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Intervention de Jean-François Rocchi

Réunion du 3 septembre 2008 à 14h45
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Jean-François Rocchi :

Tout à fait.

Pour ce qui est du montant, j'ose espérer que votre question, monsieur Bayrou, ne tend pas à insinuer qu'il résulte d'une transaction. La signification de l'arrêt de la Cour de cassation est en quelque sorte le noeud gordien de l'affaire. La Cour a sanctionné le choix qu'avait fait la cour d'appel d'indemniser les liquidateurs de M. Tapie – et donc M. Tapie d'une certaine manière – à hauteur de 135 millions d'euros, somme révisée à 145 millions en raison d'un calcul d'intérêts semble-t-il erroné.

C'est cela qui a été cassé. J'ai pris le soin de dire que le montant d'une condamnation qui aurait été prononcée par une nouvelle juridiction du fond, telle, typiquement, la cour de renvoi, était absolument inconnaissable. Rien ne permet d'affirmer, comme certains le font, que ce chiffre est un plafond que la cour d'appel ne pouvait franchir. À partir du moment où l'on met les autres moyens de fond à la disposition d'une cour d'appel, d'une cour de renvoi ou de n'importe quel autre juge pour condamner, le cas échéant – ce n'était pas sûr mais on pouvait le redouter –, le CDR, je serais bien incapable de fixer un chiffre : celui-ci se situe entre zéro et le montant de la plus-value, voire au-delà. La Cour de cassation n'a pas sanctionné, me semble-t-il, le moyen qu'ont développé nos adversaires et sur lequel le tribunal arbitral nous a condamnés, à savoir le préjudice « par ricochet » : GBT, société faîtière – ou peu s'en faut – du groupe Tapie n'est pas payée en tant qu'actionnaire, ni même en exécution directe du contrat, mais par des effets continuateurs du contrat. Le mémorandum postulait le désendettement et visait à des restructurations. M. Pascal Clément a souligné à juste titre que l'exécution en était impossible. Elle l'était d'autant moins que la dénonciation de la relation bancaire en 1994 faisait tomber le mémorandum.

Je me dois toutefois de citer la thèse de l'adversaire qui nous faisait redouter une condamnation : le groupe Bernard Tapie pouvait soutenir que, si tout cela n'était pas arrivé, il aurait pu rester propriétaire d'Adidas pendant quelques années et même jusqu'à aujourd'hui ; il aurait subi de ce fait un préjudice continu, ou « par ricochet ». Cela, la Cour de cassation ne l'a pas démoli : c'était toujours à la portée d'un tribunal.

Je suis donc incapable d'avancer un chiffre. Je n'ai pas subitement multiplié par deux un « plafond absolu » qui n'existait pas !

Votre troisième question, monsieur Bayrou, est en revanche naturelle. C'est bien l'État qui est l'actionnaire final du CDR. Cela dit, la formule « C'est le contribuable qui paie » est un peu forte. Dans la mesure où nous sommes détenus par l'EPFR et garantis par lui à tout moment et sur toutes nos opérations, nos comptes sont toujours soldés à zéro. Tous les bénéfices et toutes les pertes remontent à l'EPFR, c'est-à-dire à l'État. Au demeurant, l'avenant n° 13 au protocole de 1995 mentionne expressément « la responsabilité ultime de l'État dans les opérations du CDR ». Cela apparaît en toutes lettres dans un texte que l'État, signataire de ces instruments, a revendiqué. Comprenez donc que je ne puisse vous suivre dans ce débat. Quoi que l'on fasse – que nous subissions une condamnation judiciaire ou non –, l'État finit par être responsable de nos opérations. C'est le principe même qui a conduit à la constitution du CDR, adossé à l'État en novembre 1995 par l'EPFR. Ce n'est pas une découverte !

Pour ce qui est des contacts que j'aurais pu avoir, je serai franc : vous devinez bien qu'un responsable d'entreprise publique ou un haut fonctionnaire ne vit pas dans une bulle. Il est évident qu'il a des discussions régulières avec certains responsables, à commencer par ceux de son ministère de tutelle, pour rendre compte de ses principales opérations. Plusieurs anciens membres du Gouvernement ici présents savent très bien ce dont je parle. C'est mon conseil d'administration qui a voté. La ministre, comme elle le revendique elle-même, a donné des instructions aux fonctionnaires qui votaient en son nom à l'EPFR. Ce n'est pas tout à fait la même chaîne de commandement. Tout le monde – y compris moi-même, sans doute – en profite, mais ce n'est pas tout à fait la même séquence, les mêmes moments et les mêmes effets.

En tout cas, le fait d'informer régulièrement les autorités de rattachement des principales affaires et de leur déroulement est naturel. Un responsable d'entreprise publique qui ne le ferait pas ne remplirait pas sa mission.

La question ne s'arrête pas à Adidas. Nous traitons aux États-Unis des affaires qui sont la queue de la comète d'Executive Life et qui représentent un enjeu d'un milliard de dollars. Imagine-t-on que je n'en informe pas régulièrement mes autorités de tutelle ? Lorsque, dans le cadre de l'Entreprise minière et chimique, je vends des sociétés au Vietnam ou lorsque je rencontre le premier ministre de ce pays au sujet d'un port en eaux profondes dont les Vietnamiens pourraient faire un enjeu de crispation diplomatique, il est évident et normal que j'en fasse le compte rendu aux autorités de l'État.

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