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Intervention de Jean-Pierre Jouyet

Réunion du 20 novembre 2007 à 15h00
Accord de cotonou sur le partenariat acp-ce — Discussion générale commune

Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'état chargé des affaires européennes :

Notre débat a été extrêmement riche sur un sujet qui engage le développement et l'avenir de plusieurs de nos partenaires et celui de nombre de nos territoires comme cela vient d'être souligné à l'instant par Mme Marc.

Je répondrai tout d'abord aux interrogations du président de la commission des affaires étrangères et de Mme la rapporteure. Sur le plan budgétaire, nous avons un défi à relever. L'engagement de la France est important, et cela dans un contexte budgétaire difficile. Mais notre volontarisme en la matière se traduit par la part de la France dans le financement de la politique européenne de développement.

En ce qui concerne l'articulation des aspects bilatéraux et multilatéraux, un tiers de l'aide publique au développement transite par le canal multilatéral, dont 18 à 19 % par le canal européen. La part bilatérale représentant encore un peu plus des deux tiers de notre aide au développement, l'on ne peut considérer que c'est marginal. En outre, les crédits alloués à l'Agence française de développement, opérateur de notre aide multilatérale, augmentent de plus de 20 millions d'euros en autorisations d'engagement et 67 millions d'euros en crédits de paiement.

L'équilibre entre les instruments bilatéraux et les multilatéraux est une question récurrente. Un code de répartition du travail est nécessaire. Les ministres européens du développement ont d'ailleurs, en mai dernier, mis en oeuvre ce code de façon à assurer une meilleure coordination et une meilleure complémentarité des aides. De plus, nous avons obtenu de la Commission l'engagement que les contributions au FED évolueraient de manière régulière, sans à-coups, de manière prévisible, afin d'éviter tout effet d'éviction de l'aide communautaire et des concours du FED sur l'aide bilatérale.

Le président Poniatowski m'a également interrogé sur les questions de gouvernance. Une fois la révision définitivement ratifiée, la suppression des sanctions automatiques est prévue au profit d'une procédure de dialogue et de consultation renforcée, encadrée par des délais précis. Aucune aide ne sera suspendue avant qu'un dialogue ait pu s'engager.

Dans un certain nombre de pays, cette politique a porté ses fruits : la République centrafricaine, la Guinée-Bissau, la Guinée-Conakry, le Togo, la Mauritanie. Au titre de l'article 96 de l'accord de Cotonou, des consultations sont encore en cours avec le Zimbabwe et les Fidji.

Sachez, par ailleurs, que la procédure de consultation prévue à l'article 97 en cas de corruption grave continuera à s'appliquer dans le cadre de l'accord révisé.

Vous avez également mis l'accent, monsieur le président de la commission, sur la nécessaire coopération à mettre en oeuvre pour la préparation des sommets d'Accra et de Doha, dans le cadre de la présidence française, À cet égard, je tiens à remercier votre commission d'avoir mis en place un groupe de suivi. Soyez assuré que nous nous attacherons à vous donner des informations régulières tant sur la pertinence des affectations que sur la visibilité, l'efficacité et la complémentarité des aides.

S'agissant des objectifs sociaux, évoqués par Mme Martinez et M. Mamère, je précise que l'accord de Cotonou prévoit la prise en compte systématique du principe de l'égalité entre hommes et femmes, en particulier dans le domaine de la santé. Le développement social et humain constitue l'un des piliers de la stratégie de réduction de la pauvreté promue par cet accord, à travers des politiques sociales dans des secteurs comme l'éducation et la santé. Cette dernière constitue d'ailleurs l'un des thèmes sur lesquels nous souhaitons mettre l'accent durant la présidence française de l'Union européenne : nous y apporterons un soin tout particulier dans le cadre de la politique de développement.

