Je parle d'instructions et d'orientations.
Par ailleurs, pour les raisons qu'a indiquées le directeur général, nous n'avons pas souhaité informer l'État de cette opération. Tout simplement parce que nous étions avec d'autres investisseurs dans une opération de marché sur une société cotée. Dans quelle situation serions-nous aujourd'hui, l'État comme nous, si nous l'avions informé ? Il eut été très dangereux que l'État donnât un conseil à la Caisse des dépôts et pas aux autres investisseurs. En effet, même si la Caisse est une institution publique, elle est aussi un investisseur institutionnel, qui agit en conformité avec les règles boursières dont on sait qu'elles sont très exigeantes - j'espère que les conclusions des enquêtes en cours le confirmeront...
L'exigence de confidentialité était totale. Au sein de la Caisse, j'ai pris avec mes équipes le maximum de précautions, c'est pour cela que nous n'étions pas très nombreux à être informés et que nous n'en avons parlé qu'au dernier moment au président de la commission de surveillance.
Je réaffirme donc avec force que nous n'avons pas reçu d'instruction et que nous n'avons jamais informé l'État. Je crois que c'était bien comme cela.
Le Rapporteur général : Ces exposés très clairs montrent la cohérence de l'investissement de la Caisse dans EADS par rapport à sa politique générale d'investissement stratégiques.
Il apparaît par ailleurs que, compte tenu de ses dates de réunion et des informations dont elle disposait aux différentes étapes, la commission de surveillance a parfaitement rempli sa mission. La note très claire de M. Heriaud en témoigne : la commission a été informée pour la première fois lors de sa réunion du 5 avril et elle a réagi extrêmement rapidement par rapport à la dégradation du cours de bourse. Le seul point sur lequel on peut donc faire des observations est l'articulation entre le fonctionnement et les responsabilités de la commission de surveillance et ceux de la direction générale. La suggestion de créer un comité d'investissement pour que la commission de surveillance se prononce préalablement sur ces décisions d'investissement paraît donc bonne.
En effet, lorsque la commission est informée pour la première fois le 5 avril, le montage est totalement bouclé depuis la lettre d'engagement du 28 mars et la décision est en fait prise. Cet engagement achève un processus engagé par la direction générale dès le mois de janvier et qui conduit à un accord d'une très grande complexité. Je souhaiterais savoir à ce propos quelle a été exactement l'articulation entre IXIS, qui était encore il y a peu une filiale de la Caisse, et son client CDC.
Le contrat passé avec Lagardère est très intéressant pour ce dernier, qu'il garantit contre d'éventuelles baisses du marché, le paiement se faisant par échange d'obligations sur trois ans avec une garantie du prix de référence à chacune des échéances annuelles et avec révision à la hausse si jamais le prix devait passer au-delà de 32,70 euros, dans une limite de 115 %. Cela permet également de toucher les dividendes tant que les actions n'ont pas été échangées. L'aspect fiscal était aussi intéressant puisque 2007 est la première année d'exonération totale, après l'exonération progressive des plus-values sur les titres de participation que nous avons adoptée il y a quatre ans.
Cette cession a donc fait l'objet d'un processus très approfondi. L'audition qui s'est tenue au Sénat vendredi dernier a montré qu'une réunion officielle a eu lieu à la direction du Trésor le 20 mars pour examiner les conditions d'une cession par EADS et Lagardère à d'éventuels preneurs. Or c'est huit jours plus tard qu'a été signée la lettre d'engagement…
Il est évident que l'État, en tant que membre de la commission de surveillance, a bénéficié des mêmes informations a posteriori que celles qu'a évoquées Philippe Auberger. En revanche, dans le processus en amont, comment imaginer que l'État n'ait pas été tenu au courant ?