Cette opération nous laisse plutôt un mauvais souvenir, même si nous sommes plutôt confiants quant aux perspectives à long terme de cette belle entreprise stratégique pour la France comme pour l'Europe. Il ne faut pas oublier qu'au moment de cette affaire, nous étions engagés dans une bataille avec la CNCE, dans laquelle nous avons d'ailleurs bénéficié de l'appui de votre commission des finances.
Dans cette opération, IXIS n'est pas une banque conseil, mais une banque intermédiaire. Nous avons eu des liens avec cette banque qui s'est développée au sein de la Caisse, mais qui ne se situe plus aujourd'hui dans le groupe. C'est donc IXIS qui est intervenue à partir du 15 janvier, avec Lazard. Plus rien ne s'est ensuite passé avant le 15 mars. Nous n'avons eu de contacts ni avec l'équipe opérationnelle de Lagardère ni avec l'équipe d'EADS.
Nous n'avons mandaté ni PJ Morgan, ni Morgan Stanley spécialement ; les notes des deux établissements mentionnés nous ont été fournies, parmi d'autres. Nos équipes de gestion ont étudié cette valeur, regardant l'ensemble de la littérature des analystes, le consensus, la moyenne, la dispersion, la structure et les perspectives financières de l'entreprise, et tous les commentaires sur EADS. C'est sur cette base que nous avons pensé pouvoir réaliser l'opération, pour des raisons stratégiques mais aussi financières, car nous nous préoccupons bien évidemment de notre intérêt patrimonial, notamment de long terme. Les analystes concluaient plutôt positivement. L'information sur les six mois de retard de l'A380 était parue dans la presse et connue des marchés, mais les problèmes de conception et de livraison de l'A350 et les nouveaux retards sur l'A380 n'ont été révélés que quelques semaines plus tard.
S'agissant des mécanismes assez particuliers et complexes mis en oeuvre, il ne faut pas oublier qu'il s'agit d'abord d'une opération entre Lagardère et IXIS. Lagardère émet des ORAPA (obligations remboursables en actions), qui sont souscrites par la banque, il touche le cash, il paie le coupon et il rembourse en trois tranches annuelles en actions. Il s'est agi en l'occurrence d'une opération de produits structurés, dans laquelle Lagardère a été intéressé à une hausse éventuelle des titres. Néanmoins, ce mécanisme n'est pas gratuit : la banque fait payer à l'émetteur le risque qu'elle prend en l'intéressant. Tout cela ne concerne ni la CDC ni les autres investisseurs.
Ce qui nous concerne, en revanche, c'est que, dans la mesure où il y a des obligations remboursables en trois tranches annuelles, nous sommes saisis d'une vente à terme : la banque, pour couvrir une partie de son risque, doit céder une grande partie des actions qu'elle reçoit le jour de l'opération. Pour notre part, nous avons simplement pris le risque que l'on prend dès lors que l'on achète une action, quelle qu'elle soit. Dès lors, qu'on achète au comptant ou à terme, ce risque est le même. Acheter à terme ne pose pas de problème particulier à la Caisse, qui a un horizon de détention long et qui a, en outre, bien négocié les conditions avec la banque. Dans l'achat à terme, on achète une action au comptant, sur la base du prix du marché, on paie un coût de portage puisqu'on n'a pas à déboucler la trésorerie, on enlève les dividendes et on retire aussi une commission que l'on a très bien négociée. Aujourd'hui, au regard de l'évolution des taux d'intérêt et le taux de cette commission, ces conditions nous ont permis d'obtenir un produit financier non négligeable.
Le Rapporteur général : Est-ce Lagardère qui a choisi IXIS ?