Comme l'ont souligné M. Rochebloine et Mme Aurillac, au travers de ces accords et de la mise en place de ces partenariats, c'est toute la question de l'adaptation à la mondialisation et aux règles de l'Organisation mondiale du commerce qui est posée. C'est la raison pour laquelle nous devrons mener une réflexion sur les conditions de réciprocité dans les relations commerciales internationales et sur l'ordre économique mondial, nous y veillerons très scrupuleusement dans le cadre de la présidence française. Des problèmes se posent en effet dans certains cas, non pas du fait de ces accords mais des condamnations de l'OMC, qui ont mis l'Europe dans une position délicate. Toutefois, comme l'a indiqué Mme Aurillac, la libéralisation n'est ni totale, ni globale : des dérogations et des dispositifs transitoires sont prévus. Cela dit, je comprends les interrogations de M. Loncle et de M. Mamère à ce sujet.

À M. Loncle, je répète que nos priorités dans le domaine du développement iront à l'accès aux soins médicaux, notamment au bénéfice des femmes, grâce à la généralisation de la couverture maladie.

Pour ce qui est de la gouvernance, je précise qu'une plus grande décentralisation est prévue, notamment pour l'organisation du dixième FED. Par ailleurs, les accords donnent un rôle plus important aux élus locaux des pays partenaires de l'Union européenne. Leur implication sera le thème dominant des Journées européennes du développement prévues à Strasbourg en novembre 2008, pendant la présidence française.

J'ai bien entendu les différentes observations à propos de l'inégalité des échanges avec l'Afrique. Mais je précise que tous les pays n'ont pas adopté le tarif extérieur commun. C'est pourquoi, dans le cadre des accords intérimaires et des accords de partenariat économique complet, nous veillerons tout particulièrement à ce que les mécanismes d'intégration régionale, tels ceux de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest, ne soient pas mis à mal. Du reste, vous trouverez des réponses à vos interrogations lors du prochain sommet Union européenne - Afrique des 8 et 9 décembre prochains, qui fait suite à celui organisé en 2000. Ce rendez-vous important permettra d'établir un partenariat politique et économique entre l'Union européenne et l'Afrique. Ce sera aussi l'occasion de prendre en compte les difficultés rencontrées par les dirigeants africains dans le cadre des partenariats existants, qu'il s'agisse du commerce ou de la prévention des conflits, ainsi que les problèmes liés au dumping social et environnemental.

Je précise, à l'adresse de M. Mamère, que nous avons l'intention de lancer une réflexion sur la portée des mécanismes de découplage entre montant des aides et volumes de production, dans le cadre du bilan de santé de la politique agricole commune que nous établirons lors de la présidence française. Compte tenu de la hausse des prix des matières premières et des produits agricoles, nous verrons également dans quelle mesure il est possible de réduire le montant des subventions dans certains secteurs, de façon à assainir la situation.

Pour répondre à Mme Marc et à Mme Louis-Carabin, j'indique que le nouveau traité comportera des bases juridiques élargies, susceptibles de mieux prendre compte la situation des régions ultra-périphériques. Soyez, par ailleurs, assurées, mesdames, que nous n'oublierons pas les filières en difficulté. Pour le sucre, il n'y a pas de clause d'exemption en tant que telle, mais la clause de sauvegarde existante, très efficace, sera maintenue jusqu'en 2015 et pourra même être prolongée dix ans de plus. Pour la banane, nous avons obtenu un compromis : si les volumes ne provenant pas des départements d'outre-mer dépassaient les contingents institués, des mécanismes d'alerte se déclencheraient et nous prendrions les mesures de sauvegarde qui s'imposent.

En ce qui concerne l'octroi de mer, je renvoie à la réponse que j'ai faite à M. Mamère à propos de la question préalable qu'il a défendue.

Par ailleurs, nous sommes favorables à la tenue de réunions avec les représentants des pays des Caraïbes concernés car elles ne pourront que contribuer à intensifier le dialogue dans le cadre de la conférence des ambassadeurs. Inutile de rappeler que la République étant une et indivisible, nous prendrons en considération au comité du FED l'ensemble des intérêts de ses territoires, y compris ceux de l'outre-mer.

Enfin, il me semble que la proposition faite par M. Poniatowski sur le comité de suivi nous permettra d'avoir des échanges plus nourris sur ces accords et sur la préparation des sommets. Je proposerai également au commissaire Louis Michel un dialogue plus régulier entre les représentants de la Commission européenne et les responsables et élus des départements d'outre-mer sur les filières en difficulté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

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