En préambule, je tiens à couper court à toute rumeur : le ministère du budget n'est en aucun cas à l'origine du report de la discussion parlementaire du projet de loi.
Nous consacrons un effort financier très important à la défense, deuxième budget de l'État. La France est l'un des pays développés dans lequel l'effort de défense est le plus significatif : il est équivalent à celui du Royaume-Uni et supérieur à celui de l'Allemagne. Cet effort nous permet de rester l'une des principales puissances mondiales dotée d'une capacité militaire globale, ce qui nous confère une force diplomatique considérable. Je considère en effet que la souveraineté s'exerce à la fois par l'armée et par l'autonomie financière, les deux allant de pair.
L'État n'a jamais consacré autant d'argent à sa défense : hors impact de l'inflation et hors pensions, 185 milliards d'euros sont ainsi programmés pour les six prochaines années. Cet effort est d'autant plus considérable qu'il s'effectue dans un contexte financier difficile.
Vous souhaitez que nous parlions des recettes extrabudgétaires, je le sais, mais je commencerai par aborder le volet budgétaire qui pèse considérablement.
Hors effet du plan de relance, entre 2008 et 2011, alors que les budgets de l'ensemble des ministères sont stabilisés en valeur, celui de la défense augmentera de 1,1 milliard d'euros. En clair, cette progression des crédits est financée par des économies d'un même montant sur les budgets des ministères civils. De plus, la défense bénéficiera de 3,5 milliards d'euros de recettes exceptionnelles entre 2009 et 2011, complétés de 200 millions d'euros d'ici à 2014. C'est donc clairement notre priorité budgétaire, avec la recherche et l'enseignement supérieur.
Le plan de relance accentue encore cet effort : le profil de la dépense d'équipement sera accéléré à hauteur de 1,7 milliard d'euros, dont 1 milliard d'euros au titre de 2009 et 700 millions d'euros au titre de 2010.
Au total, le budget de la défense augmente donc en 2009 de 10 % hors pensions. Aucun ministère ne connaît une telle progression. Cet effort financier est crédible parce qu'il a été construit en cohérence avec le reste du budget de l'État, programmé pour la première fois sur une période trisannuelle, courant de 2009 à 2011. Les augmentations de crédits du ministère de la défense pour 2010 et 2011 sont d'ores et déjà prévues dans les équations budgétaires de l'État ; ces orientations ont d'ailleurs été confirmées par le Premier ministre dans ses dernières lettres de cadrage.
Cet effort se fonde sur des hypothèses très prudentes. Nous anticipons un prix du baril de pétrole de 95 dollars ; si ce prix s'éloignait sensiblement et durablement du cours prévu à la hausse, un mécanisme d'abondement des crédits prévus pour le carburant serait activé.
Les OPEX sont budgétisées de manière transparente et sincère : le niveau de budgétisation initial est porté de 460 millions en 2008 à 630 millions en 2011, alors que cette provision n'était que de 100 millions en 2005. En outre, vous savez bien que lorsque le contexte l'exige, les crédits dans ce domaine sont augmentés.
En contrepartie de ces moyens importants, la défense se réformera profondément, en s'appuyant sur les conclusions concordantes, d'une part, du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale et, d'autre part, de la révision générale des politiques publiques (RGPP).
Tout d'abord, s'agissant des aspects opérationnels, le Livre blanc constitue le socle de la nouvelle stratégie de défense et de sécurité de la France jusqu'en 2025. Il prévoit à la fois l'amélioration de la disponibilité et la modernisation des équipements de nos forces. Il a conduit à redéfinir le format des forces armées en fonction des nouveaux objectifs opérationnels. Et, en la matière, la nécessité stratégique a primé les considérations budgétaires. Cela a conduit le Président de la République à attribuer à la défense une enveloppe globale de 377 milliards d'euros d'ici à 2020.
Ensuite, la RGPP, à travers une série de décisions complémentaires au Livre blanc a permis de revoir l'organisation du soutien dans les armées qui mobilise plus de 50 % des effectifs. Après la professionnalisation des hommes, c'est donc celle des organismes qui est engagée. Cette seconde étape de transformation se concrétisera notamment par la création de quelque 90 bases de défense et la mise sur pied d'un service interarmées de soutien. Elle passera par la mutualisation et la rationalisation des fonctions d'administration et de soutien, jusqu'alors assumées par chacune des armées, ainsi que par un resserrement de la carte militaire, au bénéfice de l'activité opérationnelle. Ces bases de défense sont en pleine expérimentation. Leur calendrier d'extension est en cours de définition mais vous savez que le ministère de la défense souhaite être offensif sur ce sujet.
