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Intervention de Jacques Barrot

Réunion du 26 mai 2009 à 17h15
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Jacques Barrot :

SIS II, quand il sera opérationnel, doit être accessible à tous les services, y compris ceux de la préfecture du Nord, Monsieur Vanneste. Nous essayons de communautariser le Traité de Prüm, qui a été conclu entre quelques États membres seulement. Je me renseignerai sur les suites données à la réunion de novembre 2008.

Concernant les pays d'origine sûrs, nous sommes en train de modifier notre approche. La création d'un bureau d'appui a précisément pour objet d'abandonner ces distinguos, variables d'un État membre à l'autre. Les renseignements sur les pays d'origine ne doivent plus venir exclusivement des chancelleries et des diplomates, mais aussi des ONG, les organisations non gouvernementales, qui seront représentées dans le bureau d'appui. De même, pour les visas, nous voulons individualiser les dossiers et moins nous référer à la sécurité du pays concerné.

Les conditions d'accueil des demandeurs d'asile, dans certains centres de rétention, sont déplorables. L'instauration de compensations financières est le seul moyen de faire bouger les choses. Dans ce domaine, je dispose de 4 milliards d'euros de crédits, qui sont totalement utilisés : 1,5 milliard est destiné aux opérations de retour, le reste est affecté à l'intégration des immigrés et à l'accueil des réfugiés. Pour que l'Europe mène une vraie politique solidaire, le prochain budget devra être encore plus généreux.

Il n'est pas question que l'Europe externalise l'instruction des demandes d'asile. Cependant, à l'heure actuelle, un Somalien ou un Érythréen ne peut formuler sa demande d'asile que lorsqu'il parvient jusqu'aux cotes nord de la Méditerranée. Pour assécher les flux d'immigrants irréguliers, il faut que je parvienne, avec le Haut commissariat pour les réfugiés, à créer au sud de la Méditerranée des points d'accueil des demandeurs d'asile.

Si la Grande-Bretagne entrait dans Schengen, M. Delebarre, la situation serait plus simple, mais la probabilité en est faible. J'ai réclamé qu'un centre d'accueil soit ouvert à Calais pour les demandeurs d'asile, qui y sont peu nombreux et doivent être protégés. J'ai aussi essayé de convaincre le Royaume-Uni de partager l'effort d'accueil mais c'est très difficile. Si l'Europe n'apporte pas une réponse solidaire, elle ne s'en sortira pas.

En droit pénal, il faudrait que nous nous mettions d'accord, par exemple, sur les définitions des faits criminels les plus graves.

J'exerce notamment mon magistère en Roumanie et en Bulgarie, où mes visites ne sont guère prisées. Elles sont encore plus redoutées en Croatie et dans les autres pays candidats, auxquels je dis qu'ils ne pourront entrer dans l'Union européenne tant qu'elle n'y verra pas clair dans leur système judiciaire. Une magistrature morale doit s'exercer : je suis peut-être le commissaire le plus honni des gouvernements, mais aussi le plus apprécié des populations, qui ont une attente de justice très forte.

Je ne peux répondre à la question sur mon avenir. J'aime beaucoup travailler en Europe, mais vous n'avez pas le pouvoir de nommer les commissaires !

Les avocats français ont lancé l'idée d'un acte sous seing juridique. Je leur conseille de ne pas toucher à ce qui fait l'une des forces du droit continental : l'acte authentique. Quant aux notaires, ils ne doivent pas revendiquer l'obligation de recourir à un acte authentique pour tout et rien. Il faut certes que ces professions évoluent, mais nous devons maintenir la subsidiarité, laisser aux États membres un droit de regard sur leurs systèmes judiciaires et l'organisation de leurs services juridiques ; l'Europe ne doit pas avoir la prétention de vouloir faire marcher au pas toutes les professions juridiques. Cela étant, il faut amener les professionnels à se former un peu plus entre Européens. C'est pourquoi nous tenons à la mise en place d'un Erasmus de la magistrature et de modules de formation auxquels pourront participer des magistrats, des notaires et des avocats.

Je dois m'assurer que tous les migrants, en situation régulière ou non, sont soignés. J'ai dû taper du poing sur la table pour retenir le gouvernement italien, qui voulait mettre en cause la liberté du médecin de ne pas dénoncer ses patients. La directive retour, adoptée avant mon entrée en fonctions, a été un peu diabolisée par les ONG, mais elle me permet d'aller observer ce qui se passe dans les camps de rétention, ce que je m'efforce de faire lors de mes déplacements. Cette directive autorise une durée de rétention de dix-huit mois ; lorsque les parlementaires français la transposeront, je les invite à ne pas utiliser cette possibilité pour allonger la durée en vigueur. Dans l'avenir, nous serons très durement confrontés aux problèmes humains liés aux migrations, que mettent en évidence (fût-ce avec des biais un peu idéologiques) des films terribles comme Welcome ou Le silence de Lorna. La concertation avec les États d'origine est indispensable, mais il est très dur de signer des accords de réadmission car les fonds versés par l'Union européenne ne compenseront jamais les sommes virées par les migrants : nous donnons 30 milliards aux pays africains alors que les immigrés africains versent 80 milliards.

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