Non, je ne travaille pas dans une association. En revanche, je suis connue dans mon département en tant qu'avocate des femmes et des enfants violentés, et on me demande d'intervenir dans des colloques, dans les lycées, à l'Aide sociale à l'enfance. Sans doute certaines femmes viennent-elles me voir parce qu'elles connaissent mon nom. Souvent, elles sont amenées par une amie. Elles peuvent venir aussi sur les conseils de leur médecin traitant, voire du pédiatre qui, après plusieurs visites, finit par remarquer qu'elles ont des marques sur le corps et leur donne les coordonnées d'un avocat. Bref, si les femmes ont une possibilité à un moment donné de sortir de leur enfermement, elles viennent.
Sur le second point, on ne peut pas être manichéen. Il arrive que des femmes soient provocantes et provocatrices. Quant aux enfants, ils ne comprennent pas cette violence, et ils en souffrent intensément parce qu'ils aiment quand même leur père. On peut être un père câlin avec ses enfants, et un mari frappeur, je le constate fréquemment.
C'est pourquoi je suis très favorable à la loi de 2006 car elle permet au conjoint d'être « mis entre parenthèses » par le procureur de la République pendant un certain temps, temps pendant lequel il pourra réfléchir sur son comportement. Voyant ses enfants dans un cadre médiatisé ou un point rencontre, sous le contrôle d'éducateurs, il devra leur expliquer pourquoi il a frappé leur maman. Parallèlement, un soutien médico-psychologique se met en place. Je pense que c'est mieux pour l'enfant car d'une part, on lui montre, à travers la sanction pénale, qu'il existe des limites à ne pas franchir, et d'autre part on essaie, malgré tout, de maintenir ses liens avec son père – car les enfants doivent se construire avec le père qu'ils ont, même si c'est un père « cogneur ».