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Intervention de Olivia Cattan

Réunion du 15 juillet 2009 à 17h00
Mission d’information sur la pratique du port du voile intégral sur le territoire national

Olivia Cattan, présidente de l'association Paroles de femmes :

En tant que journaliste, j'ai écrit deux livres, dont le premier s'intitule Deux femmes en colère ; quant au second, La femme, la République et le Bon Dieu, qui traitait des signes ostentatoires et du choc entre religion et laïcité, il m'a donné l'occasion d'être auditionnée à l'Assemblée nationale – audition qui s'est bien passée mais n'a pas été suivie d'effet, ce que nous avons un peu regretté.

L'association Paroles de femmes, née il y a trois ans, est composée d'hommes et de femmes qui tentent de promouvoir l'égalité des sexes dans la société mais également dans les groupes religieux. Très tôt, nous nous sommes attaqués au statut des femmes dans les religions, en particulier à la répudiation, qui a toujours force de loi en France, tant dans la religion juive que musulmane. Je souhaite, en tant que juive, que l'intégrisme religieux soit évoqué de façon plus large, car il concerne toutes les religions.

L'association a organisé de nombreux colloques et compte un certain nombre de permanences en France. Nous avons créé un module chargé de réfléchir à l'égalité entre garçons et filles et, dans les quartiers difficiles, nous travaillons sur les notions de citoyenneté et de laïcité. Nous disposons de certains outils, dont le film récent intitulé La journée de la jupe, qui évoque les problèmes auxquels sont confrontés les professeurs dans les écoles. Nous intervenons de façon hebdomadaire dans les établissements des quartiers difficiles, mais également dans les centres de détention pour adolescents ayant commis des agressions sexuelles.

Si nous sommes favorables à une loi destinée à interdire le port de la burqa, elle ne doit pas être exclusivement répressive mais s'accompagner d'une réflexion sur le véritable problème que rencontre notre pays avec l'émergence des intégrismes religieux.

La burqa, pour nous, est un signe ostentatoire de plus pour affirmer une appartenance, une culture religieuse qui s'oppose aux valeurs républicaines et laïques de notre pays. Mais ce n'est pas le fond du problème, car les adolescentes musulmanes que nous rencontrons dans les collèges souhaitent porter le voile, comme leur mère. Les garçons nous parlent de virginité obligatoire pour les filles. Sur une classe de vingt, seuls deux élèves se sentent français, les autres choisissant le pays d'origine de leurs parents ; seule une fille sur dix ose porter une jupe, car les filles qui se découvrent sont des filles faciles. Nous devons savoir comment et pourquoi ces adolescents qui ont accès à la modernité, à l'éducation laïque, choisissent de respecter ces traditions ancestrales, où le droit de la femme ne vaut pas grand-chose.

Interdire la burqa dans la rue est une bonne chose, mais à condition que cette interdiction s'accompagne d'une réflexion sur l'ensemble des signes et comportements religieux qui menacent notre République, par exemple la fin de la mixité autorisée dans les piscines de certaines villes de France, le maintien de la répudiation dans les religions musulmane et juive, l'absence de mixité dans les lieux de culte…

Cette loi devra s'accompagner de mesures préventives, tels l'obligation d'enseigner l'éducation civique à l'échelle nationale ou l'accompagnement des femmes qui portent la burqa. Si, demain, une femme souhaite ne pas porter la burqa pour obéir à la loi mais que son mari refuse, qui la protégera ? Si un homme impose à sa femme de ne plus sortir, que pourra faire une association comme la nôtre ? Si cette loi est adoptée, la République, en veillant à ne pas stigmatiser telle ou telle population, devra se donner les moyens d'endiguer la montée de l'intégrisme. L'endoctrinement des jeunes générations ne se fait pas dans la rue – et ce n'est pas parce que nous ne verrons plus de femmes en burqa que le problème sera réglé – mais au sein de la famille et, surtout, dans les mosquées. Il s'agit donc bien d'un problème religieux, même si la burqa n'est pas un signe religieux. Nous avons constaté à notre permanence du Pré-Saint-Gervais que les femmes se sont couvert la tête dès qu'un nouvel imam est arrivé. Ce n'est certainement pas un hasard.

Le combat qu'il nous faut mener va au-delà d'une loi sur le port de la burqa. Il est temps de mener une campagne de prévention active, car, vous l'aurez compris, l'éducation et la prévention restent nos meilleures armes. Pourquoi, dans ces conditions, ne pas instaurer un service civique mixte, obligatoire, pour les jeunes de 18 à 65 ans, au cours duquel seraient enseignés la laïcité, le droit des femmes et la citoyenneté ?

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