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Intervention de Jean-Jacques Urvoas

Réunion du 20 mai 2009 à 10h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Jacques Urvoas :

Sachant que la réorganisation prévue est effective depuis le 1er janvier, on peut également se poser quelques questions sur la pertinence de ce texte.

En revanche, je trouve heureux que le Sénat ait simplifié le titre initialement prévu – « dispositions diverses relatives à la gendarmerie » – en supprimant l'adjectif « diverses ». En effet, autant appeler les choses par leur nom : il s'agit d'une loi sur la gendarmerie, ce qui n'est pas rien, car la dernière en date été adoptée en 1798. Un décret est ensuite intervenu en 1903 pour définir les missions et l'organisation de la gendarmerie.

D'un point de vue strictement juridique, il serait d'ailleurs possible d'en rester au statu quo : la question de l'emploi des forces de gendarmerie sous l'autorité du ministère de l'intérieur a été réglée depuis le décret du 15 mai 2002, et la LOLF a permis de régler tous les problèmes budgétaires. Au demeurant, les armées se sentent si peu impliquées par ce texte que leur ministre n'a pas jugé bon d'assister aux débats devant le Sénat.

Comme d'autres orateurs l'ont indiqué avant moi, ce projet de loi est l'aboutissement d'un long processus. Je pense d'ailleurs qu'il faut remonter à 1995 : Charles Pasqua, ministre de l'Intérieur, avait alors décidé de militariser symboliquement la police en modifiant les grades et les uniformes, et prévu, pour la première fois, une subordination des gendarmes aux préfets. Ce texte organise aujourd'hui le rattachement organique de la gendarmerie au ministère de l'intérieur, solution à laquelle Mme Alliot-Marie s'opposait lorsqu'elle était en charge de la défense.

Cette évolution est-elle un point de non-retour ? C'est fort possible, car la mutualisation des moyens, le regroupement de certaines fonctions et l'uniformisation qui en découle me semblent irréversibles. À terme, aucune des deux institutions ne pourra plus opérer de façon autonome. Nous nous acheminons donc vers une fusion de la gendarmerie au sein de la police, et on peut légitimement se demander si les gendarmes pourront continuer à être des militaires.

Le rattachement organique de la gendarmerie au ministère de l'intérieur fait également courir le risque d'une transformation subreptice des tâches : la gendarmerie pourrait être cantonnée à des missions de police locale, tandis que les missions les plus nobles reviendraient à la police nationale. J'observe d'ailleurs qu'aucune des sous-directions de la nouvelle Direction centrale du renseignement intérieur n'a été confiée à un gendarme, que tous les préfets délégués pour la sécurité et la défense sont des commissaires de police et que le service de protection des hautes personnalités n'est composé que de policiers.

Enfin, je rappelle que les effectifs de la gendarmerie ne devraient plus s'élever qu'à 96 926 postes budgétaires en 2013, ce qui revient à annuler toutes les créations de postes prévues par la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure de 2002.

En dernier lieu, je m'interroge sur la place des préfets dans la chaîne de commandement : ce projet de loi leur confiant une autorité sur les services de gendarmerie, que deviendront les commandements régionaux ? On peut regretter que les amendements déposés par le rapporteur ne clarifient pas cette question.

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