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Intervention de Martine Aurillac

Réunion du 8 janvier 2008 à 22h00
Rétention de sûreté et déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental — Reprise de la discussion

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartine Aurillac :

Madame la garde des sceaux, votre projet de loi en deux volets, l'un relatif à la rétention de sûreté, l'autre à la déclaration d'irresponsabilité pénale, vient à point nommé pour répondre à l'inquiétude de l'opinion, née de crimes odieux qui ont récemment frappé des enfants et des soignants, dont la vocation est de prendre en charge des individus dangereux pour eux-mêmes et pour autrui. Ces derniers, pour pénalement irresponsables qu'ils soient, n'en représentent pas moins un grave risque potentiel pour la société. Ce faisant, vous tenez un des engagements du Président de la République auxquels les Français sont particulièrement sensibles, notamment les familles, qui sont l'armature de notre société. Vous montrez aussi votre courage et votre fermeté en rétablissant l'équilibre entre les deux fonctions de l'autorité judiciaire, constitutionnellement gardienne des libertés publiques : la protection de la société, en particulier des victimes, et la personnalisation de la peine.

Ainsi, l'abandon du non-lieu, terme offensant pour les victimes d'agresseurs pénalement irresponsables, est une mesure qui devrait faire consensus.

S'agissant de la rétention de sûreté, je souhaiterais que vous puissiez rassurer nos concitoyens sur les modalités d'application de cette mesure opportune et réfléchie. À cet égard, je voudrais formuler trois observations.

D'abord, usant d'une simplification sans doute abusive, je dirai que le bracelet électronique n'est rien sans ceux qui en contrôlent la mise en oeuvre – et pas seulement sur le plan technique –, sans de véritables tuteurs ou officiers de probation, qui prolongent par le dialogue ce qu'un simple pointage au commissariat ou à la gendarmerie ne peut assurer. Comme pour le suivi thérapeutique, il n'est pas d'efficacité sans contrôle réel.

Ensuite, le texte n'ayant pas de portée rétroactive, qu'envisagez-vous pour les condamnés en passe d'être libérés mais présentant un risque grave de récidive, en particulier si aucun réexamen de leur situation n'a été prévu ou s'ils ont commis plusieurs crimes ?

Enfin, je voudrais évoquer, sur le plan des principes, une affaire atroce, qui a endeuillé la France entière, et en particulier le VIIe arrondissement de Paris, où le père de la victime, qui a fait preuve d'une dignité exemplaire, exerce sa mission d'officier, est connu et très apprécié. La jeune et héroïque Anne-Lorraine Schmitt a été assassinée un dimanche matin dans un train de banlieue par un violeur récidiviste, condamné et libéré, qui tentait d'abuser d'elle. Elle avait vingt-trois ans,

Le viol est un crime particulièrement odieux et je ne vois guère de différence d'âge de la victime qui puisse justifier un traitement différent quant aux risques de récidive ; à moins d'admettre qu'une jeune femme majeure mérite moins de protection contre le viol qu'une mineure, ou que le violeur d'une majeure ne s'attaquera jamais à une mineure. Absurde naturellement ! Comme il est injuste aussi d'exclure les personnes âgées particulièrement vulnérables.

Voilà pourquoi j'ai cosigné un amendement étendant aux autres auteurs de crimes les plus graves, dont le viol, les mesures proposées pour les auteurs de crimes pédophiles. Les travaux de la commission des lois ont devancé heureusement mon intention. Je souhaite très ardemment que le Gouvernement s'y rallie.

Madame la garde des sceaux, confirmez-nous, je vous en prie, que, demain, en l'état du droit et de son application, le calvaire d'Anne-Lorraine ne pourra plus jamais se reproduire.

Sous le bénéfice de ces observations, je voterai, bien sûr ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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