Monsieur le président, mes chers collègues, après Foch, nous allons peut-être modérer l'offensive.
L'impact de la crise actuelle, sans doute la plus grave que le monde capitaliste ait connu, est tellement déterminant pour nos finances publiques qu'il vaut mieux en parler au préalable, et ce d'autant plus que, même si j'ai approuvé la loi de finances rectificative, la position du Gouvernement, telle qu'elle est exposée ici ou dans les médias, évolue au rythme de changements de cap quasi bihebdomadaires.
Il y a un mois, il n'y avait plus de « risque systémique ». Quelques jours plus tard, il devenait délicat de nier le risque, mais le Gouvernement affirmait que les banques françaises étaient protégées grâce au parfum de leurs vertus de bonne capitalisation et d'excellent contrôle, véritable résurgence dans le domaine de la finance de ce que fut, avant guerre, notre inébranlable confiance dans le caractère infranchissable de la ligne Maginot – M. Myard emprunte ses références à la guerre de 1914-1918, je peux bien emprunter les miennes à celle de 1939-1945.
Moins d'une semaine plus tard, le Gouvernement décidait d'accorder une possibilité de recapitalisation par l'État des fonds propres des banques françaises à hauteur de 40 milliards d'euros – une bagatelle ! –, tout en affirmant haut et fort que les banques françaises, dotées de « ratios Cooke » ou « Bâle » flamboyants, n'en avaient nul besoin et n'en voudraient à aucun prix, de telle sorte que cette facilité en capital ou la garantie de crédit interbancaire n'avaient aucun risque d'être effectivement engagées – je l'ai entendu il y a une semaine.
Or nous avons appris hier qu'une première tranche de recapitalisation de 10 milliards d'euros était effectivement engagée et qu'elle serait suivie d'une seconde, ce qui porterait l'engagement en fonds propres pour les banques françaises garanti par l'État à 20 milliards d'euros, soit à peu près la moitié du plafond fixé par la loi de finances rectificative. Ces chiffres sont du reste cohérents avec les estimations données par la presse il y a quelques semaines.
Mais nous devons nous rassurer : alors que, dans le monde entier, de la Californie à la Nouvelle-Zélande, en passant par l'Europe, ces recapitalisations étatiques sont essentiellement destinées à écarter le risque de défaillance, elles sont chez nous, semble-t-il, destinées à permettre à nos banques de prêter plus ! C'est un cas unique dans le monde occidental.
Si je demande aujourd'hui au Gouvernement d'évaluer le coût pour les finances publiques de cette opération de recapitalisation, il répondra, je suppose, à côté du sujet par de nouvelles considérations oiseuses sur la solidité de notre système financier. Je préfère donc poser la question autrement, peut-être plus positivement, en ces temps de croissance négative : le Gouvernement peut-il indiquer ce que rapportera en plus-value au budget de l'État cette opération d'intervention publique dans les fonds propres de nos banques ?