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Intervention de Christian Jacob

Réunion du 7 mai 2008 à 10h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristian Jacob :

a centré son propos sur l'article 6 qui porte sur la réduction des délais de paiement, sujet capital pour le GFI qui se réjouit que le Gouvernement ait eu le courage de proposer une telle réforme.

En la matière, le premier enjeu est celui de l'équité dans les rapports, d'une part, entre les entreprises et, d'autre part, entre « dominants » et « dominés ». Avec l'Italie et l'Espagne, la France est en queue de peloton en Europe pour les délais de paiement, ce qui prive les dominés, c'est-à-dire les plus petites entreprises, des moyens financiers nécessaires à leur croissance. Réduire les délais de paiement, c'est permettre à ces entreprises de transférer vers le financement de l'investissement, donc de la croissance l'argent qui est immobilisé dans le financement du crédit inter-entreprises. Rares sont les secteurs professionnels qui n'accueillent pas ces dispositions avec enthousiasme.

Le deuxième enjeu est celui de l'efficacité économique. Il y a une corrélation étroite en Europe entre le taux de croissance et les délais de paiement : plus ces derniers sont courts et plus la croissance est élevée. Cela se vérifie tout particulièrement en Allemagne et dans les pays scandinaves.

Afin d'améliorer le texte, la représentation nationale doit tout d'abord être consciente qu'un contrôle est indispensable pour que les dispositions envisagées soient pleinement efficaces. Il convient en particulier que les commissaires aux comptes soient obligés de faire mention, dans leurs certifications, des délais de paiement pratiqués, qui doivent figurer dans les rapports annuels des entreprises, de façon à mettre en évidence les mauvaises pratiques. Il faudrait également prévoir des sanctions financières – amendes ou possibilité de débiter les frais afférents – en cas de mauvais paiements.

Cette nouvelle réglementation va par ailleurs provoquer un séisme temporaire. Aussi faudrait-il que le système bancaire soit davantage ouvert aux besoins de crédit de certaines entreprises.

Il serait également bon, même si cela ne peut pas être inscrit directement dans la loi, que les pouvoirs publics montrent qu'ils s'intéressent de très près au problème des retards de paiement de l'Etat, des collectivités territoriales et de l'ensemble du secteur public.

En réponse à cette remarque de M. Yvon Jacob, M. François Brottes a souligné que les collectivités territoriales sont irréprochables en ce domaine puisqu'elles sont d'ores et déjà soumises à des dispositions contraignantes qu'elles ont à coeur de respecter quelle que soit leur couleur politique.

Il a ensuite fait observer que le « tous entrepreneurs » - sur le modèle du « tous propriétaires » - peut créer l'illusion que tout le monde peut devenir chef d'entreprise alors que cela suppose quand même un certain talent.

On risque aussi d'instaurer une concurrence déloyale entre celui qui dispose à la fois d'un travail et d'une entreprise, avec les facilités de gestion offertes dans ce cas, et celui qui n'a qu'une entreprise, avec des coûts sensiblement supérieurs pour accéder à la même clientèle.

Ces dispositions risquent également de créer des liens de subordination, un chef d'entreprise pouvant être tenté, au lieu de salarier une personne, de lui demander de se mettre à son compte pour le faire travailler, ce qui sera moins onéreux pour lui. Cela créerait un système avec un seul client et un seul prestataire, comme on a pu en voir dans la filière bois, où la responsabilité est parfois portée par le prestataire et non par l'entreprise maître d'ouvrage.

Même si, à la différence des élus de l'opposition, les représentants des entreprises ont été consultés sur ce projet présenté comme « fondateur », un certain nombre de dispositions susceptibles de répondre à leurs préoccupations font encore défaut.

C'est en particulier le cas de ce qui touche à l'outil de travail. Le texte est ainsi muet sur les baux commerciaux alors que la pérennité de la situation des commerçants et des artisans est grandement menacée par la spéculation immobilière, y compris en dehors des centre-ville. Or, si l'on veut des clients, on a besoin d'un lieu où les recevoir.

Le texte ne prévoit rien non plus en ce qui concerne les assurances. Pourtant, nombre de petites entreprises qui essaient de se développer sur des marchés parfois compliqués et ambitieux ne trouvent pas d'assureurs, ces derniers n'étant en rien contraints d'assurer le risque lié à l'activité économique. Veut-on laisser ceux qui bénéficient des assurances en situation de monopole ?

Rien n'est fait par ailleurs pour permettre une vraie concurrence, dans le cadre de l'ouverture des marchés, au bénéfice du client final. L'acheteur final étant souvent en lien avec la grande distribution, cela renvoie à la notion de négociabilité des conditions de vente, sur laquelle il serait intéressant de connaître l'avis des entreprises.

Comment ne pas s'étonner enfin que le texte ne fasse aucune mention de l'envolée des prix de l'énergie, qui représente pourtant un poids considérable dans l'économie ? Là aussi, il serait intéressant de connaître la position du MEDEF, à un moment où la hausse du coût des matières premières met de nombreuses entreprises en difficulté.

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