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Intervention de Jean-Claude Gayssot

Réunion du 14 octobre 2008 à 16h00
Mission d’information sur les questions mémorielles

Jean-Claude Gayssot :

Qui peut saisir le Conseil constitutionnel ? Les députés ne le peuvent-ils pas ? Pourquoi ne l'ont-ils pas fait ? Est-ce parce que ces lois ont été votées à la quasi-unanimité ? Je pose ces questions pour que tout le monde se sente responsable. Pour avoir été longtemps député, je suis de ceux qui pensent que le Parlement est dans son droit lorsqu'il travaille sur des domaines qui concernent la vie de la société, dès lors qu'il se réfère à la République et à la laïcité.

Je suis le premier signataire de la proposition de loi qui a abouti à la loi de 1990, dite loi Gayssot. Telle que nous l'avons écrite et votée, il ne s'agissait pas d'une loi mémorielle, mais d'une loi contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie. Et c'est parce que le négationnisme est un des vecteurs principaux de l'antisémitisme que nous avons inclus dans la loi ce fameux article 9 qui a fait l'objet de débats et de controverses.

Il n'est pas nécessaire de revenir plusieurs siècles en arrière pour savoir si l'on peut ou non parler de « contestation ». Aujourd'hui, si je conteste quelque chose, cela veut dire que je ne suis pas d'accord, que je le nie. D'ailleurs, les juristes, dans les différents colloques qui ont eu lieu, ont mis le signe « égal » entre contestation et négationnisme.

Pour faire du négationnisme un délit, nous sommes partis de faits jugés par le tribunal de Nuremberg. Nous nous sommes immédiatement heurtés à tous ceux qu'on appelait alors les « révisionnistes » et qui, en France mais aussi en Europe et dans le monde, parlaient de « détail » et exprimaient l'idée que, finalement, il n'y avait pas eu de victimes, et donc pas de bourreaux. Ils ont pu vérifier ensuite que la loi Gayssot a apporté des moyens pour combattre le négationnisme !

Pourquoi se seraient-ils élevés contre cette proposition de loi avec une telle violence si, comme le disent certains, les dispositions préexistantes suffisaient ? La raison, c'est bien que, concernant le négationnisme, il y avait un vide juridique dans la loi sur la presse – qui nous a conduits à lui ajouter par cet article 9 l'article 24 bis.

Il ne s'agissait pas de réécrire l'histoire, d'écrire une histoire officielle ou d'imposer une vérité d'État, mais de condamner des propos et des actes qui contribuent à perpétuer l'antisémitisme. On me répondra que maintenant, tout le monde sait que la Shoah a existé ; mais plus on s'éloigne du moment où cela s'est passé, plus les parents et les proches des victimes quittent ce monde, plus on risque de se heurter à un discours pseudo-scientifique qui fait disparaître les bourreaux, rend les victimes responsables de ce qui leur est arrivé, incite à la haine et à la destruction. Voyez le président de l'Iran accueillir tous les négationnistes du monde et déclarer qu'il faut détruire l'État hébreu !

Le négationnisme est donc bien le vecteur principal de l'antisémitisme. En 1996, le Comité des droits de l'homme des Nations unies a déclaré avoir acquis la conviction que la loi Gayssot, telle qu'elle avait été interprétée et appliquée, était compatible avec les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ; il précisait que la négation de l'holocauste était le principal vecteur de l'antisémitisme. Et en Europe, en janvier 1997, le Parlement européen a appelé les États membres à prendre des initiatives permettant de lutter efficacement contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie, contre la diffusion des thèses négationnistes, en instaurant ou en renforçant les sanctions et en améliorant les possibilités de poursuites judiciaires.

Mme Chandernagor a remarqué que vingt-trois pays sur vingt-sept n'avaient pas de procédures identiques à la loi Gayssot. Quels sont ceux qui en ont ? L'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, la Suisse…

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