. Dans ces conditions, où est le progrès ? Où est l'aménagement du territoire ? Où est la prise en compte des territoires ruraux ? Pourquoi continuer à donner moins à ceux qui ont déjà moins, et ainsi accroître encore davantage les inégalités territoriales ?

Comment s'étonner ensuite, monsieur le secrétaire d'État, que des populations décident de se battre et de lutter ensemble pour maintenir des arrêts en gare ? C'est par exemple le cas dans le Lot où l'on lutte pour sauver les gares de Gourdon et de Souillac en leur permettant de conserver des arrêts en nombre suffisant, afin que des bassins de vie et d'emplois demeurent attractifs – au mieux – ou, au pire, ne s'enfoncent pas dans la crise…

Vous connaissez bien ce dossier, monsieur le secrétaire d'État : je n'ai cessé, depuis mon élection à l'Assemblée nationale, de vous alerter et de vous interpeller – ainsi que la SNCF, bien entendu – au sujet de ces deux gares. Vous m'avez entendue, monsieur le secrétaire d'État ; vous connaissez l'exaspération de la population lotoise, et vous savez aussi sa détermination, son engagement et sa volonté d'aboutir au rétablissement d'arrêts supplémentaires. Il y va de la qualité du service public.

Pourquoi faire adopter d'un côté des projets de loi comme celui d'aujourd'hui et, de l'autre, affronter le mécontentement et à l'exaspération des usagers et des populations ? Ainsi, sans le combat de l'association « Tous ensemble pour les gares de Gourdon et de Souillac » et le soutien des élus du Lot, les trains de la ligne Paris-Limoges-Toulouse ne s'arrêteraient plus dans les gares lotoises.

Les Lotois ne peuvent pas davantage se résoudre à ce que la gare de Cahors devienne, à terme, une simple gare de TER, avec toutes les conséquences que cela entraînera pour les collectivités territoriales.

Au-delà du caractère d'autant plus technique et complexe de ce projet de loi qu'il s'agit de transposer une directive européenne, la question du transport ferroviaire permet peut-être, plus que toute autre, d'établir un lien clair entre la politique nationale et ses effets ravageurs sur le terrain.

Aussi comprendrez-vous qu'il m'est impossible d'adopter un tel projet de loi, car il va à l'encontre des combats que je mène aux côtés de la population lotoise pour sauver nos gares et, au-delà, nos territoires, notre qualité de vie, notre avenir ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

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