L'Observatoire de la parentalité en entreprise, que j'ai l'honneur de présider, est une association loi 1901 qui a été créée au printemps dernier pour inciter les entreprises françaises à mettre en place des actions concrètes de nature à aider leurs salariés à mieux concilier vie professionnelle et vie familiale. Trois missions lui sont dévolues.
Premièrement, évaluer les pratiques des entreprises en faveur de leurs salariés-parents. À cet effet, nous avons mis en place le premier baromètre sur la conciliation vies familiale et professionnelle, rendu public la semaine dernière. Après avoir interrogé en janvier 1 000 salariés parents – dont le panel changera chaque année – afin de recueillir leurs aspirations vis-à-vis des employeurs, nous interrogerons au printemps un certain nombre d'entreprises françaises sur leurs pratiques.
La deuxième mission de l'observatoire est de porter la Charte de la parentalité en entreprise, lancée au ministère du travail le 11 avril 2008. 70 entreprises l'ont signée à ce jour, dont une moitié de PME, mais aussi La Poste, qui emploie 300 000 personnes, Carrefour, premier employeur du secteur privé avec 140 000 salariés en France, le plus petit signataire comptant 3 salariés. Ces entreprises pionnières, présentées en « une » de notre dossier, représentent déjà 1 million de salariés.
Notre troisième mission est de lancer un mouvement, un vrai débat national sur le sujet. J'ai d'ailleurs été heureux d'entendre le Président de la République dire la semaine dernière que la conciliation vie familiale-vie professionnelle serait un objectif majeur de son quinquennat. Nos efforts commencent donc à porter leurs fruits, comme le montrent les récents articles de presse que je vous ai communiqués.
Afin d'animer le partage de bonnes pratiques entre entreprises, nous allons également monter plusieurs groupes de travail cette année.
Le premier s'intéressera au télétravail. S'il est intéressant de permettre aux parents d'être davantage présents à la maison et de consacrer plus de temps à leurs enfants en réduisant les temps de trajet domicile-travail, un encadrement est nécessaire, d'autant que la frontière entre la vie personnelle et la vie professionnelle est de plus en plus poreuse.
Nous prévoyons aussi de monter un groupe de travail sur l'accompagnement des femmes enceintes.
Nous souhaitons également travailler sur la formation des managers à la prise en compte de la parentalité de leurs collaborateurs : si les directions d'entreprise font de beaux discours mais que les managers ne font pas vivre les dispositifs sur le terrain avec leurs équipes, ces derniers resteront lettre morte.
Nous envisageons aussi de travailler sur le thème du recrutement et de la parentalité. À quel moment un jeune père, une jeune mère, qui souhaite rejoindre une entreprise, peut-il évoquer la question de la conciliation entre vies familiale et professionnelle avec son futur employeur dans le cadre du processus de recrutement ? Comment le recruteur peut-il, dans le cadre de la loi, évoquer ce sujet avec un futur collaborateur sans être intrusif ?
Notre baromètre, réalisé à partir d'un sondage effectué auprès de salariés parents ayant au moins un enfant de moins de vingt-cinq ans à leur domicile, révèle plusieurs constats. L'équilibre entre vie professionnelle et vie familiale est un sujet de préoccupation important pour 97 % d'entre eux. 72 % des parents salariés, soit 3 salariés sur 4, considèrent que leur employeur ne fait pas grand-chose pour les aider dans ce domaine. Enfin, parmi les dix-huit mesures qui leur ont été proposées, les salariés parents ont placé les « solutions ponctuelles ou permanentes de garde des enfants » en quatrième position, après l'« aide au financement de la scolarité et des études », des « mutuelles avantageuses pour les familles » et la « participation ponctuelle ou permanente aux frais de garde ». Les salariés attendent donc principalement des entreprises des aides financières, ce qui est compréhensible en raison des tensions sur leur pouvoir d'achat et de la crise économique. La moitié d'entre eux déclarent ne pas bénéficier d'une mutuelle avantageuse pour les familles, ce qui représente un champ de travail considérable. Il est intéressant de noter que la troisième mesure attendue n'est pas directement une offre de places d'accueil pour les enfants, mais une participation au frais de garde.
On peut se demander si parler de la parentalité en entreprise ne va pas à contre-courant des priorités actuelles eu égard à la crise économique. Pour moi, ce n'est absolument pas le cas. Nous vivons une crise de transition entre deux modèles de capitalisme et, en mettant en avant la parentalité en entreprise, nous contribuons à construire le modèle à venir : un modèle respectueux de l'humain. Notre enquête sur les aspirations de nos concitoyens faisant apparaître qu'il s'agit d'une vraie cause nationale, nous avons envie de créer un mouvement d'émulation. C'est pourquoi, dans les médias, nous mettons fréquemment en avant les bonnes pratiques de certains employeurs car inciter les entreprises à aider davantage leurs salariés à concilier vie familiale et vie professionnelle est aujourd'hui un enjeu majeur.