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Intervention de Henri Nayrou

Réunion du 30 octobre 2008 à 9h00
Commission élargie

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHenri Nayrou, rapporteur spécial de la Commission des finances, de l'économie générale et du plan :

Monsieur le secrétaire d'État, je remercie d'abord vos services d'avoir répondu au questionnaire budgétaire avant la date limite du 10 octobre.

L'objet de mon rapport est de retracer, après avoir examiné les principales mesures de votre projet de budget pour 2009, les orientations de politique publique sur lesquelles il s'appuie, sachant qu'en baisse de 52 millions d'euros, il intervient dans un contexte à la fois de récession économique, qui contraint les décideurs publics, et de modernisation des politiques publiques.

Si l'on reprend la présentation astucieuse, mais contestable, de ce budget – qui amalgame aux crédits de l'État ceux du Centre national de développement du sport, CNDS – 996 millions d'euros sont prévus pour la mission « Sport, jeunesse et vie associative », contre 1 048 en 2008 : 787 millions d'euros de crédits budgétaires et 209 pour le CNDS. La part de l'État stricto sensu est donc en très légère progression, puisqu'elle était de 782 millions d'euros en 2008. Mais sur trois ans la tendance s'inverserait puisque 768 millions d'euros sont prévus en 2010 et 757 en 2011. Le désengagement de l'État dans le domaine du sport, de la jeunesse et de la vie associative est donc programmé, ce qui ne peut que préluder à un déclin.

Le budget de la mission, en augmentation d'un millimètre d'euro pour 2009, n'est-il pas prévu en recul accentué en 2010 et 2011 ?

Quant aux crédits du CNDS, ils diminuent fortement. La baisse totale est de 5 %, les crédits du programme « Jeunesse et vie associative » connaissant, quant à eux, une baisse de 11 %.

Ces constatations mettent tristement en évidence le dédain du Président de la République à l'égard du sport, alors que le candidat Sarkozy promettait d'y consacrer 1 % du budget de la nation, soit 3 milliards d'euros. Le sport rassemble pourtant 34 millions de pratiquants, soit 34 millions de « sujets »…, sans compter les sujets de mécontentement. À cet égard, j'en relèverai sept.

Premièrement, la disparition des services déconcentrés de la jeunesse et des sports est quasiment programmée, condamnés qu'ils sont à la dilution dans le poison de la revue générale des politiques publiques. Je le regrette d'autant plus que j'appartiens à une génération qui a connu la formation à la française, c'est-à-dire au maillage du territoire assuré par les cadres techniques.

Deuxièmement, certaines comparaisons sont cruelles. Tel est le cas si l'on met en parallèle les crédits du droit à l'image collective, qui croissent de manière exponentielle – 13 millions d'euros en 2005, 21 millions en 2006, 26 millions en 2007, 32 millions en 2008 et en 2009, en attendant des économies supposées d'environ 4 millions pour 2011– et ceux réservés à la promotion du sport du plus grand nombre, soit 22 millions d'euros, en baisse de 17 % : 7,6 millions d'euros pour la lutte contre le dopage et 15 millions d'euros pour le développement de la vie associative.

Troisièmement, vous déclariez le 5 septembre dernier, que « c'est le privé qui fera progresser le sport français ». Ces appels incantatoires au privé ont de quoi inquiéter, sachant ce qui s'est passé dans le secteur bancaire. Quant aux partenariats public-privé envisagés, faites-moi confiance pour faire les comptes à la fin de la foire…

Nous avons noté, quatrièmement, une très grande discrétion s'agissant des programmes, pourtant, à juste titre, déclarés vertueux en 2008, en direction du milieu scolaire et des quartiers sensibles. À ce sujet, j'avais souligné lors de plusieurs réunions du Centre national pour le développement du sport que ces missions essentielles devraient relever du budget de l'État stricto sensu plutôt que de celui du CNDS, à la fois pour des questions d'éthique et pour des raisons pratiques de mise en oeuvre sur le terrain.

Cinquièmement, la diminution des crédits de l'Agence française de lutte contre le dopage est regrettable, plus dans l'esprit d'ailleurs que dans les montants proprement dits : elle fait en tout cas très mauvais genre alors que le fléau continue de sévir, car bien évidemment, le nombre de contrôles effectués s'en ressentira.

Le message, sixièmement, est pour le moins brouillé s'agissant du regroupement du programme soutien de la mission « Santé » et celui de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». Réunis à Paris, ils sont séparés en région au nom de la RGPP.

Septièmement, enfin, la contribution des collectivités territoriales en faveur du sport avoisine les 9 milliards d'euros. Or, l'État les accuse de dépenser trop. Il n'est pourtant pas le mieux placé pour donner des leçons sur le sujet !

J'arrête là mon propos, juste avant l'apocalypse (Sourires).

En résumé, ce budget ne traduit aucune vision prospective pour le sport français alors qu'une politique sportive et associative ambitieuse serait indispensable pour le lien social, pour la santé, pour l'éducation, pour l'économie et même pour l'image. Il n'ouvre non plus aucune perspective pour la gouvernance future. En bref, on n'y voit aucune lueur d'espoir, aucun acte de foi, seulement des moyens désespérément en berne.

J'en viens à mes questions.

Premier point : il est précisé, dans la présentation stratégique de la mission, que « l'évolution des crédits n'affectera pas la politique d'intervention de la mission, puisque des économies seront dégagées par des mesures de rationalisation portant sur le coût des structures et des dispositifs d'intervention. » Pouvez-vous étayer cette assertion ? Pouvez-vous plus particulièrement préciser les actions et postes budgétaires qui seront affectés dans les trois ans à venir par la baisse annoncée – qu'il conviendrait d'ailleurs de justifier – de 73 millions d'euros ? La représentation nationale n'est pas éclairée sur de tels choix.

Deuxième point : selon la présentation stratégique de la mission, cette dernière « confirme dans la durée la reconnaissance d'une politique publique bien identifiée par l'architecture de la LOLF, tout en s'inscrivant dans la dynamique créée par le rapprochement avec le secteur santé au sein d'un même périmètre ». En quoi le regroupement au 1er janvier 2009 du programme soutien de la mission « Santé » et celui de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » permet-il de mieux identifier la politique publique en question ? Quels liens avec l'architecture de la mission ? Le programme de soutien de la mission « Santé » étant sous la responsabilité du ministère chargé du travail, quel sera le pilotage de la politique publique ?

Troisième point : la direction des sports a fait savoir à l'AFLD que sa subvention pour 2009 serait officiellement de 7,6 millions d'euros, mais que le montant réellement utilisable ne serait, après une mise en réserve d'office de 6 % sur la totalité des crédits, que de 7,15 millions d'euros. Le coeur même de la mission de l'Agence sera touché, avec environ 10 % de contrôles en moins. Elle comptait initialement en réaliser 9 000 l'année prochaine. Que proposez-vous à ce sujet ?

Quatrième point : porter de 1,8 % à 2,1 % le taux du prélèvement opéré au profit du CNDS sur les recettes de la Française des jeux – qui s'élèvent tout de même à 2,9 milliards d'euros – procurerait 20 millions d'euros de ressources supplémentaires au Centre. Une telle augmentation permettrait, d'une part, de majorer les crédits déconcentrés, d'autre part, de renforcer la capacité d'engagement pour mieux soutenir la réalisation et la rénovation d'équipements sportifs. Rien n'est prévu dans le présent projet de budget pour compenser la disparition du PNDS en la matière. La décision appartenant à l'exécutif, sera-t-elle prise à l'Élysée, à Matignon, à Bercy ou avenue de France, et quelle sera-t-elle ?

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