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Intervention de Jacques Desallangre

Réunion du 11 juin 2008 à 16h00
Délégation pour l’union européenne

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Desallangre :

, bien que se déclarant eurosceptique, s'est félicité du texte de la proposition de résolution avec lequel il a marqué son plein accord, car il ne cède pas, selon lui, au dogme de la concurrence libre et non faussée qui débouche, dans les faits, sur une concurrence sauvage, à l'image du « renard libre dans le poulailler libre ».

Il a dit apprécier que la proposition considère la politique agricole commune comme constituant un des éléments structurants de la construction européenne, qu'elle préconise le maintien de l'agriculture sur l'ensemble des territoires et qu'elle exige le maintien des quotas laitiers, à défaut de leur remplacement, en 2015 par un système rénové de gestion de l'offre. Sur ce dernier point, M. Jacques Desallangre y a vu l'illustration d'une politique volontariste.

Il a souhaité obtenir du rapporteur des précisions en ce qui concerne les suites possibles des discussions du cycle de Doha et sa position sur les biocarburants qui apparaissent désormais comme un facteur de l'actuelle crise alimentaire.

Le Président Pierre Lequiller s'est enquis de l'avenir du secteur des fruits et légumes, d'une part, et de celui de la viticulture, d'autre part.

Le rapporteur a apporté les précisions suivantes :

- s'agissant du cycle de Doha et de l'OMC, il serait souhaitable de parvenir à un accord équilibré mais pas à n'importe quel prix. A la différence d'une opinion dominante, l'échec des discussions du cycle de Doha n'entraînera pas un effondrement du système économique international. Il s'agit là d'un « bluff », d'autant que les négociations ont commencé il y a dix ans, c'est-à-dire antérieurement à la crise des subprimes qui n'a rien à voir avec le cycle de Doha. Il importe par ailleurs de refuser tout terrorisme intellectuel, dont le but est de contraindre l'Union européenne à accepter n'importe quel compromis par peur d'être accusée d'un échec éventuel des discussions. A cet égard, on ne peut que s'opposer au procès d'intention résultant des propos récents de M. Pascal Lamy, directeur général de l'OMC, selon lesquels l'échec des négociations signifierait le refus du libéralisme et donc une attitude xénophobe. On peut être contre les discussions du cycle de Doha sans pour autant être taxé de xénophobe ni s'interdire de formuler des interrogations sur la mondialisation.

En 2003, l'Union européenne a procédé à une réforme profonde de la PAC au terme de laquelle elle a découplé massivement les aides, de telle sorte que l'essentiel de sa politique entrerait dans les « boîtes vertes » de l'OMC, à la différence des Etats-Unis. En outre, le Congrès américain a adopté, malgré un veto – inopérant – de l'exécutif, le Farm Bill, qui va parfaitement à l'encontre des orientations du cycle de Doha.

Pour ce qui est du Canada, où le groupe de travail s'est déplacé, coexistent des productions mondialisées et des productions protégées, comme la production laitière qui fait l'objet d'une gestion de l'offre et d'une politique de soutien par les prix. En dépit de l'appartenance du Canada au groupe de Cairns, le ministre de l'agriculture de ce pays a déclaré au groupe de travail qu'il ne sacrifierait aucun de ces soutiens dans les négociations du cycle de Doha.

En conclusion, on ne peut reprocher au directeur général de l'OMC ni au représentant de l'Union européenne leur volonté de voir aboutir le cycle de Doha, parce qu'il existe une « téléologie » administrative et institutionnelle en faveur d'une telle orientation, à laquelle on peut toutefois s'opposer. L'OMC marque certes un progrès par rapport au passé grâce à l'existence d'un organe de règlement des différends, mais il constitue seulement un outil et pas une fin, tandis que le contenu des accords discutés en son sein doit être examiné attentivement ;

- en ce qui concerne les biocarburants, on est passé d'un extrême à l'autre puisqu'hier ils étaient regardés comme une solution alors qu'aujourd'hui, ils sont diabolisés. On doit se départir de positions aussi extrémistes et examiner leur rôle du point de vue de l'agriculture et de l'environnement. A cet égard, il convient de distinguer le maïs américain et la canne à sucre brésilienne. Le premier a des effets déstabilisateurs sur les marchés mondiaux, en particulier en contribuant à la hausse des cours au sein de l'ALENA, au Mexique et au Canada. En revanche, la canne à sucre brésilienne est certes critiquable sur le plan environnemental car elle est accusée d'aggraver la déforestation, mais elle ne peut être considérée comme un facteur de déstabilisation des marchés mondiaux ;

- en ce qui concerne les fruits et légumes et la viticulture : l'OCM fruits et légumes est très faible et ne comprend pas de subventions en faveur de ce secteur, la situation est donc variable selon les pays membres. En ce qui concerne la France, l'offre est atomisée, ce qui débouche sur un face à face entre les agriculteurs et la distribution, problématique dont le Parlement discute actuellement à travers le projet de loi de modernisation de l'économie. A la faveur de l'évolution de l'article 69 du règlement (CE) n° 17822003, il se peut que le secteur puisse bénéficier d'un soutien renforcé.

La situation de la viticulture a été examinée récemment par la Délégation pour l'Union européenne à travers un rapport de notre collègue Thierry Mariani. C'est un secteur qui n'a jamais été aidé en tant que tel en dehors de la gestion de la distillation en période de crise. En outre, comme le lait, ce secteur repose sur une gestion de l'offre en amont et sur des quotas de plantation, beaucoup plus contraignants que ceux qui existent aux Etats-Unis.

M. Daniel Fasquelle a exprimé son inquiétude sur la posture inconfortable des Européens dans les négociations internationales. En acceptant en 2001 l'agenda du nouveau cycle commercial, que le Commissaire européen en charge de la politique commerciale ait ou non outrepassé son mandat, l'Union n'a-t-elle pas souscrit implicitement à des objectifs de démantèlement des protections agricoles qui limitent étroitement les perspectives de relance de la politique agricole commune ?

Il a en outre regretté que l'on n'ait pas saisi la chance de la négociation du traité de Lisbonne pour redéfinir les objectifs de la PAC, notamment en posant clairement le principe de préférence communautaire dont la force et la portée juridique, jadis intouchables, se sont considérablement érodées ces dernières années.

Enfin, la PAC doit marcher sur ses deux jambes. Certes, la question de la production est incontournable. Mais l'aménagement du territoire est un objectif tout aussi impérieux. Or, force est de constater que la politique européenne de développement rural est perfectible, et n'intègre pas encore de manière satisfaisante l'ensemble des dimensions impliquées, en s'articulant plus clairement avec d'autres politiques tout aussi décisives. La politique touristique, par exemple, doit être puissamment encouragée pour jouer sur tous les atouts de notre monde rural.

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