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Intervention de Chantal Brunel

Réunion du 12 mars 2009 à 10h15
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChantal Brunel, rapporteur :

Pourquoi cette proposition de loi ?

Parce qu'il n'est pas normal que par une simple lettre un chef d'entreprise se voie couper ou réduire du jour au lendemain ses lignes d'escompte ou de découvert.

Parce qu'aujourd'hui les banques qui ont pris des risques financiers importants expliquant certaines de leurs pertes veulent limiter fortement les risques sur les PME. C'est, passez-moi l'expression, « ceinture et bretelles » pour les petites entreprises. Certaines banques ont été jusqu'à inscrire en liste rouge certains secteurs entiers d'activité !

Parce qu'il faut plus de transparence entre la PME et l'agence bancaire. Cette transparence et ce dialogue sont importants car les banquiers sont de fait très souvent en position dominante vis-à-vis des petites entreprises, juste avant ou après les clients. Or le chef d'entreprise qui reçoit une fois par an, souvent avec un fort décalage, la note de la Banque de France, doit connaître la note ou l'évaluation de l'entreprise de son ou de ses agences bancaires partenaires.

Parce que nous devons cesser d'entendre comme un écho lancinant la question : « Mais où vont tous ces fonds alloués par l'État, ces 360 milliards d'euros de garantie accordés aux banques ? » Nous devons donc avoir un fléchage des prêts consentis aux PME par les banques, et ce en particulier pour les nouvelles entreprises.

Parce que l'on doit renforcer les fonds propres des sociétés non cotées. D'où l'objectif pour les sociétés d'assurance d'investir au minimum 2 % du total de leurs encours des contrats d'assurance-vie dans le capital des PME. D'où aussi la disposition visant à créer, sous l'égide d'OSEO, un prêt jeunes entreprises de deux à cinq ans, la mortalité étant moins forte au-delà de deux années.

Parce qu'enfin, dans ce contexte d'extrême difficulté pour nos PME, il est impératif de leur redonner des marges de trésorerie. Le raccourcissement des délais de paiement est en soi une bonne chose mais, sur le terrain, ce sont les très petites entreprises dont le crédit interentreprises diminue le plus fortement – ce qui les fragilise. Question de rapport de forces : un TPE ne va pas facturer des intérêts de retard à un gros client !

Je vous soumets donc cette proposition de loi dont l'objectif vise à favoriser et à sécuriser l'accès au crédit des petites et moyennes entreprises fragilisées par la crise économique et financière.

L'État, en concertation avec ses partenaires européens, a d'ores et déjà pris des mesures d'une ampleur sans précédent afin de soutenir le système bancaire et d'aider nos PME : les 22 milliards d'euros de nouvelles garanties apportées à OSEO, le renforcement d'OSEO Garantie ou les 20 milliards d'euros du Fonds stratégique d'investissement n'en sont que quelques exemples probants.

Pourtant, selon une étude de l'IFOP pour KPMG et la CGPME publiée avant-hier, 48 % des PME renonceraient à investir par crainte de refus d'un crédit bancaire et 87 % de leurs patrons redoutent un durcissement important de l'accès au crédit. Ces chiffres sont pour le moins inquiétants.

L'enveloppe dont bénéficie OSEO pour le soutien à l'innovation perd quant à elle 300 millions euros entre cette année et l'année dernière – 500 millions contre 800 millions d'euros. C'est une source d'inquiétude car le crédit d'impôt recherche présenté comme une alternative, ne répond pas du tout à la même logique. Ne faudrait-il pas consentir un effort dans le collectif budgétaire pour éviter à OSEO d'être à court de crédits à la fin de l'année ?

Des difficultés importantes subsistent donc, qui ne tiennent pas tant au manque de moyens financiers mobilisés – que l'on peut considérer comme étant suffisants – qu'à l'absence de confiance des acteurs économiques, en particulier des PME. Avec ses 2,9 millions de salariés, cette puissance économique indispensable à notre pays n'a aujourd'hui d'égale que la vulnérabilité à laquelle les entreprises sont exposées. Si les PME sont en effet les premières victimes du resserrement des conditions du crédit bancaire, c'est parce que leurs sources de financements sont beaucoup moins diversifiées que celles des plus grandes entreprises.

En vue de soulager nos PME de ces nombreux poids et afin de leur permettre de demeurer ce moteur incontournable de notre économie, le texte propose d'agir en suivant trois directions principales : assurer une plus grande transparence, favoriser la diversité des sources de financement et sécuriser le chef d'entreprise sur ce sujet.

Ma démarche s'est organisée autour de quatre axes de réflexion.

Premier mot d'ordre : le rééquilibrage des relations contractuelles entre les banques et les entreprises. Il se traduit par l'encadrement du désengagement des banques dans le cadre des crédits qu'elles consentent aux entreprises, avec la fixation d'un délai de préavis de soixante jours et l'obligation faite aux banques de justifier leur désengagement si l'entreprise le demande. De mon point de vue, cette demande ne doit pas être automatique mais provenir du chef d'entreprise, d'abord pour ne pas alourdir les procédures, ensuite pour assurer leur confidentialité.

Seconde priorité : la diversification des sources de financement des PME. Il s'agit, en l'occurrence, d'inciter les organismes d'assurance à investir davantage dans le capital des PME.

Le troisième type de mesures répond à un impératif de traçabilité : compléter le dispositif de suivi des encours bancaires aux PME mis en place dans le cadre de la garantie bancaire de l'État par la généralisation à l'ensemble du système bancaire de ces remontées d'informations via la Banque de France.

Enfin, une attention particulière est accordée au segment des entreprises en phase de développement, avec la mise en place d'un prêt spécifique garanti par OSEO pour les PME entre deux et cinq ans.

Je vous présenterai deux séries d'amendements, d'abord pour améliorer et préciser la rédaction initiale de la proposition de loi, ensuite, tout en restant dans l'esprit de ces quatre axes directeurs, pour compléter les mesures proposées, en particulier sur les questions d'assurance crédit, d'allégement des procédures comptables pour les entreprises unipersonnelles à responsabilité limitée et de cotation des PME sur Alternext. S'agissant de ce dernier point, la procédure est lourde et peu utilisable.

Sous réserve de ces modifications, je vous inviterai donc, mes chers collègues, à adopter cette proposition de loi.

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