Cette proposition de loi repose sur trois principes simples : elle établit tout d'abord un principe de présomption de lien de causalité entre les maladies radio-induites et les essais et accidents nucléaires, elle prévoit un régime d'indemnisation des victimes des essais et des accidents nucléaires en créant un fonds d'indemnisation, établissement public national à caractère administratif placé sous la tutelle des ministères chargés de la sécurité sociale et du budget et institue un suivi médical des populations qui ont été exposées aux risques d'irradiation qui sera assuré par une commission nationale de suivi des essais nucléaires.
Il est intéressant de rappeler quelques données historiques sur ce dossier. L'indemnisation des victimes des essais nucléaires a fait l'objet au cours des dernières années de 18 propositions de loi et d'une large mobilisation de plusieurs associations de victimes, comme par exemple l'association des vétérans des essais nucléaires (AVEN). L'ensemble des parties prenantes s'est réuni pour élaborer un texte commun à partir des différentes propositions de loi qui avaient déjà été déposées auprès des assemblées parlementaires. Ce long travail a abouti au texte de la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui. Un comité de soutien « Vérité et Justice » a été constitué pour médiatiser cette démarche et il a apporté au début du mois de novembre 2008 à l'hôtel Matignon une pétition réunissant de nombreuses signatures en faveur de cette initiative parlementaire. Il est important de souligner que cette proposition de loi est le fruit d'un compromis et qu'elle a été portée par des parlementaires de toutes appartenances politiques, l'objectif étant de pouvoir en discuter le plus rapidement possible. C'est pourquoi ce texte « transpartisan » et « intercaméral » a été inscrit à l'ordre du jour dans une niche parlementaire dévolue au groupe socialiste, radical, citoyen (SRC) et divers gauche alors que ses signataires sont beaucoup plus larges.
Ce texte répond à une urgence sociale qu'il ne faut pas oublier : chaque semaine, des vétérans des essais nucléaires décèdent de pathologies provoquées par ces derniers et leurs ayants droit, souvent des femmes, rencontrent les pires difficultés pour faire valoir leurs droits à indemnisation par la voie de contentieux judiciaires, la plupart des demandes d'indemnisation étant déboutées.
Cette proposition de loi correspond à une démarche pragmatique, c'est pourquoi elle n'aborde pas les points litigieux. Elle ne comporte pas, par exemple, de jugement sur la poursuite tardive des essais nucléaires par la France et ne demande pas non plus la possibilité de lever le secret défense dans certains cas. L'essentiel est d'obtenir la reconnaissance du principe de présomption de lien de causalité entre les pathologies radio-induites et les essais ou accidents nucléaires. Ce principe revient tout simplement à inverser la charge de la preuve pour les victimes et leur permettra ainsi d'obtenir beaucoup plus facilement une indemnisation.
Aboutir à une indemnisation rapide des victimes est le deuxième objectif de cette proposition de loi. Les bénéficiaires potentiels de cette indemnisation sont clairement identifiés et se limitent à quelques milliers de personnes. Il est vrai qu'une certaine incertitude existe pour identifier les victimes d'accidents nucléaires. C'est pourquoi, par souci d'efficacité, le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche serait prêt à limiter le champ d'application de cette proposition de loi aux seules victimes des essais nucléaires. Il suffirait pour cela supprimer l'alinéa 4 de l'article 1er de la proposition de loi et de changer son titre.
Contrairement à M. Georges Colombier, j'estime qu'il est fondamental de poursuivre l'examen des articles de ce texte afin que puisse être reconnu le principe de présomption de causalité qui permettra aux victimes d'être enfin indemnisées. Sur les autres aspects du texte, nous sommes prêts à des compromis pour permettre son adoption.