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Intervention de Rachida Dati

Réunion du 9 décembre 2008 à 16h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Rachida Dati, garde des Sceaux, ministre de la justice :

La façon dont vous avez présenté l'application de la loi de 2007 appelle quelques précisions.

En cas de récidive, un magistrat peut fonder sa décision sur ce texte, mais aussi sur d'autres dispositions pénales, en fonction des éléments constitutifs de l'infraction. Dans cette hypothèse, on ne saurait parler de « contournement » ou de « détournement » de la loi. Tout démontre au contraire qu'elle est parfaitement adaptée et bien appliquée.

Je rappelle que cette loi traduit un engagement fort du Président de la République et qu'elle répond à une véritable attente des Français. Alors même que les cas de récidive augmentaient, il n'existait pas, jusqu'en 2007, de cadre juridique permettant de lutter contre ce phénomène en tant que tel. Nous devions par ailleurs restaurer l'autorité de la justice en veillant à la bonne application des peines.

S'agissant des statistiques, on avait constaté une augmentation de la délinquance de 17,8 % entre 1997 et 2002 – et même de 50 % pour les atteintes aux personnes et de 16,8 % pour la délinquance des mineurs. Dans le même temps, le nombre des condamnations a baissé de 11 % pour l'ensemble des délits, et de 5 % pour ceux commis par les mineurs. Sans que l'outil statistique change, la délinquance générale a ensuite diminué de 9,4 % de 2002 à 2007 ; les actes de délinquance commis par les mineurs ont en revanche crû de 12,9 % au cours de la même période.

Dans ce contexte, le Président de la République a décidé de prendre ses responsabilités en renforçant la protection des Français et en augmentant les sanctions applicables aux délinquants. Les réformes que nous menons depuis dix-huit mois reposent sur deux principes complémentaires : une politique pénale dont la fermeté est clairement assumée, mais aussi une politique d'humanité, visant en particulier à la réinsertion des personnes détenues, laquelle est également un instrument de lutte contre la récidive.

Le principe de fermeté est au coeur de cette loi, qui systématise notamment l'injonction de soins pour les délinquants sexuels, mais c'est également le fondement d'autres textes, comme celui sur la rétention de sûreté. En attendant l'élaboration d'un nouveau code de la justice pénale des mineurs, j'ai donné pour instruction au parquet d'apporter une réponse pénale à chaque infraction commise par un mineur. On constate déjà une augmentation du taux de réponse pénale, ainsi qu'une diminution de ce type de délinquance dans le ressort de certaines cours d'appel.

D'autre part, nous avons décidé qu'il n'y aurait plus de régulation de la population carcérale par l'intermédiaire des grâces collectives, des lois d'amnistie et des réductions de peines automatiques. Sur ce dernier point, je rappelle qu'auparavant les détenus savaient, dès leur entrée en prison, à quelle réduction de peine ils pouvaient prétendre même en l'absence de tout effort ou de garanties sérieuses de réinsertion.

Nous avons par ailleurs engagé une rénovation du parc pénitentiaire – plus de 3 000 places ont déjà été construites à ce jour –, mais aussi décidé la création d'établissements pour mineurs et institué un Contrôleur général des lieux de privation de liberté. En outre, vous débattrez bientôt de la future loi pénitentiaire, qui sera un texte fondateur.

Sans revenir sur le détail de la loi du 10 août 2007, je dirai que tout démontre qu'elle est largement appliquée par les magistrats en vue de lutter tant contre la récidive des majeurs que contre celle des mineurs, et cela bien que les juges conservent leur indépendance et qu'aucune peine automatique n'ait été instaurée. Lorsqu'un juge estime qu'une peine n'est pas adaptée, il reste en effet libre de ne pas la prononcer.

Alors que jusqu'à maintenant seule prévalait une règle générale de doublement des peines encourues en cas de récidive, les magistrats disposent désormais d'une base juridique très claire. En cas de vol simple, on risquait par exemple trois ans de prison, contre six en cas de récidive, mais le parquet ne savait pas systématiquement dans quel cas l'on se trouvait. Grâce à la nouvelle loi, ce n'est plus le cas.

Au 1er décembre 2008, les magistrats ont prononcé des peines plancher dans 50 % des 18 358 cas de récidive dont ils ont été saisis. Parmi les quelque 9 000 condamnations, le taux de peines de prison ferme s'élève à 37,4 %, et le taux d'appel du parquet à 9,2 %, soit près de deux fois plus que la moyenne en matière correctionnelle. Sur 360 mineurs jugés en état de récidive, 155 ont par ailleurs été condamnés à une peine plancher, ce qui correspond à un taux de 43,1 %.

La loi du 10 août 2007 me semble donc bien appliquée. M. Caresche semble regretter qu'elle ne le soit pas dans 100 % des cas, mais cela ne saurait être l'objectif d'un texte pénal…

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