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Intervention de Catherine Lemorton

Réunion du 10 décembre 2008 à 16h30
Commission des affaires culturelles, familiales et sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Lemorton :

Le constat selon lequel il est impératif de lutter contre l'échec en fin de première année de médecine est partagé par tout le monde. Néanmoins, je m'interroge sur les motifs avancés pour cette proposition de loi. D'une part, on juge utile que les futurs professionnels de santé partagent un enseignement commun en première année ; cette analyse me semble fausse : partager des enseignements dès la première année me paraît largement prématuré et il serait beaucoup plus utile de mettre en place des enseignements communs vers la 4e ou la 5e année d'études, à un moment où chacun a commencé à développer des spécialités dont la confrontation peut être profitable à tous. D'autre part, cette proposition prétend lutter contre les inégalités géographiques de répartition de l'offre de soins : il s'agit d'un simple effet d'annonce, rien dans cette proposition ne permettant d'atteindre cet objectif.

Cette proposition manque aussi d'ambition : elle ne fait aucune place aux nouveaux métiers de la santé, comme celui d'éducateur en santé, que le projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatifs aux patients, à la santé et aux territoires vise pourtant à développer.

S'agissant des passerelles envisagées pour permettre l'arrivée dans les études médicales d'étudiants venant d'autres horizons, cela me semble être une bonne idée mais il est regrettable que rien ne soit prévu pour les étudiants en médecine qui s'arrêtent en 3e ou 4e année et doivent repartir au niveau post-bac. En fait, cette proposition pose beaucoup de questions car elle reste excessivement floue. S'agissant des conditions d'études et de l'accompagnement des étudiants, rien n'est dit quant à l'existence de travaux dirigés ; concernant la réorientation vers les facultés de sciences, pourquoi ne pas envisager de l'étendre aux facultés de sciences humaines et sociales ?

Concernant ce que j'appellerais la « sanction » envisagée dès la fin du premier semestre, il s'agit d'un signe très négatif adressé aux étudiants : un étudiant sanctionné dès le premier semestre sera obligé de poursuivre ses études dans une faculté de sciences avant de pouvoir éventuellement se réinscrire en première année d'études de santé un an et demi plus tard. Compte tenu de la nécessité largement reconnue de faire appel à des cours privés particulièrement onéreux pour préparer le concours, on risque d'ajouter à la sanction éducative une sanction sociale. On peut de plus s'interroger sur la capacité des facultés de sciences d'accueillir ainsi les étudiants en cours d'année.

Par ailleurs, il est envisagé de développer l'utilisation des nouvelles technologies (CD-ROM, visioconférences…) pour assurer certains enseignements spécifiques quand ceux-ci ne sont pas disponibles sur le lieu d'enseignement ; je m'interroge sur ces nouvelles modalités d'enseignement dont l'efficacité est très discutable. Il conviendrait plutôt de développer le tutorat, qui permettrait en outre de répondre aux problèmes posés par l'existence de cours privés particuliers.

S'agissant des étudiants en pharmacie, leur programme de première année est aujourd'hui directement adapté à leur concours et contient un certain nombre d'enseignements fondamentaux en pharmacie : ainsi dès leur stage de fin de première année en officine, on constate que ces étudiants possèdent déjà certaines bases qui les rendent opérationnels. Les conditions d'études en pharmacie sont moins insatisfaisantes que pour les études de médecine. En l'absence d'assurance quant aux moyens logistiques, financiers et humains prévus pour la mise en oeuvre de cette nouvelle première année, on peut comprendre l'inquiétude de ces étudiants qui n'ont en outre pas ou peu été consultés pour la préparation de cette proposition de loi.

En conclusion, cette proposition répond à une motivation juste mais n'est pas à la hauteur des enjeux et risque de continuer de créer des frustrations importantes parmi les étudiants. Ainsi l'idée d'un concours commun avec des coefficients variables en fonction de la spécialité choisie risque de mettre certains étudiants face à des choix cornéliens et de les engager dans des filières qui n'auraient pas leur préférence.

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