L'opération est casse-cou. Certes, monsieur le président Mallet, la décision est celle du Gouvernement, et non la vôtre, mais, pour ce qui est de la couverture du territoire, il est peu probable qu'un quatrième opérateur se jette à corps perdu dans les secteurs les moins peuplés. Dès lors que la concurrence existe, elle s'exerce surtout là où il y a des marchés. Ainsi, l'arrivée d'un quatrième opérateur aggravera la mauvaise desserte du territoire.
En deuxième lieu, bien que je n'aie pas de tendresse particulière pour les opérateurs en place, il semble qu'ils aient atteint récemment un petit équilibre, après avoir développé un réseau d'infrastructures correspondant à l'engagement qu'ils avaient pris. Évitons donc de jouer avec le feu. À la différence de mes collègues de l'UMP, je ne crois pas qu'une concurrence accrue fasse baisser les prix. Nous risquons de sacrifier dans cette affaire une partie du dividende numérique, qui devrait être prioritairement utilisé pour l'aménagement du territoire et l'Internet à haut débit mobile. Or, le CSA (Conseil supérieur de l'audiovisuel), du fait d'une mauvaise articulation avec l'ARCEP, dont on ne saurait vous imputer la responsabilité, vient de reporter divers réaménagements des émetteurs pour passer au numérique terrestre. Les ondes hertziennes sont un bien rare, que nous devons tous veiller à utiliser sans abus. Comme l'a souligné tout à l'heure Mme de La Raudière, l'articulation risque d'être difficile. Ainsi, tant que la question de l'utilisation du dividende numérique n'a pas été réglée, le moment me semble mal choisi pour lancer la quatrième licence.
Ma dernière remarque est plus perfide, mais elle est cohérente avec mon rôle d'opposant : voyant qu'on fait tout ce qu'il faut pour que Siemens quitte Areva afin que M. Bouygues accède au nucléaire, ou que M. Bolloré n'a pas tenu ses engagements après avoir racheté des licences Wimax à TDF, on peut penser que la quatrième licence recouvre un marchandage entre amis qui permettra à certains de récupérer un quatrième réseau qui pourra être monnayé contre d'autres avantages. Je souhaite que nous ne soyons pas otages du grand Monopoly qui n'a guère de lien avec l'intérêt des usagers.