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Intervention de Lionel Tardy

Réunion du 15 juillet 2009 à 17h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLionel Tardy :

Cet article prévoit que le juge peut infliger une peine de suspension de l'accès internet pour toutes les infractions sanctionnées par une contravention de cinquième classe dans le code de la propriété intellectuelle. En cela, il est lourdement inconstitutionnel : il institue une peine complémentaire sans fournir une liste claire et exhaustive des infractions concernées. Il laisse la porte ouverte au pouvoir réglementaire, qui pourra créer de nouvelles contraventions de cinquième classe auxquelles la peine complémentaire s'appliquera sans que le législateur puisse se prononcer ou en soit même informé. On méconnaît ici le champ de compétence du législateur fixé par l'article 34 de la Constitution.

L'article contrevient également au principe de proportionnalité des peines, puisque la suspension porte atteinte à une liberté fondamentale, la liberté d'expression, pour une infraction relevant de la simple contravention.

De plus, cette disposition est parfaitement inefficace. Le Conseil constitutionnel ayant indiqué clairement qu'il ne saurait y avoir de présomption de culpabilité en la matière, c'est à la HADOPI qu'il appartiendra de prouver la négligence caractérisée. Le simple fait que des téléchargements illégaux ont été réalisés à partir d'un point d'accès après un avertissement ne constitue nullement une preuve. Il faudra établir concrètement que l'abonné n'a rien fait pour sécuriser sa ligne. Comment la HADOPI s'y prendra-t-elle ? L'internaute peut très bien avoir tenté quelque chose, mais sans succès. Sécuriser sa ligne n'est pas chose facile, comme l'atteste un récent appel d'offres lancé par le ministère de la culture pour son site internet : le cahier des charges est particulièrement détaillé sur ce point et impose des conditions très lourdes quant à la responsabilité du prestataire. Certains, rue de Valois, sont bien conscients de la difficulté de l'exercice.

Bref, nous sommes en présence d'un monstre juridique qui ne passera pas l'examen du Conseil constitutionnel. Il est de notre devoir de faire nous-mêmes le ménage dans ce texte. Si nous laissons le Conseil le faire à notre place, à quoi servons-nous ?

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