Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Roland Vardanega

Réunion du 26 mai 2009 à 16h15
Commission des affaires économiques

Roland Vardanega, président du directoire du groupe PSA Peugeot-Citroën :

S'agissant de la formation, nous devons veiller à ne plus reproduire les erreurs du passé. L'industrie automobile a énormément évolué au cours des quinze dernières années. Elle a délaissé le travail à la chaîne et les mauvaises conditions de travail pour devenir une industrie de pointe, qui emploie des personnels très compétents et bien formés. Nous accordons désormais la plus grande importance à la formation. Alors qu'auparavant la formation d'un ouvrier débutant durait une semaine, elle s'étend aujourd'hui sur trois semaines. La formation de plusieurs milliers de moniteurs, qui se déroule actuellement consacre une semaine au « savoir-être », une autre au savoir-faire et la troisième au travail effectif. Nous considérons que la formation est un investissement, et non une variable d'ajustement. Autrefois, dès les premières difficultés, nous cessions de financer les formations. Nous commettions là une grave erreur stratégique.

L'un d'entre vous a évoqué la situation des femmes au sein de l'entreprise. En matière de diversité, PSA a remporté tous les prix qu'il était possible d'obtenir.

J'en viens à la politique foncière de PSA. Certes, le compactage libère des bâtiments, mais nous n'envisageons pas de vendre la moindre surface, ni à Poissy, ni à Aulnay. Seul le site d'Asnières est à vendre.

Contrairement à ce qui a été dit, Fiat, le plus petit groupe automobile européen, n'est pas en bonne santé, M. Marchione lui-même craint le pire s'il ne parvient pas à s'allier à un autre groupe. Fiat est lourdement endettée. En tant que président de l'usine de Val di Sangro, que nous détenons en commun, je ne me peux me permettre de critiquer cette entreprise, mais force est de constater l'échec de nombre de ses véhicules. Heureusement, la Fiat 500 est un véritable coup de maître. PSA n'a aucune leçon à tirer de Fiat, car la force d'une entreprise provient des effectifs dédiés à la R&D. Or, chez Fiat, ceux-ci sont très insuffisants. C'est grâce à nos efforts en faveur de l'innovation que nous avons réussi à vendre jusqu'à 3 400 exemplaires de la Peugeot 206 par jour.

La durée des délais de livraison est en effet incompréhensible pour le public, mais pour déstocker, nous réduisons notre production. Prenons un exemple : vous avez commandé une C5 au mois de décembre, mais l'entreprise de Rennes n'a travaillé qu'une semaine. Si vous ne choisissez pas une voiture parmi le stock existant, vous attendrez votre véhicule trois mois. C'est peut-être paradoxal, mais le chômage augmente les délais de livraison. Cela dit, il est parfaitement légitime que le client souhaite commander un véhicule personnalisé en fonction de ses attentes.

Chez Peugeot, où j'ai occupé le poste de DRH, nous nous sommes toujours opposés à l'actionnariat des salariés, non pour des raisons de principe, mais parce que les salariés pourraient nous reprocher ensuite d'avoir perdu les trois quarts de leurs économies. L'intéressement et la participation sont des mécanismes utiles, sauf en période de crise. Moralement, je n'ai pas le coeur à encourager les salariés à souscrire à un mécanisme qui risque de leur faire perdre à la fois leur emploi et leurs économies.

Pourquoi développons-nous les voitures hybrides, au détriment des voitures uniquement électriques ? Il faut savoir que l'énergie liquide est cent fois plus efficace que l'énergie stockée dans des batteries. Un kilo de batterie – sachant que les batteries pèsent environ 300 kilos – contient cent fois mois d'énergie qu'un kilo d'essence ! Encore s'agit-il des batteries lithium-ion, pourtant très performantes. Premier exemple : lors d'un grand prix de Formule 1, un réservoir de 120 litres est rempli en six secondes : s'il s'agissait d'un moteur électrique, il faudrait une tranche de centrale nucléaire de 1 450 mégawatts, exactement comme pour recharger dix 207 HDI. De plus, pour débiter cette énergie en soixante secondes, il faudrait un câble électrique de dix centimètres, refroidi par immersion dans l'eau.

