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Intervention de Isabelle Gillette-Faye

Réunion du 17 mars 2009 à 16h00
Mission d’évaluation de la politique de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes

Isabelle Gillette-Faye :

L'élévation de l'âge du mariage pour les jeunes filles est une avancée essentielle, comme toutes les dispositions de la loi du 4 avril 2006 concernant le mariage et son annulation.

A partir de cela, un « Guide en direction des élus » a été réalisé avec la Mairie de Paris. Nous cherchons maintenant à le diffuser dans d'autres municipalités. Il a pour objet de faciliter la lecture de la loi concernant le mariage forcé et, notamment, de rappeler aux officiers d'état civil qu'ils ont le pouvoir de surseoir à un mariage. Lors des colloques sur la problématique des mariages forcés, il y a toujours des élus qui me font part des difficultés qu'ils rencontrent quand ils sont confrontés à ce cas. Que peuvent-ils faire quand ils ont devant eux une assemblée masculine entourant une jeune fille, seule et en pleurs ? Le « Guide » tiré de la loi du 4 avril 2006 donne une application pratique des dispositions de la loi.

Concernant les mutilations sexuelles féminines, la loi constitue une grande avancée. Elle permet normalement de protéger toutes les enfants résidant habituellement en France, sans conditions relatives à la légalité de leur résidence. Mais nous n'arrivons pas à faire passer ce message. La complexité du contexte, les différences de situations entre les personnes issues des immigrations – situation irrégulière, situation régulière, en voie de régularisation – ont conduit les professionnels à faire une application simplifiée du texte. Le message n'est plus que l'enfant qui réside habituellement sur le sol français est protégée contre l'excision, même si celle-ci est réalisée dans le pays d'origine, mais que l'excision est interdite en France. Il y a des familles dont on sait, avec une probabilité de 99 %, que l'enfant sera excisée si elle va au pays avec ses parents ; et cela arrive tous les jours. J'écris régulièrement aux préfets et aux parquets, en leur rappelant, noir sur blanc, les termes de la loi, pour réclamer des mesures de protection pour ces enfants. Mais dans les faits, cet aspect de la loi n'est pas appliqué.

Pour ce qui concerne l'allongement des délais de prescription à vingt ans après la majorité, il semblerait qu'un certain nombre de victimes l'utilisent, mais dans les parquets les procureurs classent en général l'affaire sans suite, au motif que, comme l'acte n'a pas été perpétré sur le sol français, il est difficile de condamner les auteurs.

En matière d'aide d'urgence, nous devrions parvenir, après beaucoup de difficultés, à la création en 2009, ou au plus tard en 2010, d'un centre d'hébergement dédié aux femmes victimes ou menacées de mariage forcé. Des crédits ont été prévus à cet effet. Nous avons constitué un réseau appelé « Agir avec elles » regroupant des associations nationales travaillant depuis longtemps sur le thème du mariage forcé avec des populations très diversifiées : l'ASFAD – association de solidarité avec les femmes algériennes démocrates –, Elele (Migrations et Cultures de Turquie), l'association « Voix de femmes » et la Commission pour l'Abolition des Mutilations Sexuelles.

La loi du 4 avril 2006 est un outil remarquable que nous utilisons au quotidien dans notre travail de formation et de sensibilisation. Son application se heurte malheureusement parfois à celle du droit des étrangers en France, avec lequel il y a parfois un conflit de loyauté.

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