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Intervention de Alain Néri

Réunion du 30 octobre 2008 à 9h00
Commission élargie

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Néri :

Monsieur le secrétaire d'État, votre conception du sport me surprend quelque peu. En effet, dans un entretien au journal L'Équipe, le 5 septembre 2008, vous présentiez une vision du sport selon laquelle il fallait « emprunter des idées au-delà des frontières de l'Hexagone et capter des financements au-delà des schémas traditionnels », ajoutant : « C'est le privé qui nous fera progresser. »

À moins que je ne me trompe, le sport est organisé sous la responsabilité de fédérations qui ont une mission de service public. Ainsi, s'il arrivait que des joueurs sélectionnés refusent de jouer en équipe de France, la fédération, qui régit l'équipe de France et distribue les licences, pourrait fort bien ne pas leur en accorder.

Dans un temps qui n'est pas si lointain, lorsque j'étais scolaire et étudiant, il fallait, pour jouer dans un club civil, accepter de jouer dans un club scolaire ou universitaire. Il est vrai que la pratique du sport était tout à fait différente, car on pouvait pratiquer, outre celle qui était privilégiée, différentes disciplines, ce qui créait entre sportifs un excellent esprit.

Comme tous les secrétaires d'État aux sports qui se succèdent, vous disposez d'un budget homéopathique – par comparaison surtout avec les sommes qui circulent dans le sport. Il y a trop d'argent dans le sport, et pas assez pour le sport. Aujourd'hui, certains envisagent une autre organisation du sport de haut niveau, où se multiplieraient et se généraliseraient les ligues fermées. On le voit bien dans le football ou le basket, certaines équipes ont l'assurance de jouer la coupe d'Europe même si elles ne sont pas championnes de France. Une telle organisation est étrangère à l'éthique du sport.

Vous avez indiqué que votre budget avait été élaboré dans un contexte de contrainte financière – et non de crise financière puisqu'il a été fixé bien avant celle-ci. Comme vous le soulignez à juste titre, dans une situation de contrainte financière, il faut se recentrer.

La loi votée à l'initiative de votre prédécesseur, M. Jean-François Lamour, qui prévoit le droit à l'image, a fait beaucoup de mal. Une fois de plus, elle bénéficie à ceux qui n'ont pas besoin d'argent, parce qu'ils touchent déjà des sommes formidables.

J'ai récemment inauguré les vestiaires-douches d'un club de chef-lieu de canton. La création de ces locaux était l'aboutissement d'un combat de vingt ans pour le président de ce club, devenu maire dans l'intervalle. L'investissement était de 230 000 euros. Or, deux jours auparavant, la première page de L'Équipe montrait trois photos de footballeurs – qui illustraient bien, d'ailleurs, que ce n'est pas l'argent qui fait la qualité, car le joueur du club de Famagouste, le moins bien payé, était précisément celui qui gagnait les matches. Parmi ces photos figurait également celle de M. Zenden. Je connais fort mal ce dernier, car il ne joue que dix à quinze minutes par match, mais j'observe que, toujours selon L'Équipe, il gagnerait 260 000 euros par mois, soit ce qu'il a fallu pour construire les vestiaires-douches de mon petit club !

Les premiers républicains avaient inscrit dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen que chacun doit participer aux dépenses de la nation en fonction de ses capacités. Nous sommes loin du compte. Il faut en finir avec le droit à l'image. Les 26 millions d'euros que vous y consacrez représentent presque le double de ce que vous consacrez aux associations d'éducation populaire. Il y a là un vrai choix de société.

Ma deuxième question consiste à savoir si M. Laporte abrogera la loi Lamour.

En effet, la loi supprime la cotisation que paient toutes les entreprises en matière de formation. Or qui a le plus besoin de formation sinon les jeunes ? Il serait normal que les clubs professionnels, qui sont des entreprises, participent comme les autres à la formation.

Les temps sont difficiles, l'argent sera plus rare. Il serait temps de le réorienter, en particulier en direction de ceux qui en ont le plus besoin. Je n'ai pas l'intention d'appauvrir les sportifs de haut niveau, mais les concernant la marge est grande. Et, si je devais sortir mon mouchoir pour pleurer, ce serait plutôt en pensant à nos concitoyens qui vont être licenciés dans les prochains jours.

Vous avez déclaré que nos clubs devaient ressembler aux grands clubs européens. Ne serait-ce pas plutôt le contraire ? Va-t-on continuer longtemps à tolérer que les clubs espagnols affichent des déficits astronomiques, bouchés tantôt par le Roi d'Espagne, tantôt par des opérations immobilières consistant à vendre à Madrid des terrains devenus constructibles ? Il faudrait que les mêmes règles s'appliquent à tous les clubs européens. Il est vrai qu'après tout, le problème peut se régler de lui-même : certains grands clubs anglais, dont le déficit est très important, ne sont-ils pas en passe d'être vendus car les investisseurs pensent avant tout à l'argent ? Monsieur le secrétaire d'Etat, en contribuant à davantage d'équité sportive, vous auriez une belle carte à jouer !

Une deuxième mesure ne vous coûterait pas un sou : plafonner les subventions à 450 euros. Pour les petits clubs, 200 ou 300 euros permettent de faire tourner la boutique.

En ce qui concerne la lutte antidopage, nous serons à vos côtés – Mme Buffet vous le confirmera. Attention l'année prochaine, avec un Tour de France international et le retour de certains !

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