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Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 16 avril 2008 à 21h30
Modernisation du marché du travail — Article 6, amendement 113

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRoland Muzeau :

En lieu et place du contrat de travail unique, qui a fait les belles heures du candidat Sarkozy, un nouveau contrat à durée déterminée est créé à l'article 6. Ce contrat vient s'ajouter aux dizaines de contrats spéciaux existant déjà : bel exemple de simplification de notre droit du travail ! Il est vrai que le jeu en valait la chandelle puisque ce nouveau « contrat à objet défini » n'est autre que le contrat de mission que le MEDEF réclamait à cor et à cri depuis des années.

Dans le droit actuel, l'embauche pour un projet d'une durée supérieure à dix-huit mois ne peut se faire que par la signature d'un contrat à durée indéterminée. Le projet achevé et si aucun travail ne demeure pour lui, le salarié peut être licencié pour motif économique et bénéficie d'un certain nombre de protections : obligation pour l'employeur de rechercher un reclassement et respect d'une procédure.

Les auteurs de l'accord et le Gouvernement ont sans doute jugé ces garanties excessives. Quoi qu'il en soit, grâce à votre nouveau contrat, il sera possible d'embaucher en CDD un salarié pour une période de dix-huit mois à trois ans. Pour le salarié, cela signifiera trois années de précarité, sans accès au crédit ni peut-être au logement, avec pour seule perspective un reclassement hypothétique sur une autre mission. De plus, contrairement au CDD, ce contrat pourra être rompu avant l'échéance dans les mêmes conditions qu'un CDI et remis en cause tous les ans à sa date anniversaire, dont il convient de préciser les termes. Même les rapports Boissonat et Virville de 1995 et 2004, qui avaient proposé des CDD sur plusieurs années, n'avaient osé aller aussi loin dans la précarité. À l'époque, les syndicats de salariés unanimes avaient rejeté cette exigence patronale.

J'ajoute que des expériences de cette nature ont déjà eu lieu dans notre pays, qui ont été étendues très largement peu après. C'est le cas des forfaits jour, par exemple, initialement destinés aux cadres dirigeants : aujourd'hui, des centaines de milliers de salariés travaillent sous ce régime. Rien ne garantit que le contrat de projet ne sera pas étendu aux salariés autres que les ingénieurs et les cadres. Ces inquiétudes sont suffisamment sérieuses pour justifier la suppression de l'article 6.

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