Cela fait vingt ans que les gouvernements successifs et les acteurs de terrain s'efforcent de lutter contre la pauvreté. Malgré toute l'imagination et toute la bonne volonté de chacun, on ne peut pas dire que la pauvreté ait reculé de façon spectaculaire. Elle s'est même aggravée pour certaines catégories de notre population.
Ce qui nous est proposé aujourd'hui tend notamment à simplifier les dispositifs en vigueur. Comme toutes les évaluations n'ont pas encore été menées, nous pourrions bien sûr attendre d'avoir tous les éléments en main. Mais il est un moment où il faut enfin prendre une décision.
Pour ma part, je trouve intéressant que l'on ait enfin intégré à notre réflexion le fait que le retour à l'emploi s'accompagne de la perte de certains avantages. La reprise d'une activité occasionnant des coûts, certains s'interrogent sur l'évolution de leur pouvoir d'achat par rapport à leur situation antérieure avant de sauter le pas. Nous avons enfin la réponse à ce problème. Il en résultera un appel d'air qui permettra de pourvoir des postes, mais aussi de sortir un certain nombre de personnes d'une situation délicate.
S'agissant de ceux qui sont les plus éloignés de l'emploi, je ne vois pas en quoi ce texte aurait des effets négatifs. Il existe déjà un certain nombre de dispositifs en faveur de ces publics, et ils ne seront pas supprimés. Grâce à l'instauration d'un contrat unique d'insertion et aux avancées réalisées en matière de gouvernance, le système gagnera en clarté et sans doute aussi en efficacité.
Il reste toutefois des incertitudes sur ce qui a toujours posé problème en matière d'insertion, à savoir l'accompagnement social et la formation des acteurs sociaux, qui n'est pas toujours adaptée à leurs missions. Sur ce point, j'observe que le texte n'apporte pas nécessairement de réponse. L'accompagnement vers l'emploi, en matière de transports ou de garde d'enfants, mériterait également des efforts supplémentaires. Mais ce n'est pas uniquement à l'Etat d'agir : c'est aux conseils généraux et aux CAF d'infléchir leurs stratégies en vue de faciliter le retour à l'emploi.
De tout cela, il résultera naturellement un coût dans un premier temps, mais notre société s'y retrouvera largement à terme. En tout cas, l'amélioration du pouvoir d'achat des travailleurs pauvres me semble le meilleur outil en faveur de l'insertion sociale.
Il est vrai que certains de nos concitoyens ne sont sans doute pas employables aujourd'hui, et qu'ils ne le deviendront peut-être pas demain, mais cela ne doit pas nous empêcher d'adopter cette réponse positive qu'est le RSA. Les évaluations prévues nous permettront au demeurant d'apporter les améliorations qui s'imposeront, et d'intégrer des catégories dont je regrette, comme d'autres collègues, l'absence dans ce texte. Je pense notamment aux jeunes : même si je n'ai jamais été favorable à ce qu'ils touchent le RMI, on pourrait tout de même imaginer qu'ils soient intégrés dans le dispositif du RSA à partir du moment où ils travailleraient à temps plein. Je m'interroge en effet sur les risques de stigmatisation des jeunes de moins de 25 ans sur le marché du travail : ils ne bénéficieront pas du RSA, contrairement aux autres. Or, que l'on ait dépassé ou non 25 ans, on a tout autant besoin de pouvoir d'achat.