…ce qui laisse à penser que nous en sommes loin ! Mais, constatant l'opposition du rapporteur du projet au Sénat, M. Le Grand décida de se retirer de la discussion.
En outre, si la question des OGM est de nature scientifique, leur implication économique, sociale et environnementale suppose d'associer la société civile à toute décision d'autorisation. Michel Barnier, ministre de l'agriculture, avait rappelé au Sénat le caractère provisoire du comité de préfiguration, confiant à la loi le soin de « refonder de manière démocratique le système indépendant et légitime qu'exige une saine application du principe de précaution ». Or le débat parlementaire a gravement déséquilibré la haute autorité, transformée en Haut conseil des biotechnologies, présidé par un scientifique et où les avis du comité scientifique l'emportent sur les recommandations du comité de la société civile. On a ainsi fait payer aux politiques l'avis du comité de préfiguration sur le maïs MON 810.
Ensuite, et c'est peut-être le plus important, la loi issue du Sénat n'a rien d'un « projet non écologique prouvant qu'il n'était pas possible de faire autrement », pour reprendre les termes du Président de la République : l'affirmation de la liberté de consommer et de produire avec ou sans OGM et les prescriptions relatives à la dissémination font courir un risque réel à l'avenir de l'agriculture alternative sur notre territoire. Elles s'opposent en particulier à la volonté, exprimée lors du Grenelle de l'environnement, de développer les repas issus de l'agriculture biologique en inscrivant dans les cahiers des charges de la restauration collective – par exemple, au conseil général des Hauts-de-Seine – des produits labellisés ou issus d'exploitations certifiées. Comment désormais garantir que ceux-ci sont sans OGM ?
Le refus répété de définir les modalités d'analyse du « sans OGM », qui selon nous, madame la ministre de l'écologie, repose sur le principe du seuil de détectabilité, a montré combien la transparence effrayait une partie de votre majorité. Il ne suffit pas de dire que c'est au Haut conseil d'en décider ; il fallait inscrire clairement dans la loi que le seuil de détectabilité définit l'absence d'OGM. Mais vous ne l'avez pas accepté !
On peut également s'interroger sur la compatibilité du droit à produire avec ou sans OGM avec les préconisations du Grenelle de l'environnement en matière de préservation de la biodiversité, notamment avec la création de la « trame verte » annoncée par le Président de la République comme un outil d'aménagement du territoire et constituée de grands ensembles naturels reliés entre eux par des corridors.
Enfin, la charge de la preuve n'est nullement inversée puisqu'il incombera, une nouvelle fois, aux contaminés de prouver la contamination, et cela dans des conditions restrictives qui n'apporteront aucune garantie et n'engageront nullement la responsabilité des grands semenciers.
Je pense, mes chers collègues, qu'il faudra créer un « GIGM » pour venir en aide aux victimes de votre loi, car le texte légalise la prise d'otages multiples. Les premiers seront les agriculteurs qui vont cultiver des OGM sur leurs territoires sans savoir que votre texte leur tend un piège et fera d'eux des coupables ! Leurs voisins seront également pris en otages, car ils seront contaminés sans avoir pu se défendre, même si ce texte les avertit qu'ils seront peut-être victimes ! Enfin, les consommateurs croieront consommer sans OGM et se fieront à l'étiquetage, qui ne les alertera pas en deçà d'un seuil de 0,9 %, alors que la présence d'OGM peut être détectée à partir de 0,1 %, voire moins encore !
Qu'est-il donc advenu entre l'annonce présidentielle et le présent projet de loi ? En d'autres termes, à qui profitent les OGM ?
Un OGM est un organisme vivant dans lequel a été introduit de manière artificielle un gène étranger, dit « gène d'intérêt », qui apporte une caractéristique nouvelle – par exemple la résistance à un herbicide que l'on peut épandre sans danger pour la plante, même cultivée de manière irraisonnée. En réalité, le principal gène d'intérêt actuellement inoculé dans l'agriculture est celui de la rentabilité financière pour les grandes firmes semencières internationales,…