En outre, la réforme de la dotation de solidarité urbaine, destinée à concentrer celle-ci sur certaines communes, pourrait priver à terme, selon diverses simulations, entre 75 et 220 communes de cette ressource conçue pour aider les collectivités aux populations défavorisées.
Le CFL a adopté à l'unanimité une délibération reprenant en substance le contenu du communiqué commun diffusé le 19 septembre par les principales associations d'élus locaux. Dans cette délibération, les élus du CFL disent notamment refuser que le FCTVA, compte tenu de son caractère actuel de remboursement, soit intégré dans l'enveloppe dite « normée » des dotations de l'État aux collectivités territoriales. Pour cette même raison, le comité a refusé qu'un groupe de travail soit créé sur l'avenir de ce fonds. Pour les élus, le FCTVA doit seulement permettre de compenser une partie de la charge de TVA supportée par les collectivités territoriales, leurs groupements et les établissements publics bénéficiaires, sur leurs dépenses réelles d'investissement. Or, l'évolution proposée, de « mise en place d'un système forfaitaire de remboursement décidé par le préfet », serait tout à fait contraire au principe de libre administration des collectivités territoriales et s'apparenterait à une grave remise en cause de la décentralisation. Plus encore, cette initiative mettrait un terme à un système particulièrement vertueux.
En outre, au moment où la croissance économique s'amenuise au point de flirter avec la récession, les élus refusent une réforme qui « ne peut qu'accentuer le caractère récessif de l'économie française en s'attaquant à l'investissement local, principal moteur de la croissance économique. »
Autre pomme de discorde : l'évolution d'ensemble des concours financiers de l'État aux collectivités locales. L'inflation prévisionnelle retenue dans le projet de loi de finances pour 2009 est, à 2 %, inférieure de 1,4 point à l'évolution actuelle de l'inflation et de plus encore par rapport à l'indice du « panier du maire », largement supérieur à 3 %. Enfin, quant à la réforme de la DSU, les élus du CFL ont demandé à poursuivre leurs travaux, considérant que les pistes de réformes ne sont pas assez abouties.
Le Gouvernement doit écouter ce cri d'alarme des collectivités locales, ainsi que celui de l'intergroupe parlementaire de l'outre-mer, qui s'est réuni le 9 octobre 2008 au Sénat. La nécessité de revoir le dispositif prévu à l'article 43 du projet de loi de finances pour 2009 et la suppression de son article 65 a été soulignée.
Qu'affirmait le Président de la République le 22 mars 2007 aux Abymes, en Guadeloupe ? « Je préconise la création de zones franches globales dans les DOM. C'est ici, en Guadeloupe, que j'en ai parlé pour la première fois, il y a un an. Je veux préciser ma pensée aujourd'hui. D'abord, soyons clairs, ces zones franches viendraient en complément de l'actuelle défiscalisation qu'il faut conserver. Il faut la conserver car la défiscalisation agit sur les coûts d'investissement, là où les zones franches agiront sur les coûts de fonctionnement. Il faut la conserver car la défiscalisation n'est pas un ensemble de niches fiscales, c'est un outil de développement nécessaire à la croissance de territoires spontanément sous-capitalisés. »
Oui, la loi de programme pour l'outre-mer du 21 juillet 2003 a eu des effets très bénéfiques pour l'économie de l'outre-mer grâce à son volet « défiscalisation » et à un régime très pertinent en matière d'exonérations de charges sociales générant une progression de plus de 12 % de l'emploi outre-mer. Cette loi a entraîné une baisse très sensible du chômage malgré une amélioration de la productivité de la main-d'oeuvre. Cependant, suite à l'annonce du plafonnement des droits à défiscalisation outre-mer, les investisseurs restent en attente ; cet attentisme a d'ores et déjà entraîné une diminution de l'activité et une augmentation du chômage. La remise en cause du système actuel d'exonération de charges sociales va aggraver cet attentisme, alors même que l'outre-mer se situe dans un contexte régional et économique particulièrement agressif et que la crise financière a des effets désastreux sur les fragiles économies de l'outre-mer. C'est pourquoi il y a aujourd'hui une impérieuse nécessité de revoir le dispositif prévu à l'article 43 du PLF pour 2009 et la suppression de son article 65, afin de ne pas entraîner des effets beaucoup plus coûteux pour la communauté nationale que les économies budgétaires attendues.
Alors que certaines niches fiscales sont productives – c'est le Président de la République qui le dit –, le Gouvernement veut les supprimer. Le cri d'alarme des parlementaires d'outre-mer, vous pourriez aussi l'entendre en provenance de toutes les zones touristiques, qu'elles soient de métropole ou d'outre-mer, sur un autre sujet. En effet, le durcissement du statut de loueur de meublé professionnel, dont vous voulez exclure tous ceux qui trouvent dans cette activité un complément de revenus, va, sous prétexte de réaliser quelques économies, mettre en péril l'économie des régions touristiques qui pratiquaient un tourisme doux et durable fondé sur l'accueil chez l'habitant, au profit de grands opérateurs touristiques qui ont déjà fait la preuve de leur inconséquence lors de faillites survenues récemment, qui ont littéralement ruiné les petits investisseurs qui avaient cru en eux et en leur système. Ce durcissement va provoquer soit la disparition des petits loueurs de meublés, soit le retour à une économie souterraine, où l'État ne percevra plus de recettes fiscales, les collectivités ne toucheront plus de taxes de séjour, et toute professionnalisation de la démarche commerciale des loueurs privés sera impossible, vidant des territoires ruraux et de montagne de tout accès au marché.
