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Intervention de Jean-François Rocchi

Réunion du 3 septembre 2008 à 14h45
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Jean-François Rocchi :

On les commentera après si vous le voulez.

La sentence prononcée, restait à savoir si le CDR faisait ou non un recours en annulation. L'article 1484 du nouveau code de procédure civile nous permettait de saisir la Cour d'appel de Paris soit sur le motif de la violation de l'ordre public, soit sur celui - puisque les autres motifs n'étaient pas en cause ; le tribunal avait, notamment, correctement composé les motifs de forme – du dépassement par les arbitres de leur mission. Il importait de vérifier si, en prononçant cette condamnation, les arbitres avaient ou non respecté l'arrêt de la Cour de cassation comme ils y étaient tenus par le compromis. La question a été soulevée devant les conseils d'administration qui l'ont étudiée avec méticulosité. Le conseil d'administration du CDR s'est réuni trois fois. Et nous avons consulté plusieurs avocats.

Le sujet étant complexe, je ne peux le détailler en quelques minutes. Les consultations ne nous ont pas donné l'impression de pouvoir parvenir à un consensus. Certains juristes estimaient que nous avions des chances raisonnables ou absolues. D'autres s'en tenaient à des « peut-être ben que oui, peut-être ben que non ». D'autres encore nous disaient que nous n'avions aucune chance. Cette pluralité d'opinions nous a quelque peu embarrassés. La question qui se posait à nous, dès lors, était de savoir si, comme certains nous y incitaient, nous devions et pouvions faire ce que j'appellerai un recours de précaution, ou un recours pour voir, ou un recours au cas où. C'était tentant, et possible. Mais il faut savoir que, si nous l'avions fait, il est assez probable que nous serions allés au-devant d'une nouvelle défaite judiciaire. Nous aurions également eu des phénomènes indésirables à effet immédiat. Les liquidateurs du groupe Tapie nous proposaient des modalités d'exécution de la sentence assez accommodantes pour l'État et le CDR, à savoir un paiement dans un délai différé, sans calcul d'intérêts. Par ailleurs, au moment où la sentence est parue, l'arbitrage n'était pas clos. Il ne l'est d'ailleurs toujours pas. Ce n'est qu'une première sentence, un certain nombre de sujets – fiscaux ou de calcul d'intérêt – ayant été renvoyés à plus tard. La sentence étant revêtue de l'exécution provisoire, les liquidateurs pouvaient nous demander de payer la totalité tout de suite, ce qui nous aurait été extrêmement préjudiciable. Lorsque nous avons évoqué l'éventualité d'un recours, les liquidateurs nous ont menacés de nous appliquer un certain nombre de mauvais traitements. En revanche, si nous y renoncions, ils se sont déclarés prêts à nous faire des concessions. Je ne peux pas en donner le détail car certaines vont peser sur la suite de la procédure et le tribunal arbitral n'en est pas encore saisi officiellement. Je ne veux pas paraître enfreindre la confidentialité de ses travaux. Je me bornerai à indiquer que l'adversaire renoncerait à certaines demandes qu'il avait présentées, ce qui représenterait un avantage économique pour nous. J'ai chiffré la totalité des renonciations des liquidateurs dans cette lettre à 70 millions d'euros.

Compte tenu de l'incertitude juridique d'un côté, et des concessions consenties de l'autre, le conseil d'administration du CDR a estimé, par trois voix sur cinq, qu'il ne pouvait pas faire de recours.

Le débat s'est alors porté devant l'EPFR, dont le conseil d'administration, par quatre voix sur cinq, a validé la position du CDR.

Voilà où nous en sommes.

Bien que j'aie conscience d'avoir déjà parlé trop longtemps, je souhaite m'attarder quelques instants sur un point qui a été soulevé ce matin, à savoir la légalité de la procédure.

Premièrement, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, l'arbitrage dont il est question prend sa racine dans le nouveau code de procédure civile, qui y consacre de longs développements. Ce n'est donc pas une procédure improvisée.

Deuxièmement, le CDR étant une société anonyme, régie par le droit commercial, elle a tout à fait le droit de recourir à l'arbitrage, surtout sur un sujet de matière commerciale. Ce n'est pas d'un usage très courant mais ce n'est pas pour autant rare.

La question soulevée ce matin était de savoir si le CDR, détenu à 100 % par un établissement public administratif, avait le droit d'aller à l'arbitrage ou non. Je rappelle que ce n'est pas l'EPFR qui est partie, c'est le CDR. L'EPFR intervient dans un mécanisme de garantie générale, posée par le protocole de 1995 et mentionnée, d'une certaine manière, dans la loi de 1995 elle-même. Il n'y a pas, à ma connaissance, de principe général et absolu interdisant à une filiale d'un établissement public administratif de se porter à l'arbitrage. D'ailleurs, le CDR a engagé ou a été défendeur dans sept arbitrages depuis sa fondation, dont certains fort lourds. L'un portait sur 1,7 milliard de francs. Ce n'était pas une mince affaire. Si l'on avait décelé une impossibilité pour lui de le faire du fait qu'il est détenu par l'EPFR, je pense que ce point aurait été soulevé bien avant.

Le Président Didier Migaud : Le CDR se porte à l'arbitrage y compris dans les affaires franco-françaises ?

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