L'article 8 concerne le portage salarial. Pour la première fois dans l'histoire de notre législation sociale, nous nous apprêtons à inscrire la définition de cette pratique dans notre droit.
Le portage salarial, activité en plein développement, convient parfaitement à un certain nombre de métiers aujourd'hui en croissance, en particulier dans nos sociétés de services, et permet de régler une partie de l'emploi des seniors, même si, par ailleurs, je comprends bien qu'un certain nombre de nos collègues – et nous avons eu ce débat en commission, monsieur Muzeau – considèrent que le portage salarial comporte des éléments de précarité, qui devraient nous inciter à une certaine forme de prudence. Mais cet article est préférable au vide actuel.
La limite de l'exercice porte sur le besoin de réglementation. Qu'il faille réglementer cette activité, soit, et toutes les activités professionnelles ont vocation à l'être. Mais les entreprises de portage salarial considèrent qu'il existe déjà une certaine forme de réglementation qui leur est propre et qu'elles jugent suffisante.
J'ajoute que l'accord national interprofessionnel mentionne que le portage salarial serait entaché d'illégalité selon certains. J'avoue avoir été quelque peu interloqué par cette formulation. Je pense en connaître l'origine, mais j'y reviendrai.
Veillons cependant à ne pas entrer, à notre corps défendant, presque sans nous en rendre compte, dans une forme de guerre de territoires.
L'alinéa 6 de l'article 8 mentionne qu'un accord national interprofessionnel étendu peut confier à une branche dont l'activité est considérée comme la plus proche la responsabilité d'encadrer la profession de portage salarial. Comme j'ai pu le dire en commission, la « branche professionnelle la plus proche » n'est certainement pas celle des frigoristes ou des plombiers zingueurs, mais la branche du travail temporaire. Nous nous apprêtons, mes chers collègues, à confier le soin à la branche du travail temporaire de réglementer l'activité du portage salarial. Je comprends la nécessité de réglementer cette activité, et pourquoi ne pas se faire aider par une branche professionnelle qui est familière de l'exercice alors que le portage salarial n'est qu'une fédération d'entreprises, non une branche professionnelle ? Mais après être entré en contact avec la branche du travail temporaire, je suis moyennement rassuré sur la perspective qui nous est offerte.
Première raison : il y a de très nombreuses différences entre le portage salarial et le travail temporaire. Et ce n'est pas parce que dans les deux cas nous aurions trois parties au contrat, dont l'une rend un service à une autre, et un certain nombre de similitudes de structures, que pour autant ce sont les mêmes populations, les mêmes objectifs, les mêmes dispositifs, les mêmes durées et les mêmes rémunérations. Ces différences justifient à elles seules que l'on maintienne quelques disparités.
Deuxième raison : il n'est pas possible d'envisager d'aligner purement et simplement le portage salarial sur le travail temporaire alors même que nous nous apprêtons à favoriser un rapprochement abusif et dangereux pour l'activité de portage.
Tel est le sens des amendements que j'ai déposés. J'ajoute qu'il me paraît important de maintenir la possibilité d'une clause d'exclusivité sans laquelle le portage salarial n'existerait tout simplement pas.