Nous espérons que les batteries pourront un jour concentrer plus de kilowattheures. C'est le cas des batteries métal-air et plus encore des lithium-air, dix fois plus puissantes que les lithium-ion, mais avec un rendement encore dix fois inférieur à celui du carburant liquide !

Il est clair qu'à très long terme notre seule source d'énergie proviendra de l'électricité propre – éolienne, solaire, hydraulique et nucléaire. Mais il nous faudra trouver des solutions pour recharger les batteries, ce qui coûte encore très cher. La recherche sur les batteries se poursuit depuis plus de cent ans, et la première voiture qui a roulé à 100 kilomètres-heure, en 1899, la Jamais contente, était électrique.

Une autre technique existe, mais elle est très complexe. L'hydrogène n'est pas réellement une source d'énergie, mais un moyen de stocker l'électricité issue de l'électrolyse de l'eau. Pour stocker l'hydrogène dans la voiture, il faudrait embarquer une pile à combustible, qui, elle, produit l'inverse de l'électrolyse – elle sépare l'eau de l'électricité. À l'heure actuelle, un tel dispositif coûte 50 000 euros. De plus, le transport de l'hydrogène est aussi dangereux qu'une bombe atomique. Du fait de ces difficultés, nous ne parviendrons pas à utiliser l'hydrogène avant les années 2050, voire 2100. Nous sommes capables de stocker l'hydrogène dans des métaux, et les Américains ont engagé des recherches en ce sens, mais nous ne pouvons en stocker que 15 %, et les opérations de mise en place et de récupération exigent plus d'énergie qu'elles n'en procurent.

Nous pouvons également envisager de fabriquer l'hydrogène dans la voiture, notamment à partir du méthane, mais le rendement est désastreux. Pour les avions, nous n'avons pas de solution, et cela vient de m'être confirmé par l'un des plus brillants cerveaux de l'aéronautique que j'ai récemment recruté.

En tout état de cause, nous devons économiser le carburant. La voiture hybride à dominante électrique le permet, tout comme les biocarburants, tels l'éthanol et les huiles. Or un plein de biocarburants utilise une surface de culture qui pourrait nourrir un enfant une année entière ! Actuellement, il n'est pas rentable de produire de l'éthanol, en dehors du Brésil où, grâce aux cultures de canne à sucre, la moitié des voitures sont équipées du système flexfioul, qui utilise 85 % d'éthanol. Il faut donc trouver des biocarburants de deuxième génération. Cela dit, une société américaine a récemment réussi à transformer, à l'aide de bactéries, des déchets carbonés en éthanol pur à 99 %, pour un prix compétitif par rapport au pétrole. C'est un véritable espoir.

La voiture électrique peut prendre de multiples formes. Nous attendons beaucoup des biocarburants de deuxième génération car, aujourd'hui, si nous voulions utiliser des biocarburants, il faudrait couvrir les deux tiers de la planète de plantes destinées à produire de l'huile ou de l'alcool, ce qui n'est pas envisageable. Les solutions de demain passent par les algues ou le méthane, bien que celui-ci soit vingt fois plus dangereux pour la couche d'ozone que le CO2 !

Il reste du chemin à parcourir, mais en optant pour l'hybridation, nous allons dans la bonne direction, en attendant les voitures électriques autonomes.

Je rappelle que nous étions les pionniers en matière de voiture 100 % électrique mais cela s'est soldé par un échec retentissant.

Permettez-moi de vous raconter l'expérience que nous avons menée à La Rochelle, avec l'accord de Michel Crépeau. Pendant un an, nous avons proposé aux habitants une centaine de voitures – Peugeot 106 et Citroën Saxo –, pour un coût locatif de 100 euros. À l'époque, la 106 valait 50 000 francs, mais pour acheter une 106 électrique, sans les batteries, il fallait débourser le double. Les utilisateurs, pourtant très enthousiastes, n'ont pas souhaité acheter la voiture à moitié prix, soit au prix d'une voiture à essence. Le prix qu'ils étaient prêts à débourser ne dépassait pas 35 000 francs ! Nous avons donc cessé de commercialiser la voiture électrique, comprenant qu'il était nécessaire de prévoir un moteur annexe. J'espère qu'un jour les voitures électriques permettront de parcourir 400 kilomètres et que nous pourrons recharger les batteries en quelques minutes.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion