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Intervention de Jean-Claude Fruteau

Réunion du 24 octobre 2007 à 11h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Claude Fruteau, rapporteur pour avis :

a rappelé que les dotations du budget des transports aériens pour 2008 étaient contenues dans le programme « Transports aériens » de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » ainsi que dans le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », qui est l'ancien budget de l'aviation civile.

Il a fait remarquer que le budget des transports aériens pour 2008 porte clairement la marque d'une évolution importante intervenue en 2007, la création du MEDAD, le ministère de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, qui inscrit la politique publique en matière de transports dans une perspective claire de développement durable, de préservation de l'environnement. La discussion des crédits, a-t-il fait remarquer, intervient le jour même où débute une nouvelle phase du « Grenelle de l'environnement » qui devrait conduire à la prise de décisions importantes.

Ainsi brièvement caractérisé, le budget des transports aériens de 2008 connaît, une évolution significative, s'agissant du programme « Transports aériens », dont les moyens sont inférieurs de plus de 50 % aux crédits de la loi de finances pour 2007. Les autorisations d'engagement passent ainsi de 189 à 98 millions d'euros, cependant que les crédits de paiement s'élèvent à 80 millions d'euros pour 2008, au lieu de 170 millions d'euros dans le budget initial pour 2007.

Cette évolution s'explique par des mesures de structure et, d'abord, par la quasi disparition des dépenses de personnels, les effectifs étant transférés, en effet, vers une nouvelle action « Personnel oeuvrant pour les politiques du programme transports aériens » d'un nouveau programme créé en 2008 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie ». Pour cette nouvelle année, le programme « Transports aériens » ne comporte plus ainsi que 10 emplois « équivalents temps plein » à l'Agence de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires, l'ACNUSA ; le nombre des « équivalents temps plein travaillé » rattaché à la nouvelle action s'élève, en revanche, à 1 785 pour 2008.

Le programme « transports aériens » fait également l'objet d'une débudgétisation de 30 millions d'euros, du fait que la majoration de la taxe d'aéroport prévue à l'article 44 du projet de loi de finances doit permettre la suppression de tout financement des mesures de sûreté et de sécurité aéroportuaires par le budget de l'État.

Quant aux moyens prévisionnels figurant dans le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », ils enregistrent une hausse de près de 4 %.

Le secteur du transport aérien connaît un réel développement, principalement pour le trafic international de passagers, lequel s'est accru selon les chiffres de l'Organisation de l'aviation civile internationale de plus de 6 % en 2006, comme au premier semestre de 2007, contribuant à la bonne santé des grandes compagnies aériennes, en particulier Air France KLM, à la prospérité de laquelle nous sommes tous attachés. Pour autant, la bonne marche des affaires ne doit pas conduire, a estimé M. Jean-Claude Fruteau, à un affaiblissement des données environnementales et des protections sociales de la même façon que la politique du « tout libéral » ne doit pas conduire à un recul de la situation des personnels, de la politique d'aménagement du territoire et de la desserte de certaines de nos régions. Cela est particulièrement vrai des compagnies « à bas coûts », les « low costs », en forte augmentation en France depuis leur apparition sur le marché national en 1996, qui représentent 17 % des sièges offerts dans notre pays.

D'une façon générale, l'évolution du budget des transports aériens pour 2008 suscite, selon M. Jean-Claude Fruteau, trois grandes préoccupations, touchant aux questions d'environnement, de sécurité et de sûreté et de continuité territoriale avec l'Outre-mer.

La première source d'inquiétude concerne les questions d'environnement. Les propositions n'ont pas manqué, qui feraient du secteur aérien un contributeur important à la préservation de l'environnement.

Le Gouvernement français se déclare clairement favorable à une mesure préconisée par les instances européennes depuis la communication de la Commission européenne du 27 septembre 2005, l'inclusion du transport aérien dans le système européen d'échanges de quotas d'émissions de gaz à effet de serre.

Le document de travail ouvrant la nouvelle phase du « Grenelle de l'environnement » retient, par ailleurs, comme objectif possible, une réduction de la consommation de carburant et des émissions de CO2 par les avions qui pourrait atteindre 50 % d'ici à 2020. Le projet d'utiliser à terme, grâce à un important effort de recherche, les biocarburants, en tous cas ceux de la deuxième génération, formés à partir de la biomasse, dans le secteur du transport aérien est enfin retenu par le Gouvernement, même si les responsables de la Direction générale de l'aviation civile font remarquer, que l'on bute alors sur les difficultés d'inclusion de ces carburants en aéronautique et sur la rareté de cette ressource.

Le rapporteur a fait remarquer que les intentions ainsi manifestées paraissent bonnes, mais que l'on peut douter qu'elles soient vraiment suivies d'effets. Tel est le cas, a-t-il estimé, pour le contrôle des nuisances sonores aéroportuaires. Son appréciation négative rejoint, selon lui, les réflexions de l'Agence de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires, l'ACNUSA, qui fait régulièrement remarquer, dans ses rapports publics annuels, dont le Parlement est d'ailleurs destinataire, que ses recommandations sont insuffisamment suivies d'effets.

Certes, les dotations de l'ACNUSA sont maintenues pour 2008 et Mme Kosciusko-Morizet a pu indiquer lors de son audition par la commission des affaires économiques le 17 octobre, qu'un travail était actuellement mené sur plusieurs points : extension éventuelle du champ de compétences de l'ACNUSA à la question des pollutions à proximité des aéroports, sécurisation juridique des sanctions prononcées par l'Agence, optimisation du traitement du dossier entre le moment où l'infraction est constatée et celui où la sanction est prononcée, doublement envisagé, sans doute en loi de finances rectificative, de la taxe sur les nuisances sonores aériennes affectée à des aides à l'insonorisation des habitations des riverains pour l'aéroport d'Orly.

Les intentions sont peut-être sur ce point bonnes, mais les réalisations restent tout à fait incertaines, alors que, l'on constate un développement significatif des zones de nuisances aéroportuaires, l'extension du plan de gênes sonores intervenu récemment à Roissy en témoigne et que le « projet annuel de performances » lui-même fait allusion à l'augmentation de ces nuisances, gravement préjudiciables aux populations riveraines. En tout état de cause, deux types de nuisances sonores sont clairement inacceptables, a estimé M. Jean-Claude Fruteau et d'ailleurs insuffisamment combattues : celles qui surviennent entre cinq et sept heures du matin, un effort ayant, c'est vrai, été mené pour la période nocturne sur la plupart des aéroports et celles qui résultent de survols à des altitudes anormalement basses.

Autre sujet de préoccupation : les questions de sécurité et de sûreté.

Les questions de sécurité ont évidemment une importance croissante, dans le contexte que nous connaissons, de progression régulière du trafic aérien : l'Organisation de l'aviation civile internationale indique ainsi que ce trafic a progressé de 6,3 % en « passagers kilomètres transportés » en 2006 et M. Borloo précisait devant la commission le 17 octobre que l'on prévoit une hausse annuelle de 5 % du trafic aérien dans les années qui viennent.

On ne peut que regretter que les moyens alloués au bureau d'enquêtes et d'analyses (le BEA), qui agit en cas d'accidents ou d'incidents d'aviation civile ne soient dans ces conditions pas accrus. La mission d'information parlementaire présidée par Mme Odile Saugues, avait réclamé, parmi 40 propositions présentées en juillet 2004, une augmentation immédiate des personnels de 20 %. Or, après une « remise à niveau » de ceux-ci, on constate une stagnation des effectifs, qui n'apparaît pas du tout compatible, en tous cas à terme, avec les responsabilités nationales et internationales croissantes du BEA. Cela paraît d'autant plus regrettable, que le bureau d'enquêtes et d'analyses a considérablement progressé en peu de temps dans le délai de traitement des dossiers, malgré des moyens réduits en personnels et, d'ailleurs, en locaux, et qu'il a su montrer, après plusieurs accidents d'aviation civile, y compris ceux de Charm-el-Cheikh en 2004, du Venezuela en 2005, de Montréal plus récemment, sa grande expertise et ses capacités à réagir rapidement en incitant à la prise de mesures provisoires, pour éviter tout risque immédiat.

S'agissant ensuite des mesures de sûreté, celles qui permettent tout particulièrement la lutte contre le terrorisme, il faut insister sur leur coût de plus en plus élevé, du fait notamment des mesures imposées par les États-Unis, l'ensemble de ces dépenses devant désormais être financé par la taxe d'aéroport. Trois questions très sensibles et mal résolues à l'heure actuelle sont posées par l'évolution de ces dépenses de sûreté : leur coût, à la croissance quasiment exponentielle, qui est voisin, pour 2008, de 700 millions d'euros, alors qu'il n'était que de 90 millions d'euros en 2000 ; leur financement donc et, il faudrait peut-être réfléchir, sur ce point, à une plus grande responsabilisation des compagnies aériennes ; leur efficacité enfin, car tout se passe parfois comme si la « sédimentation » des mesures arrêtées au cours des dernières années et leur sévérité conduisaient à en affaiblir la portée.

La dernière insatisfaction exprimée par le rapporteur concernait le thème de la continuité territoriale avec l'Outre-mer. Un des objectifs du programme « navigation aérienne » contenu dans le budget annexe est l'amélioration du taux de couverture des coûts des services outre-mer par le produit de la redevance. Or, le relèvement de celle-ci conduit à une augmentation du prix des billets, insupportable pour nos compatriotes de l'outre-mer. Dans le contexte ultramarin, le transport aérien est bien l'unique moyen de déplacement vers la métropole. Ainsi, tout relèvement du taux de la redevance apparaît critiquable et totalement injuste.

D'une façon générale, la desserte de nos collectivités d'Outre-mer apparaît mal assurée, faisant peser sur certains de nos compatriotes une situation injuste. Il faut donc inciter le Gouvernement à définir une position claire, à faire en sorte qu'il soit répondu à plusieurs préoccupations : comment faire baisser les prix des billets d'avion ? Quelle place donner aux différentes compagnies pour assurer dans les meilleures conditions la desserte de ces parties de notre territoire national ?

M. Jean-Claude Fruteau, rapporteur pour avis, a proposé enfin, dans une démarche constructive, de ne pas adopter les crédits du budget annexe et des « transports aériens ».

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