Dans un département comme le mien, à savoir les Hautes-Alpes, les salariés du privé sont à 80 % des saisonniers. Ceux qui ont retapé une maison ancienne pour se loger et gérer un meublé auront droit cette année à une double peine : d'une part, une fiscalité inadaptée pour leur complément de revenus, d'autre part, un nouveau régime d'indemnisation chômage qui aura pour conséquence de les paupériser gravement. Les régions touristiques en viennent à se demander si le Gouvernement entend les voir subsister, mais nous aurons l'occasion d'y revenir lors de l'examen de certains de nos amendements.
Face à la déstabilisation des régions non urbaines qui vivent du tourisme et qui ont fait du développement durable leur philosophie, mais aussi leur attractivité commerciale, peut-être entendrez-vous enfin ces collectivités qui demandent seulement, au moyen d'un amendement renvoyé de PLF en Grenelle et de Grenelle en PLF, et qui est à nouveau déposé dans le cadre du projet de loi de finances pour 2009, à être mises sur un pied d'égalité avec les zones urbaines pour bénéficier du versement transports. Là encore, que demandons-nous en vain, alors que cela ne grèverait même pas les finances de l'État ? Tout simplement d'organiser et de financer les réseaux de transport des communes et de leurs groupements, dont la population permanente et touristique leur fait dépasser le seuil de 10 000 habitants. « Une vraie question » pour Dominique Bussereau lors du débat sur le Grenelle, « une suggestion pertinente » pour Mme Kosciusko-Morizet et pour plusieurs de nos collègues – notamment M. Mariton –, qui se sont exprimés en ce sens, mais un grand silence frisé venu des alpages gouvernementaux, qui n'en finissent plus de ne rien décider sur cette question pourtant essentielle pour les régions alpines et pour les régions touristiques en général.
Puisque vous êtes à la recherche de recettes, madame et monsieur les ministres, je peux vous en proposer quelques-unes, à commencer par la suppression des délocalisations fiscales. Quand on parle de délocalisation, on pense surtout à la fermeture de sites industriels. Ces fermetures sont des catastrophes, des situations cruelles sur lesquelles nous ne partageons pas les options prises par le Gouvernement. Mais ce n'est pas l'objet direct de mon intervention dans le cadre de la loi de finances. Je veux évoquer un autre problème, qui va d'ailleurs en s'amplifiant, celui des délocalisations fiscales. On avait déjà parlé, à propos de l'imposition des personnes physiques, de la fuite des cerveaux – et je ne veux pas parler ici des déménagements successifs d'un célèbre chanteur des années soixante –, à présent on se trouve face à un nouveau phénomène : la fuite de la valeur imposable.
De plus en plus d'entreprises délocalisent leurs sièges sociaux vers des pays ou la fiscalité est plus avantageuse, à l'intérieur ou à l'extérieur de l'Union européenne. Les exemples, à l'image de celui du groupe Colgate-Palmolive, sont très nombreux. Cette stratégie qui se généralise se traduit par un manque à gagner pour l'État en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés et un manque à gagner pour les collectivités territoriales. De plus, il s'agit souvent d'une stratégie en deux temps : les optimisations fiscales d'aujourd'hui préparent les plans sociaux et les licenciements de demain. Une première étude transmise aux députés radicaux de gauche estime à 32 milliards d'euros pour 2008 les effets de cette fuite. J'ai bien dit 32 milliards ! Il y aurait là de quoi remettre de l'ordre dans nos finances publiques et répondre aux attentes des Français pour leur pouvoir d'achat.
Il convient de réagir rapidement, mais ce n'est pas en brandissant d'un air satisfait le modèle de la main invisible du marché que l'on enrayera le phénomène. Croire en la régulation automatique des marchés est d'une naïveté coupable. C'est une fable qui n'est plus d'ordre économique mais qui a pris, notamment chez certains amis du pouvoir, une dimension théologique. Comme vous le savez, nous, radicaux de gauche, refusons que la politique de notre pays soit fondée sur des croyances. Nous exigeons la connaissance, une étude objective des faits, du courage politique qui permette d'opérer des choix clairs.
Quels sont les montants réels de la perte de ressources publiques ? Quelles sont les pratiques des grands groupes ? Quels outils mettre en place pour enrayer cette fuite ? Comment, au niveau européen, arriver rapidement à des consensus sur ces sujets ? Avec mes collègues députés radicaux de gauche, nous avons déposé une proposition de résolution visant à la création d'une commission d'enquête sur ces fuites de richesse. Cette demande avait déjà été formulée sous la mandature précédente, sans que ni la majorité, ni le Gouvernement ne jugent utile de répondre au problème.