On peut ainsi espérer gagner 1,5 milliard d'euros par an à l'horizon de la réforme, qui seront intégralement affectés à l'amélioration de la condition du personnel et à la modernisation des équipements : 100 % des économies réalisées seront conservées par le ministère de la défense, ce qui est unique au sein de l'État.
Grâce aux réductions d'emplois programmées, 46 000 sur la période de programmation et 54 000 au total, la masse salariale baissera. Grâce aux efforts de rationalisation, les dépenses de fonctionnement seront maîtrisées, tandis que les dépenses d'équipement augmenteront très fortement, passant de 15,4 milliards d'euros en 2008 à 18 milliards d'euros en 2014, avec une moyenne de 16,9 milliards d'euros sur les six exercices de la programmation. Ces dépenses représenteront au final 101 milliards d'euros sur un total de 185 milliards d'euros, soit une augmentation extrêmement importante par rapport à la précédente LPM qui programmait 92 milliards d'euros de dépenses d'équipement, étant entendu qu'il s'agit d'euros 2008.
J'en viens maintenant aux recettes extrabudgétaires. La LPM prévoit que le ministère de la défense perçoive 3,7 milliards de ressources exceptionnelles, pour l'essentiel concentrées sur la période 2009-2011. En 2009, 1,6 milliard d'euros sont prévus ; ils se décomposent en, d'une part, 600 millions d'euros pour compenser les effets d'une inflation estimée à 2 %, alors que notre prévision est à l'heure actuelle de 0,4 %, et, d'autre part, un milliard d'euros pour financer le pic de besoins de paiement sur les dépenses d'équipement, ce que l'on appelle la « bosse de paiement ». Par ailleurs, dans le cadre du plan de relance, le ministère de la défense bénéficiera en 2009 d'un report de crédits de 500 millions d'euros pour accélérer ses paiements.
Cette somme de 1,6 milliard d'euros sera financée pour 1 milliard par la cession de biens immobiliers et pour 600 millions par celle de fréquences.
J'ai pris personnellement à bras-le-corps le sujet de l'immobilier qui relève de mon champ de compétences afin de réaliser les recettes exceptionnelles prévues dans le budget de la défense. Le ministre de la défense a déclaré à plusieurs reprises qu'il jugeait ces cessions parfaitement légitimes : dès lors que la défense bénéficie d'un effort financier sans précédent de la Nation, il est normal qu'elle y contribue en abandonnant certains bâtiments qu'elle occupe. De plus, j'ai accepté, à sa demande, d'assouplir les règles de gestion du compte d'affectation spéciale (CAS) « Immobilier » et de lui garantir un retour du produit des cessions à 100 % pour la durée de la LPM.
Fin février, nous avons déjà signé un contrat de bail de dix ans avec la société nationale immobilière (SNI) pour les 11 000 logements domaniaux. Ce dispositif garantit que la défense pourra continuer à disposer de ces logements au profit de ses personnels, ce qui est indispensable pour accompagner ses restructurations. Il en améliore considérablement les conditions d'utilisation par rapport à la précédente convention établie en 1972 qui garantissait une rente au gestionnaire du parc. Je ne prendrai qu'un exemple : auparavant, le coût de l'entretien était entièrement payé par l'État, avec des frais complémentaires de 8 % ; il est désormais partagé, dans les conditions du code civil, entre l'État et le preneur à bail, ce qui représente à peu près 40 % pour l'État et 60 % pour la SNI et l'occupant. Cette seule opération a généré 221 millions d'euros, encaissés au profit de la défense, en totale cohérence avec les prévisions de la LPM. Si on y ajoute des reports de 86 millions d'euros, la défense dispose d'ores et déjà de 307 millions d'euros pour ses dépenses d'infrastructures en 2009, sans compter le plan de relance.
Il me semble donc que le ministère de la défense peut être relativement serein, il n'y pas de sujet d'inquiétude immédiat en ce qui concerne le financement de cette LPM.