La Ligue du droit international des femmes a été créée en 1983 par Simone de Beauvoir pour faire face au danger du relativisme culturel. Nous nous sommes fixé des priorités : lutte contre l'excision et les violences commises à l'égard des jeunes filles dans les cités, protection des enfants, notamment dans le cas de couples franco-algériens. Au cours des quinze dernières années, nous avons travaillé sur un sujet qui intéresse généralement peu le mouvement féministe et les responsables politiques – je veux parler du sport, domaine directement concerné par le port du voile islamique.
Dès 1989, nous nous sommes prononcés pour l'interdiction du voile dans l'espace public. Même s'il n'est qu'un symbole, le voile porte atteinte aux valeurs de notre société. D'ailleurs, les sociétés humaines sont construites sur des symboles. Le drapeau, l'hymne national d'un État en sont la représentation et lui donnent un sens. Le voile, tous les Français le comprennent, signifie la ségrégation et instaure un statut d'infériorité. Toute personne qui croit dans les valeurs de la République se sent agressée par le port du voile. En ce sens, il constitue bien une atteinte à l'ordre public. Et c'est à vous, législateurs, qu'il appartient de déterminer jusqu'où doit aller la loi.
Mais il ne suffit pas de légiférer, il faut engager une action pédagogique. Mme Nicole Ameline se souvient sans doute qu'en 2004, elle avait commandé une étude, avec M. Jean-François Lamour, relative aux femmes et à la pratique du sport, dont une partie était consacrée aux jeunes filles des cités. Cette étude représentait un énorme travail, puisque soixante auditions et six enquêtes avaient été réalisées. Pour avoir participé, en janvier dernier, à un débat sur les jeunes filles dans les cités, je peux vous dire que la situation n'a pas évolué. Le phénomène économique n'est pas le seul responsable. Alors que le sport compte 30 % de licenciés au niveau national, ils ne sont plus que 10 % dans les cités, dont un quart de filles. Le monde du sport ne doit pas rester indifférent à la lente exclusion des filles des domaines sportifs. Je souhaite vivement que vous établissiez un état des lieux de cette question.
Je voudrais avant de conclure saluer Hassiba Boulmerka, cette femme qui, après avoir obtenu la première médaille d'or algérienne aux Jeux Olympiques, avait dédié sa victoire à toutes les femmes d'Algérie. Elle avait été vilipendée et menacée de mort par les islamistes. À Pékin, le Comité international olympique n'a pas été capable d'appliquer la charte olympique : la porte-drapeau du Bahreïn était voilée. Si vous laissez les choses en l'état, vous condamnez à mort les femmes qui, ici comme là-bas, préfèrent les lois du sport aux règles dictées par les extrémistes. Ne rien faire, c'est aussi faire un choix.